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SPECIAL QUANTUM DOT : DETECTEURS ET/OU SOURCES DE CONTAMINATION ?

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SPECIAL QUANTUM DOT : DETECTEURS ET/OU SOURCES DE CONTAMINATION ?

SPECIAL QUANTUM DOT : DETECTEURS ET/OU SOURCES DE CONTAMINATION ?

Dernier volet consacré aux nanostructure de semi-conducteurs, après avoir largement présenté ces ''puits de potentiel'' l'article de ce jour porte sa réflexion notamment à travers celles de l'ANSES qui à travers son bulletin de Veille scientifique de juillet 2014 a émis quelques réserves notamment sur la dissémination des Quantum Dots (QDs) dans le milieu naturel, subséquente à leur utilisation croissante, appelant une approche responsable qui consiste à étudier, en parallèle, leurs éventuels effets toxiques L’étude de Blickley et coll montre par exemple qu’en dépit d’une faible biodisponibilité, les effets des QDs (structure cœur/coquille CdSe/ZnS) sur le genre des poissons et sur le taux de fécondité révèlent peut-être des propriétés de perturbateurs endocriniens, ce qui devra être plus amplement étudié.

Les quantum dots (QDs) sont une classe particulière de nanoparticules. Il s’agit de nanocristaux de matériaux semi-conducteurs, dont la petite taille leur confère des propriétés électroniques intermédiaires entre les matériaux semi-conducteurs classiques (de taille macroscopique) et les molécules individuelles. Les QDs ont ainsi des propriétés de photoluminescence lorsqu’ils sont excités (sous UV par exemple). Ces propriétés électroniques exceptionnelles sont étudiées en vue de leur utilisation dans les transistors, les cellules solaires, les LEDs ou encore en imagerie médicale. Parmi les applications les plus prometteuses, nous nous arrêterons ici sur l’utilisation potentielle des QDs comme détecteurs en milieu aquatique de contaminants tels que les ions cadmium et le bisphénol A. Le cadmium est un contaminant connu pour être issu de multiples sources anthropiques (batteries, teintures et pigments, alliages, engrais et pesticides) mais aussi pour causer de graves pathologies lorsqu’il entre dans la chaîne alimentaire (anémie, hypertension, problèmes neurologiques et risques accrus de cancer (1, 2)).

Le bisphénol A (BPA) est partout dans notre environnement, environ trois millions de tonnes de BPA sont produites chaque année dans le monde (3) : il est surtout utilisé dans les résines époxyde qui tapissent l’intérieur de certaines boîtes de conserve ou de canettes, mais est aussi contenu dans un grand nombre de tickets de caisse (ce dernier emploi étant toutefois en régression), en tant que produit permettant une impression thermique sans encre. Le bisphénol A était même utilisé pour la fabrication des biberons, ce qui a été interdit en France le 23 juin 2010. Le 1er janvier 2015, il sera interdit dans tous les contenants alimentaires ainsi que dans les dispositifs médicaux destinés aux bébés et femmes enceintes, car le BPA est un perturbateur endocrinien.

Dans ce contexte, les effets toxiques du cadmium et du BPA justifient le développement de moyens analytiques adaptés, permettant leur détection à très faible concentration, tels que ceux à base de QDs proposés ici dans les études de Hu et coll. et Zhang et coll., respectivement.

Comme souvent avec les nanotechnologies, les applications particulièrement innovantes et prometteuses vont conduire inexorablement à leur dissémination dans le milieu naturel. Il apparaît donc essentiel d’étudier, en parallèle des applications potentielles des QDs, leur devenir dans l’environnement et leurs éventuels effets toxiques. Ce dernier point est l’objet de l’étude de Blickley et coll., qui ont tenté d’évaluer la toxicité de QDs1 chez une espèce de poissons estuariens.

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Déclenchement de la fluorescence de quantum dots induite par le déplacement de ligand pour une détection ultrasensible des ions cadmium - Hu X, Zhu K, Guo Q, Liu Y, Ye M, Sun Q, Ligand displacement-induced fluorescence switch of quantum dots for ultrasensitive detection of cadmium ions. Ana Chim Act 2014;812:191-8.

Dans cette étude Hu et coll. présentent des résultats à la fois innovants et encourageants en matière de développement de capteurs à faible concentration de cations métalliques en milieu aqueux. En particulier, le cas du cadmium ici étudié est d’importance majeure, car ses effets toxiques sont observés même à faible concentration, ce qui justifie le développement de moyens analytiques adaptés permettant sa détection à très faible concentration. En particulier, les normes européennes et américaines définissent des limites de potabilité à 45 nM et 9 nM de cadmium par litre, respectivement. Les détecteurs à base de quantum dots (QDs) de CdTe développés ici par les auteurs semblent adaptés, puisque la limite de détection est de 0,01 nM, soit 500 fois plus faible que celle atteinte par les études précédentes sur les QDs (4,5). En contrepartie, la linéarité de la réponse de ces détecteurs est limitée à un maximum de 600 nM (66 μg L-1 ou ppb), ce qui laisse supposer qu’ils ne sont pas performants au-delà.

Le seul aspect peu convaincant de cette étude porte sur le test de sélectivité/compétitivité des détecteurs. Certes leur sensibilité est plus élevée pour les Cd2+ que pour tous les autres cations métalliques testés, à concentration égale. Bien que cette étude montre qu’à des concentrations de 0,5 μM le calcium et le magnésium ne réagissent pas, on peut néanmoins se demander ce qu’il en sera dans des matrices un peu plus chargées en ces cations majeurs (Ca2+ et Mg2+). Sans aller jusqu’à des eaux naturelles, il faut noter que les normes de potabilités définissent en France une eau « moyennement dure » comme contenant entre 1,5 et 2,5 mM de Ca2+, ce qui n’est pas rare pour l’eau du robinet et qui est néanmoins 3000 à 5000 fois plus que les concentrations testées ici.

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Test immunologique à base de quantum dots ZnO dopés au Cd pour la mesure quantitative du bisphénol A-Zhang J, Zhao S-Q, Zhang K, Zhou J Q, Cd-doped ZnO quantum dots- based immunoassay for the quantitative determination of bisphenol A., Chemosphere 2014;95,105-110.

Le bisphénol A (BPA) a été largement utilisé depuis plusieurs années dans de nombreux produits de consommation courante. Or, c’est un perturbateur endocrinien dont les effets affectent le développement du placenta, pouvant générer des naissances prématurées ou des avortements. En dépit des récentes interdictions d’utilisation (cf. introduction), son ubiquité dans notre environnement va perdurer de nombreuses années. Le BPA2 est aujourd’hui détecté dans des échantillons naturels, eaux de rivière ou même eaux de consommation humaine. En ce sens, il est nécessaire de disposer de techniques analytiques adaptées pour le doser. Dans leur étude, Zhang et coll. proposent d’utiliser les propriétés de photoluminescence de QDs1 marquées avec des anticorps du BPA2 pour mesurer les concentrations en BPA2 dans l’eau. Plus spécifiquement, c’est la diminution de la fluorescence des QDs1 ainsi marqués, qui est mesurée lorsque la concentration en BPA2 augmente. Bien que technologiquement novateur, ce test n’est ici validé que dans une faible gamme de concentrations allant de 20 à 330 ng mL-1 (soit 20 à 330 ppm) et une LOD6 de 13 ng mL-1. Or, la PNEC7 du BPA2 dans l’eau douce est de 1,6 ng mL-1, soit 10 fois moins (aucune norme n’a été définie à ce jour pour le BPA2). En conséquence, les techniques dites « classiques » telles que la spectrométrie de masse couplée aux chromatographies en phases gazeuses ou liquides, restent aujourd’hui plus performantes. Le test de détection et de quantification du BPA2 développé ici reste cependant prometteur, car il est facile d’utilisation et notamment sur le terrain moyennant quelques évolutions.

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Exposition alimentaire de poisson estuarien aux quantum dots de CdSe/ZnS : biodisponibilité, réponses au stress oxydant, reproduction et transfert maternel-Blickley T M, Matson C W, Vreeland W N, Rittschof D, Di Giulio R T, McClellan-Green P D, Dietary CdSe/ZnS quantum dot exposure in estuarine fish: Bioavailability, oxidative stress responses, reproduction, and maternal transfer. Aquatic Toxicology 2014;148:27- 39.

Dans cette étude, Blickley et coll. soulèvent la question de l’effet des quantum dots sur les organismes vivants. Les études portant sur leur toxicité in vitro ont montré des effets cytotoxiques, de génération de ROS ou encore d’altération de l’ADN (7, 8), mais peu d’études d’exposition in vivo à des nanoparticules telles que les QDs ont à ce jour été réalisées. En revanche, les effets toxiques du cadmium ont été largement documentés, y compris chez les poissons (9).

La comparaison entre toxicité induite par le cadmium sous forme soluble (CdCl2) et les QDs de CdSe/ZnS revêt donc un intérêt tout particulier. Un résultat important de cette étude est la détection de Cd issu des QDs dans les organes des poissons, ce qui révèle une biodisponibilité des QDs, même si elle est proportionnellement plus faible que pour le cadmium soluble. Les essais d’imagerie en microscopie réalisés sur les organes n’ayant pas révélé la présence de QDs, il est impossible pour les auteurs de préciser si le cadmium est toujours sous forme de QDs de CdSe/ZnS ou s’il est issu d’une dissolution partielle de ces derniers dans le milieu intestinal.

Il est regrettable de ne pas aller plus loin dans la compréhension des mécanismes. Par exemple, une solubilité partielle des QDs utilisées à 10 μg/jour expliquerait que l’accumulation de Cd soit 100 fois plus faible que pour du CdCl utilisé à 5,9 μg/jour. A l’inverse, la non dissolution des QDs révèlerait que ceux-ci traversent les parois épithéliales et sont assimilés tels quels. Ainsi, l’étude approfondie du comportement physico-chimique des QDs, tel que leur solubilité dans un milieu modèle de l’intestin des poissons, apporterait des réponses rapides.

Enfin, la mise en évidence d’un potentiel effet des QDs sur le genre des poissons et sur le taux de fécondité révèle peut-être que les QDs constituent un nouveau genre de perturbateurs endocriniens. Des études complémentaires sont indispensables pour répondre à cette dernière question.

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