La géothermie dans le bouquet énergétique chinois…
La place de la géothermie dans la production électrique mondiale va tendre à croître selon le nouveau rapport de l'Association américaine GEA. La filière géothermique chinoise est actuellement modeste. Avec 100 GWh et une capacité installée de 25 MW, la géothermie représentait moins de 0,01% de l'électricité produite dans le pays en 2012. Si le pays occupait la 18e place pour l'électricité fin 2012, il était à la 1ère place en ce qui concerne l'usage direct de la géothermie. Elle aurait généré 21.000 GWh, essentiellement sous forme de chauffage. Ce décalage s'explique essentiellement par des investissements peu importants par le passé dans cette forme d'énergie ainsi que par des difficultés techniques ayant un impact sur les performances des centrales géothermiques (ayant par ailleurs conduit à la fermeture de la plupart d'entre elles).
La création d'une association nationale pour la géothermie, discutée le 13 mai dernier lors d'un forum tenu à Xinyu (Jiangxi), et dont un des acteurs majeurs serait le Ministère du territoire et des ressources (responsable, entre autres, des ressources énergétiques), a remis en avant la place de la géothermie dans le bouquet énergétique chinois. Cette source d'énergie propre aurait un fort potentiel en Chine (260.000 fois la consommation énergétique annuelle actuelle), et le développement des techniques progresse aussi bien sur le plan de la recherche que de l'exploitation. Energie plus constante dans le temps que l'éolien ou le solaire, la géothermie permettrait au pays de répondre aux objectifs du 12e plan quinquennal (2010-2015), à savoir la réduction de la dépendance aux hydrocarbures et au charbon par le développement d'énergies alternatives.
La Chine dispose de 12 bassins géothermiques majeurs, dont la région de Pékin et la province du Shandong. Les régions comprenant les ressources les plus importantes sont situées aux frontières des plaques lithosphériques : le long de la ceinture himalayenne (plateau du Tibet), au niveau de l'île de Hainan et dans le sud-est, le long de la plaque des Philippines.
Les Chinois utilisaient les sources chaudes dès le IIIe siècle avant J.-C., mais l'emploi de cette énergie dans la production électrique n'a débuté que dans les années 1960. Les premières centrales géothermiques ont été construites dans les années 1970, dont la centrale de haute énergie de Yangbajing au Tibet, toujours en activité (Figure 2). Fin 2012, la surface de chauffage par la géothermie a atteint 210 millions de m2 en Chine ; la première ville pour le chauffage par la géothermie est Shenyang (Liaoning), avec 18% de sa surface de chauffage en 2008 et une capacité de chauffage d'environ 3 GWt [1] fin 2009.
Techniques et recherche en géothermie
L'Institut de conversion de l'énergie de Canton, le comité des experts en géothermie de la société de recherche de l'énergie de Chine et le service géologique de Chine, respectivement sous tutelle de l'Académie des sciences de Chine (CAS), de l'Association pour la science et la technologie (CAST) et du Ministère du territoire et des ressources (MLR), pilotent les recherches sur la géothermie. Il existe en outre des projets de recherche et développement privés, notamment au sein de Sinopec Green Energy Geothermal Development, une entreprise conjointe entre Sinopec et l'islandais Orka Energy. Leurs travaux pourraient permettre l'exploitation du potentiel élevé du pays.
Il existe plusieurs techniques principales en géothermie, selon la température des eaux utilisées, ou la profondeur des roches atteintes :
- Usage direct des ressources hydrothermales (basse et moyenne énergie) : c'est la technique la plus ancienne et la plus largement utilisée en Chine. Les eaux du sous-sol à une température relativement élevée (jusqu'à 150°C) sont utilisées pour le chauffage urbain, les cultures en serre, l'aquaculture, les soins médicaux et de bien-être (balnéothérapie et thermalisme), ainsi que pour des applications industrielles et agricoles comme la climatisation d'ateliers, la teinture de tissus ou encore le séchage de produits agricoles ;
- Les pompes à chaleur géothermiques (geothermal heat pumps, GHP) : appelées également ground source heat pumps (GSHP), leurs applications ont connu un développement très important ces dernières années, encouragé par les autorités chinoises. Employées essentiellement dans les grandes villes, pour le chauffage, la climatisation et l'alimentation en eau chaude des bâtiments, elles utilisent la température peu élevée (souvent inférieure à 30°C) des eaux du sous-sol superficiel ;
- Les centrales géothermiques : de moyenne énergie (à fluide binaire) ou de haute énergie (vapeur), elles utilisent des fluides hydrothermaux à des températures de 80°C à 350°C et des systèmes à turbines pour produire de l'électricité ;
- L'enhanced geothermal system (EGS) : évolution du concept des roches chaudes sèches (hot dry rock, HDR), cette méthode propose de récupérer directement la chaleur des roches à plusieurs milliers de mètres de profondeur, en employant les techniques de fracturation hydraulique. Encore au stade de la recherche pour la production d'électricité et le chauffage, elle est considérée comme très prometteuse par les experts chinois et a bénéficié d'un projet en coopération avec l'Australie entre 2008 et 2010 afin d'évaluer son potentiel en Chine.
Objectifs et défis pour l'avenir de la géothermie en Chine
Même si le développement de la géothermie est encouragé (le 12ème plan annonce un objectif d'1,7% du bouquet énergétique en 2015), les projets de géothermie sont peu mis en avant dans les perspectives nationales en comparaison d'autres énergies renouvelables comme l'hydro-électrique, l'éolien ou le solaire. En revanche, un certain nombre de projets devraient se développer, notamment en usage direct, au niveau local, dans les régions isolées, hors des grands centres.
L'augmentation de la production d'électricité géothermique reste pour l'instant sujette au développement des recherches concernant les EGS, dont la Chine ne maîtrise pas encore la technique. Les investissements actuels et les avancées dans ce domaine pourraient permettre dans l'avenir d'exploiter le potentiel élevé de la Chine en géothermie profonde.