"Changer d’air, c’est salutaire !"
Le 13 décembre dernier, le blog avait publié l’épisode de pollution de l'air de grande envergure qui a traversé la France entrainant des mesures de restriction (réduction de 20 km/h de la vitesse sur route, confinement des personnes fragiles, etc.)
Cette vague de pollution atmosphérique a une nouvelle fois révélé les défaillances des politiques de lutte. La France qui fait l’objet d'une procédure d'infraction déclenchée par Bruxelles pour le peu d’enclin à réduire des émissions de particules néfastes pour la santé. Un seuil de pollution qui excède plus de trente-cinq jours par an selon la réglementation européenne.
Pour parer à ces épisodes de pollution atmosphérique, le ministère de l’Ecologie a proposé d’élargir à l’ensemble des polluants réglementés, y compris les particules fines, le dispositif de circulation alternée.
Philippe MARTIN, ministre de l’Écologie, du Développement durable et de l’Énergie a présidé le 18 décembre dernier la troisième réunion du Comité interministériel de la qualité de l’air (CIQA), mis en place en septembre 2012 avec le ministre de l’Intérieur et le ministre délégué chargé des Transports, de la Mer et de la Pêche.
« Nous devons réduire le fléau de la pollution de l’air. C’est un problème environnemental, c’est un enjeu de santé publique, avec plusieurs dizaines de milliers de décès prématurés chaque année, c’est aussi un coût économique pour la collectivité nationale, que l’on peut évaluer à 20 à 30 milliards d’euros par an, dont un milliard d’euros directement supportés par le système de soins » a déclaré Philippe MARTIN en ouvrant le CIQA.
Pour répondre aux situations d’urgence comme l’épisode de pollution qu’ont connu 76 départements ce mois-ci, Philippe MARTIN a proposé d’élargir à l’ensemble des polluants réglementés le dispositif de circulation alternée afin qu’au-delà de la pollution à l’ozone, celui-ci puisse être déclenché lors des pics de pollution aux particules fines.
La circulation alternée fait partie des mesures d’urgence pouvant être prises dans les situations de dépassement du seuil d’alerte pour limiter l’ampleur des pointes de pollutions selon le principe suivant: les véhicules dont le numéro d'immatriculation est pair (respectivement impair) ne peuvent circuler que les jours pairs (respectivement impair).
Philippe MARTIN a proposé l’organisation, dès janvier 2014, d’une table ronde avec les collectivités locales et les Autorités organisatrices de transport afin d’étudier les modalités de mise en œuvre de cette mesure.
Retour d’expérience sur la mise en place du dispositif de circulation alternée en région parisienne le 1er octobre 1997
NB : les évolutions règlementaires qui ont eu lieu depuis 1997 nécessitent aujourd’hui de préciser les conditions de déclenchement d’une telle mesure, en concertation avec les collectivités locales.
Le 1er octobre 1997, pour la première fois en France, la mesure de circulation alternée était appliquée à Paris et dans 21 communes limitrophes suite au dépassement du seuil d’alerte du dioxyde d’azote. Un dispositif de contrôle avait été mis en place au niveau des portes autour de Paris (environ 900 agents de police).
Le retour d’expériences montre :
- une baisse de trafic par zone :
- 15% sur la zone concernée par la mesure de circulation alternée,
- 20 % sur Paris et Boulevard Périphérique et
- 8 % sur le reste de l'Ile-de-France ;
- une baisse des émissions globales de dioxyde d’azote sur l'Ile-de-France de 15 % par rapport au 30 septembre 1997. Cette baisse résultait pour partie de la diminution des émissions associées au trafic (-22 %) ;
- un impact particulièrement net de la circulation alternée sur les émissions aux périodes de pointe.
Le CIQA a ensuite fait le bilan du Plan d’urgence adopté le 6 février 2013. Moins d’un an après son adoption par le CIQA, 19 des 38 mesures de ce Plan sont achevées ou en voie de l’être, et 13 sont bien engagées. Plusieurs mesures ont été présentées et discutées par le CIQA :
- L’identification des véhicules en fonction de leur impact sur la qualité de l’air
La mission lancée en mars 2013 par le ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie, le ministère de l’Intérieur, le ministère du Redressement productif et le ministère délégué en charge des Transports a remis son rapport sur la mise en place d’un dispositif permettant d’identifier l’impact de chaque véhicule sur la qualité de l’air. La mission propose d’abord de distinguer 3 catégories de véhicules selon leur date de mise sur le marché. Elle recommande ensuite une approche graduelle d’identification reposant dans un premier temps sur des vignettes de couleurs. Ce dispositif pourrait par la suite être systématisé par l’utilisation de moyens technologiques.
La mission pour étudier la mise en place d’un dispositif d’identification des véhicules pour la qualité de l’air.
La mission est revenue sur l’expérience de plusieurs pays européens : l’Allemagne, l’Italie, la Grande- Bretagne ou les pays scandinaves ont d’ores et déjà mis en place de tels dispositifs. Elle a examiné les 5 catégories - 1* à 5* - définies par l’arrêté du 3 mai 2012 qui classe les véhicules en fonction de leur niveau d’émission de polluants atmosphériques.
Elle propose de les répartir en trois groupes :
_ 1* et 2* (20,5 % du parc), les plus émetteurs
_ 3* (17,3 % du parc)
_ 4*et 5*(62,2%duparc)
Après avoir étudié l’ensemble des technologies disponibles sur le marché (vignettes de couleurs, lecture automatique de plaques d’immatriculation, dispositifs communicants et systèmes embarqués), la mission a ensuite évalué leurs avantages et inconvénients respectifs.
La mission recommande en définitive une approche pragmatique et graduelle avec :
_ un plan national rapide reposant sur des vignettes de trois couleurs. Cette approche permet de démarrer très vite et est la plus simple à mettre en œuvre. Elle propose d’utiliser les vignettes d’assurance pour matérialiser ces vignettes dans une optique de lisibilité, d’efficacité et d’économie.
_ une démarche plus systématique utilisant des moyens technologiques performants pour préparer l’avenir, pour les collectivités locales qui seront volontaires pour les mettre en œuvre. Elle repose sur des balises actives RFI (radio frequency-identification ou radio identification) communicant avec le protocole DSRC (dedicated short range communication ou communications dédiées à courte portée). Ceci permet une transition en douceur vers le concept de « villes intelligentes » dont une des préoccupations majeures sera la qualité de l’air.
La mission souligne que le succès de la démarche reposera beaucoup sur la qualité de la communication autour du dispositif, sur les mesures d’accompagnement prévues, ainsi que sur la nécessaire adaptation des modes de transport alternatifs aux véhicules routiers.
La réflexion sur les conditions techniques, économiques et juridiques de la mise en œuvre d’une solution d’identification sera poursuivie dans les prochains mois.
La réflexion sur les conditions techniques, économiques et juridiques de la mise en œuvre d’une solution d’identification sera poursuivie dans les prochains mois.
- La charte de logistique propre en ville
Le cadre national de la logistique propre en ville manifeste une volonté partagée de développer les modes alternatifs et les véhicules moins polluants pour le transport et la livraison de marchandises en zone urbaine. Elle s'appuie sur de bonnes pratiques et des améliorations concrètes. Les signataires s’engageront à promouvoir, chacune dans son domaine respectif de responsabilité, des solutions vertueuses pour les livraisons urbaines, telles que l'utilisation de véhicules plus propres, la mise en cohérence des réglementations à l’échelle de l’agglomération, ou encore l’utilisation raisonnée d’espaces dédiés sur la voirie publique. Pour s'adapter aux spécificités de chaque collectivité, des chartes déclinant le cadre national seront conclues localement.
- Indemnité kilométrique vélo
La coordination interministérielle pour le développement de l’usage du vélo a mené, en concertation avec les partenaires sociaux, une étude des impacts que pourrait avoir le versement d’une indemnité kilométrique versée par les entreprises à leurs employés pour les trajets domicile/travail.
Enfin le CIQA a salué la baisse de la limitation de vitesse de 80 à 70km/h sur le boulevard périphérique parisien. Actuellement à l’examen du Conseil d’Etat, cette mesure sera ensuite signée par le Premier ministre pour une entrée en vigueur au 10 janvier 2014. Elle est prévue par le plan de protection de l’atmosphère d’Ile-de-France qui se fixe pour objectifs la réduction des émissions d’oxydes d’azote (NOx) de 38 % et de particules PM10 de 30 % par rapport à l’année 2008.