Un plancher chauffant utilisé jadis par les romains revient dans les couloirs du temps, l’Hypocauste…
Lauréat du Trophée de la construction 2014 organisé par Batiactu et SMA, dans la catégorie solution technique – Artisan, un plancher chauffant par circulation d’air de 53,6m² à forte inertie alimenté par capteur solaire à air et air chaud d’une hotte de cheminée s’inspire d’un concept ancestral en le remettant au goût du jour. Un système simple qui permet un maximum de confort et de durabilité, un minimum d’entretien, et une flexibilité nécessaire pour évoluer dans le futur en s’adaptant aux nouvelles technologies. Utilisé largement par les Romains et presque oublié de nos jours, devient la meilleure solution de chauffage, grâce à la mise à jour faite par Jesús Castellanos (appelée Hypocauste XXI pour rappeler qu’il s’agit de la version du 21ème siècle).
Un hypocauste est un système de chauffage par le sol déjà connu par les Grecs mais principalement développé et perfectionné par les Romains. On en trouve de nombreux exemples partout où les Romains ont fait des constructions. Il était utilisé dans les thermes et dans certains palais et maisons particulières.
Le sol des habitations chauffées par l’hypocauste était composé de dalles qui reposaient sur des piliers de briques. Ces piliers pouvaient avoir une hauteur de 60 à 120 cm.
Grâce à un foyer situé à l’extérieur des constructions, on pouvait faire un feu dont les fumées étaient introduites dans l’hypocauste. Pour évacuer la fumée, un conduit en terre cuite était disposé contre le mur opposé au foyer. Dans certains cas, pour permettre une montée plus importante de la température, plusieurs de ces conduits de fumée étaient placés sur le mur de manière à créer un mur chauffant. On estime que la température intérieure d’une maison pouvait atteindre 30°C, 50°C lorsqu’elle disposait de conduits muraux.
Conseilllé par les Etablissement Castell, et par Jesús Castellanos, c'est cette solution qui a été retenue pour la rénovation et l'agrandissement d'une maison 1900 à Montourtier en Mayenne: un capteur solaire thermique en toiture réchauffe l'air circulant dans un réseau placé au niveau du sol. Un système à la fois simple et discret qui permet de réduire la facture énergétique.
Le système de plancher chauffant par circulation d'air est rustique et sans équipement électronique sophistiqué. Il répond ainsi pleinement aux besoins de l'occupant des lieux qui souhaitait, de plus, ne faire intervenir que des artisans locaux (maçon et carreleur). Techniquement, le système se veut le plus simple possible, ne faisant appel qu'à des matériaux de construction ordinaires.
Description par le propriétaire des lieux :
« C'est un simple labyrinthe de parpaings. La toiture en ardoise a été équipée d'un certain nombre de tuiles de verre, le tout étant fixé sur un bac acier isolé. Une lame d'air chaud se crée dans l'espace ménagé et la ventilation vient l'insuffler dans le réseau situé sous le plancher, un étage plus bas. Le discret capteur solaire, totalement intégré à la toiture, ne mesure que 16 m2 mais parvient à chauffer les presque 54 m2 du salon. En été, il suffit de couper la circulation d'air pour conserver la fraîcheur. En hiver, ce type de chauffage ne fonctionne qu'avec le soleil, mais quatre heures d'ensoleillement suffisent pour fournir 48 heures de chaleur. Car la solution adoptée permet d'utiliser la masse de la dalle comme un élément d'inertie thermique : la chaleur est ainsi accumulée pendant la période de chauffe puis diffusée par le sol sur une longue période ».
Intitulé HYPOCAUSTE XXI, référence au XXIème siècle, ce plancher contient quelques améliorations par rapport au modèle romain, qui en font un système plus adapté aux besoins actuels :
1.- On utilise de l’air chaud, mis en mouvement par un ventilateur, au lieu de fumée pour chauffer le sol. La fumée présente le danger d’exposer les personnes au monoxyde de carbone, qui passerait par les micro-fissures du plancher.
2.- La dalle et les murs sont fortement isolés pour éviter les déperditions d’énergie. Une attention particulière est portée à éviter tout pont thermique.
3.- La source de chaleur peut être un poêle traditionnel ou à granulés avec récupérateur d’air chaud, une pompe à chaleur (qui peut aussi de servir de climatiseur en été), un canon à air chaud (aérotherme) électrique, à gaz ou au gasoil. On peut aussi connecter un aérotherme à un chauffe-eau solaire, récupérer l’air chaud de la partie haute de la maison en mi-saison ou récupérer une partie de la chaleur de la VMC.
4.- On peut concevoir une ou plusieurs entrées d’air chaud pour pouvoir combiner différentes sources de chaleur.
5.- Le tunnel-labyrinthe est construit entre la dalle de béton et le sol fini. Dans une section typique d’un Hypocauste XXI, on trouve :
- des gravillons (ou hérisson) sur 20 cm d’épaisseur sur le terre-plein ;
- 5 cm de sable ;
- un film polyane ;
- 10 cm d’isolation ;
- une dalle de béton armé (avec treillis soudé ou fibres structurelles) de 8 à 10 cm d’épaisseur, désolidarisée des fondations (isolant) pour éviter le pont thermique (voir ci-dessous l’image du pont thermique et de la construction sans pont thermique)
- sur la dalle, l’hypocauste avec son tunnel-labyrinthe de 20 cm de hauteur fait de briques creuses placées sur chant (à la verticale), ou de parpaings, avec des bardeaux en terre cuite ou des panneaux de bois-ciment spécial plancher (souvent utilisés comme coffrage perdu) par dessus ;
- une chape de nivellation de 3 cm de mortier par dessus les bardeaux ;
- un carrelage en terre cuite (pour une plus grande inertie thermique, mais on peut installer à la place parquet, linoléum ou moquette).
6.- La conception du labyrinthe tient compte de :
- la position de la source de chaleur ;
- la position de la cuisine, des couloirs, du séjour et des chambres ;
- la position des façades nord et sud.
Les sources de chaleur
L’insert et la hotte
Un insert à bois (bûches) avec un combustible renouvelable et peu d’impact environnemental. La hotte reçoit toute la chaleur du foyer.
La toiture solaire
L’énergie solaire est sans doute la plus propre des énergies. Il s’agit d’une énergie inépuisable, répartie sur toute la terre et accessible à tous. On estime à 1000 watts par mètre carré l’énergie qui arrive sur la surface de la terre dans les meilleures conditions climatiques. En utilisant l’énergie solaire, on ne produit pas de pollution et on évite la production des gaz à effet de serre. Ce n'est qu’à la fabrication des éléments qu’on consomme de l’énergie et on pollue. D’où l’importance d’utiliser des techniques les plus simples possibles. Le rendement des différentes techniques de captation d’énergie solaire est très variable. L’énergie photovoltaïque transforme une part modeste (15 %) de l’énergie solaire en électricité, tandis que les systèmes thermiques arrivent à transformer entre 60% et 90% de l’énergie solaire en chaleur.
L’une des caractéristiques de l’énergie solaire est qu’elle n’est pas constante. Ce facteur est considéré par ses détracteurs comme son plus grand inconvénient. Pour pouvoir se servir de cette énergie au moment où on en a besoin, on doit trouver le moyen de l’accumuler.
Schéma de fonctionnement de la toiture solaire reliée au plancher chauffant par circulation d’air. Le ventilateur se déclenche automatiquement en présence du soleil grâce à une sonde de température.
Pour le chauffage elle peut couvrir entre 20 et 40% des besoins.
Avec la toiture solaire à production d’air chaud :
1/ Ce type de capteur est beaucoup plus simple puisqu'on fait circuler de l’air. Pas de risques de gel ou de surchauffe.
2/ Un simple ventilateur avec une sonde de température et des tuyaux isolés est suffisant pour faire marcher le système.
3/ Pas besoin d’entretien du système qui peut fonctionner de manière autonome (il suffit de débrancher le ventilateur en été).
Grâce à l’énorme pouvoir d’accumulation du plancher chauffant à circulation d’air, avec quelques heures de soleil, on peut maintenir chaude la maison pendant des heures ou des jours selon l’isolation de la maison. Il est possible, dans le futur, d’installer un échangeur air /eau pour produire de l’eau chaude pendant l’été. Matériaux utilisés : bac – acier noir et ardoises en verre.
Les ventilateurs
Deux ventilateurs de 800 m3/h ont été installés pour assurer l’impulsion de l’air. Le premier aspire l’air chaud du capteur solaire et se déclenche automatiquement grâce à un thermostat réglé à 35 degrés et une sonde de température installée dans la partie supérieure du capteur solaire. Le deuxième aspire l’air de la hotte et le thermostat est réglé également à 35 degrés.
Zoom sur les avantages du plancher chauffant par circulation d’air
1/ Facilité de mise en œuvre : pas d’installations compliquées. Le plancher chauffant à circulation d’air de 60 m2 nécessite seulement trois jours de travail en maçonnerie et requiert uniquement des matériaux basiques : parpaings, briques et mortier.
2/ Économique : les matériaux utilisés sont standard en maçonnerie. Le plancher chauffant à circulation d’air dure autant que la maison ! Aucun entretien n’est à prévoir.
3/ Inertie thermique : l’un des grands défauts des maisons isolées à l’intérieur (c’est le cas de la majorité de maisons en France) est le manque d’inertie thermique qui oblige à chauffer en continu. À partir du moment où l’on arrête le chauffage, la maison commence à se refroidir. Le plancher chauffant à circulation d’air profite d’un élément existant dans toutes les maisons : la dalle. L’ensemble dalle, briques, bardeaux céramiques, chape de nivelation et carrelage, dans le plancher chauffant à Montourtier, suppose une masse approximative de 25 tonnes. Cette masse absorbe la chaleur à certains moments (période ensoleillée ou bien le moment où l’on a allumé la cheminée) et la diffuse tout au long de la journée.
4/ Diffuseur thermique : l’ensemble travaille comme un énorme diffuseur de chaleur. Donc, pas de risques de formation de points chauds ou froids. La chaleur se répartit uniformément.
5/ Plancher chauffant à circulation d’air: comme d’autres planchers chauffants, il permet d’avoir une température uniforme à l’intérieur des pièces : 21-22 o au sol, 20-21o à 1.5 mètres de hauteur et 20-21o au plafond. Avec un chauffage par radiateurs les températures habituelles sont : 17o au sol, 20o à 1.5 mètres et 22o au plafond. Dans ces conditions il faut une température moyenne supérieure (donc une plus grande consommation d’énergie) pour avoir un confort inférieur.
6/ Sain : température uniforme, pas de brasement d’air ni de poussières (qui découle du phénomène de convection créé par les radiateurs), pas d‘écart de température entre les différentes pièces de la maison. De plus, comme il s’agit d’un vide sanitaire chauffé, on évite aussi les risques de remontées d’humidité.
7/ Flexible : à tout moment on peut changer de source de chaleur ou en combiner plusieurs. On ne reste donc pas “marié” à un système de chauffage précis qui peut devenir obsolète.
8/ Écologique : en choisissant des matériaux nobles qui transpirent (briques, bardeaux et carrelage en terre cuite) on peut couvrir toutes les demandes de la bio-construction. Pas besoin de matériaux plastiques ou métalliques. Aucune sophistication susceptible de polluer ou d’entraîner une panne.
Le plancher chauffant par circulation d’air : un impressionnant accumulateur de chaleur
Un accumulateur de chaleur n’est qu’un système capable de capturer et stocker l'énergie thermique pour la restituer ensuite. L'inertie connait un véritable succès et représentait en 2008 la moitié du marché du matériel de chauffage électrique mural. Les fabricants offrent des produits sous diverses appellations ou brevets : "chaleur douce", "chaleur authentique", "chaleur sensitive", "inertie maîtrisée", "double inertie"...
L’une des raisons de ce succès est justement le manque d’inertie thermique dans les constructions actuelles, où l’on fait l’isolation à l’intérieur de la maison. Le seul élément à l’intérieur de l’isolant avec une masse importante est la dalle béton des fondations et c’est cet élément que le plancher chauffant à circulation d’air utilise comme accumulateur. Avantages de l'accumulateur de chaleur :
Ce système permet d'économiser de l'énergie puisque la chaleur reste plus longtemps présente dans le logement (pas besoin de chauffer en continu). La chaleur dégagée est principalement rayonnante (souvent comparée à l'action du soleil), apportant un confort rapide et homogène. Evitent également le brassage des poussières typique des systèmes par convection. Diffuse en continu une chaleur stable et à basse température (évite les points chauds). Grand confort thermique.
Les améliorations apportées dernièrement tendent vers un même objectif : fournir une chaleur douce radiante, continue, source de confort thermique, et qui limite au maximum la consommation d’énergie due aux pics de chaleur. Dans le tableau suivant vous trouverez un comparatif des masses des différents systèmes de chauffage.
Comme on peut le constater, le plancher chauffant à circulation d’air est de loin le système de chauffage avec la plus grosse masse d’inertie.
Ceci dit, la différence, en termes d’accumulation d’énergie entre ces systèmes, est moins importante en raison des caractéristiques des matériaux utilisés (simple béton et briques pour le plancher chauffant à circulation d’air et matériaux plus sophistiqués pour les autres) et surtout dû au fait que dans l’hypocauste on ne peut accumuler de la chaleur que jusqu'à une température limitée (proche de 30oC) tandis que les autres systèmes peuvent se permettre de dépasser les 100oC dans le corps de chauffe.
Une estimation des différentes capacités d’accumulation d’énergie pour les mêmes systèmes de chauffage est présentée dans le tableau suivant.
Pour la réalisation de cette estimation ont été utilisées les données suivantes :
|
Unités |
Acier |
Brique |
Béton |
Chaleur spécifique |
Kcal/kg ºC |
0,12 |
0,2 |
0,16 |
Conductivité thermique |
W/mK |
50,2 |
0,15 |
0,8 |
|
Unités |
Radiateur |
Rad. à inert |
Poêle à bois |
Poêle à masse |
Hypocauste |
Masse |
Kg |
5 |
200 |
350 |
3500 |
30000 |
Delta température du corps de chauffe* |
ºC |
60 |
150 |
120 |
50 |
12 |
* Il s’agit de la différence entre la température ambiante (fixée à 16ºC ici) et celle du corps de chauffe à la plus haute température qu’il puisse atteindre.
Equivalence calorie – kWh : 1 calorie (cal) = 1,162 x 10-6 kilowatt heure (kWh)
On peut voir aussi que l’hypocauste est capable d’emmagasiner une quantité énorme d’énergie en raison principalement de sa masse.
La durée de restitution de cette énergie va dépendre de la performance énergétique du bâtiment.
La classification officielle des bâtiments en relation à leur performance énergétique est : A 18,8 KWhep/m2.an
Dans le tableau suivant on donne une estimation de la durée de la chaleur accumulée par chaque système de chauffage et pour chaque type de performance énergétique.
Fiches techniques
Entreprise conseil
Entreprise générale Castell
Mise en oeuvre :
Artisans locaux
- Rénovation du salon de 30 m²
et extension de 24 m²
- Budget total de rénovation : 30.000 €
- Surcoût système de chauffage : 2 500 €
- Capteur solaire de 16 m²
- 2 ventilateurs de 800 m³/h
- Economie de bois d'environ 30%
AA6 - ECS - CHAUFFAGE - REFROIDISSEMENT - Le blog de l'habitat durable
ECS - CHAUFFAGE - REFROIDISSEMENT Panorama des articles du blog sur les réseaux d'eau chaude sanitaire, sur le chauffage et le refroidissement : Energie fatale, ressource de demain... ECS - ...