L’avenue Foch, artère urbaine à réinventer
L’agence d’architecture Hamonic+Masson, en collaboration avec la société Constructions et Développements Urbains, a proposé de re-visiter l’avenue Foch, grande artère urbaine du XVIe arrondissement de Paris.
Fruit d’échanges et de partages, l’élaboration d’un projet fou tient dans la création d’un grand parc urbain autour de la notion de bâtir dense.
Longue de 1,3 km et large de 140 m, cette artère dispose d’un espace hors du commun pour ré-invinter un projet dans l’ère du temps. Ainsi est née l’idée d’une reconquête qui a eu l’effet médiatique escompté propre à bouleverser la représentation contemporaine.
© Hamonic+Masson/Luxigon
Ainsi l’équipe du projet a souhaité inscrire la notion urbaine comme une reproduction fluide d’une multitude formes citadines, recréer de l’aventure, de l’imprévisible, de la surprise et des émotions dans une volonté de révéler le potentiel d’un site exceptionnel.
L’équipe propose de re-donner une nouvelle image à ce territoire triste dans sa conception dont l’histoire remonte au second Empire. Créée en 1854, elle est baptisée avenue de l’impératrice. Elle est renommée avenue du général Ulrich de 1870 à 1875, puis avenue du bois de Boulogne – ou simplement avenue du bois – jusqu’en 1929, où elle reçoit le nom du maréchal de France Ferdinand Foch (1851-1929), généralissime des armées alliées en 1918. Quatre appellations en 75 ans.
En 1956, le maréchal Tito est la dernière personnalité politique à emprunter de façon officielle l’avenue Foch. Depuis, les hauts-de-forme ont disparu, les carrosses sont rangés et les chevaux ont été remplacés par un flot de voitures.
Ce projet de requalifier l’avenue Foch souhaite répondre aux enjeux urbains en tenant compte des critères économiques indispensable à la Ville, mais aussi des ambitions sociales fortes par une volonté de rééquilibrage en densifiant l’ouest parisien. C’est le story-board de la place de l’Étoile à la porte d’Auteuil en passant par l’avenue Foch qui se trouve métamorphosé.
Donner un sens à un territoire vaste, à mi-chemin entre urbanité et ruralité. L’équipe a tenté non pas de se focaliser sur l’architecture, un style ou une écriture, mais bien de définir les moments importants, les échelles rencontrées, les parcours et les ambiances. « Comprendre sans figer, raconter sans réduire, prendre le temps de la narration. Un trait d’union entre deux territoires allant l’un vers l’autre, l’un avec l’autre, le centre de paris et le Grand paris. »
Extrait du dossier du projet « Avenue Foch, un projet de l’Étoile à la porte d’Auteuil »
"Parce que l’ignorer ne mène qu’à la reconduction d’erreurs anciennes, le regard sur l’avenir est impossible sans un regard sur le passé. Originellement, l’avenue Foch est un lien fort entre le bois de Boulogne et Paris, son prolongement naturel. Nous proposons ici de revenir à cet aspect fondateur essentiel, progressivement détourné puis perdu par l’édification du périphérique. En effet, dès 1960, la réalisation du rond-point de la porte Dauphine, dû à la présence de plus en plus importante de la voiture, porte le premier coup et contribue à la séparation physique du bois et de l’avenue, qui est définitive en 1973, quand le périphérique est édifié. L’avenue Foch, ayant jusqu’ici le statut de la plus grande promenade urbaine, devient la première autoroute intra muros. Elle brille aujourd’hui par les absences qu’elle met en scène. Absence d’activités, absence de vie tout simplement. Convoquer l’histoire nous permet de comprendre les strates urbaines, les éléments fondamentaux et les moments de ruptures qui ont contribué à la perte de l’essence première de cette voie.
Il est intéressant de constater ici que la construction du parking Étoile Foch en 1968 a totalement éventré la moitié de l’avenue. Le paysage que nous avons donc sous les yeux aujourd’hui est en fait, pour moitié, un pastiche hausmannien de la fin des années soixante. Les dossiers de classement de l’avenue Foch, rattachée au bois de Boulogne, du 23 septembre 1957 et du 18 juin 1960 n’ont donc pas empêché la construction du périphérique et du parking. La voiture et les déplacements étant décrétés cause nationale, l’État a signé les autorisations nécessaires. Aujourd’hui, le périphérique se retrouve donc en site classé ! L’histoire nous permet ainsi de constater des absurdités, mais aussi de s’appuyer sur la jurisprudence. Si la voiture a été une cause nationale dans les années soixante et soixante-dix, que dire du logement et de l’espace public en ce début de xxie siècle ?"
"Le périphérique a également engendré un parcellaire résiduel en lieu et place des anciennes fortifications. Après le déclassement des fortifications au début du siècle dernier, la mise en valeur des terrains disponibles attire divers projets de lotissements. Par exemple, celui de «boulevard à redans» entre la porte Maillot et la porte d’Auteuil d’Eugène Hénard, datant de 1903, illustre à merveille les ambitions de l’époque en matière de réaffectation programmatique du foncier libéré. Ce projet n’a jamais vu le jour : seule une bande plus large a trouvé sa place et un espace libre de promenade a été conservé, faisant le lien entre le bois de Boulogne et les bâtiments de logements. La construction du périphérique a remis en cause cet horizon paysagé et a créé un espace résiduel entre la nouvelle infrastructure et les constructions.
Un potentiel étonnant nous est ainsi légué, où nous pouvons imaginer installer une nouvelle typologie d’habitat parisien portant les valeurs de nos réflexions en matière d’écologie urbaine, de mixité sociale, et ancrée dans un paysage fabuleux. Notre projet s’inscrit dans ce questionnement contemporain et pourrait devenir l’emblème d’une volonté nationale de répondre à des questions d’actualité brûlantes, que se posent l’ensemble des capitales mondiales. Il apporte des réponses précises en matière d’espaces verts en milieu urbain, de mixité programmatique, d’usages, d’espaces publics, de lieux partagés, de transports doux, de logements. Il s’inscrit dans une réflexion politique qui vise à réactiver l’un des plus incroyables lieux parisiens dans un travail d’interconnexion entre l’échelle locale et à l’échelle métropolitaine."
"Pour cela, nous proposons de faire de l’avenue Foch la plus grande avenue piétonne de France. Par un élargissement des contre-allées existantes qui viendraient ainsi accueillir l’ensemble de la circulation automobile, nous libérons entièrement l’avenue qui devient, sur toute sa longueur, un espace public. Les voitures repoussées en marge, nous pouvons alors faire pénétrer le bois de Boulogne dans Paris, en installant un véritable parc sur la moitié de l’avenue. On y trouverait, disséminés çà et là, des lieux représentatifs d’une vie parisienne intense et alternative. Une image de la ville plus indécise et en continuelle reprogrammation, aux contours plus flous, n’en demeure pas moins d’une grande inventivité et créativité. Dans sa partie est, l’avenue Foch se densifie autour d’une mixité programmatique (flagship, hôtel de luxe, bureaux, commerces, logements...). Ici, nous construisons la véritable place de l’Étoile, futur lieu de rendez-vous des Parisiens comme des touristes et prolongement naturel des Champs-Élysées.
À son extrémité ouest, le rond-point de la porte Dauphine (place du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny) donne naissance à un «hub» piéton permettant la connexion directe de l’avenue Foch au bois de Boulogne, et distribuant l’université Dauphine, les équipements sportifs du boulevard de l’amiral Bruix et la gare du RER C (avenue Foch). On y trouve, en plus de la rocade piétonne, une bibliothèque, des restaurants, des salles de conférences, et des espaces de co-working.
Il n’est donc pas question de faire fi du passé, mais de réactiver le patrimoine originel dans un questionnement à l’image de notre époque et porteur de valeurs de partage et d’optimisme. Se servir d’hier pour avancer aujourd’hui et embrasser l’avenir avec ambition.
La ville de Paris demeure un terrain d’invention et porte en elle les valeurs de la modernité."
Avenue Foch un projet de l’Étoile à la porte d’Auteuil