Loi montagne, une politique d’urbanisme à refonder
A la demande des services de la Direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature (DGALN), le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) a inscrit dans son programme de travail un audit sur l'application par les services territoriaux, régionaux et départementaux de l'État des dispositions d'urbanisme de la loi n°85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.
Une mission d'audit a interrogé les services concernés [9 directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL) 46 directions départementales des territoires (DDT)] sur la base d'un questionnaire exhaustif. Avec l'appui de membres des missions d'inspection générale territoriale (MIGT), elle a visité 14 départements et 6 régions représentatifs de l’ensemble des massifs pour préciser les réponses au questionnaire.
La mission a interrogé ponctuellement des élus municipaux lors de visites particulières. Elle s’est entretenue par ailleurs avec les représentants de l'Association nationale des élus de montagne (ANEM) qui ont fait état de la perception récurrente des élus d'une application trop rigoureuse des textes par les représentants locaux de l'État. Elle a rencontré également des préfets de massif, des préfets de région et de département, les commissaires de massif et les services de la direction de l’aménagement de la DATAR, ainsi que des représentants d'associations de protection de l'environnement.
La mission a analysé les dispositions de la loi et les données économiques, environnementales et institutionnelles qui ont largement évolué depuis 1985 et qui éclairent les pratiques actuelles dans l'application de la loi.
A partir de ces témoignages et de ses propres analyses, elle a relevé plusieurs difficultés et incompréhensions qui nécessitent le renouvellement des instructions adressées aux services, sans que soient revues les dispositions de la loi généralement appréciées des acteurs qui interviennent en montagne. Les remarques et par suite les recommandations de la mission d'audit concernent en premier lieu la définition de la zone de montagne où les dispositions d'urbanisme s'appliquent. Plusieurs définitions de zones géographiques où s'appliquent d'autres dispositions sont intervenues postérieurement à la loi de 1985 et créent des confusions parmi les partenaires de l'État et parfois pour les services eux-mêmes.
Du fait de la réorganisation relativement récente des services régionaux et départementaux de l'État, il est encore nécessaire d'améliorer leurs échanges, de mutualiser les connaissances et les compétences. La mission appelle l'attention sur le besoin de définir les relations de ces services avec les commissariats de massif qui assurent, quant à eux, sous l'autorité des préfets de massif, l'instruction des dossiers d'autorisation d'unités touristiques nouvelles (UTN)
Parmi les dispositions d'urbanisme, les notions de « continuité » et de « hameaux nouveaux » introduites par la loi en 1985 donnent lieu à des interprétations et à des jurisprudences qui ne sont pas toujours convergentes. Si la mission d'audit relève des caractéristiques différentes des territoires selon les massifs ainsi que des formes variables des habitats traditionnels, elle note la nécessité de préciser le cadre d'application des textes spécifiques à la montagne par rapport aux règles qui s'appliquent à l'ensemble du territoire.
Face à des situations très différentes de développement touristique, la mission a relevé que le dispositif UTN, d'autorisation des opérations touristiques, reste pertinent dans certains cas mais s'applique aussi à des dossiers qui n'ont pas été prévus par les textes et qui ne présentent pas d'enjeux justifiant de son point de vue une procédure différente du droit commun.
La mission constate que, pour de nombreux sites touristiques, en particulier ceux qui sont destinés aux sports d'hiver, la situation économique nécessite aujourd'hui qu'ils soient réhabilités pour accueillir d'autres pratiques touristiques mais que face à des acteurs privés défaillants, les collectivités sont démunies pour traiter ces cas. Les textes pris en application de la loi montagne, conçus dans une période plus faste de développement, ne permettent pas d'accompagner les efforts nécessaires et la mission recommande que des réflexions soient engagées pour mieux prendre en compte et traiter ces situations.
Enfin la mission note l'absence de données statistiques harmonisées et coordonnées sur l'aménagement en montagne et l'application des dispositions d'urbanisme : elle recommande qu'elles soient organisées pour permettre de mieux analyser les problématiques générales et situer les dossiers particuliers.
Liste hiérarchisée des recommandations
Les recommandations de la mission rappelées ci-dessus, ne peuvent être reprises suivant leur importance mais la mission a retenu de les classer suivant deux niveaux :
-1 Des recommandations concernant l'application des dispositions d'urbanisme, l'organisation des rôles respectifs des services dans les procédures et les relations de ces services entre les niveaux du massif, de la région et du département doivent donner lieu à l'envoi d’une instruction ministérielle aux préfets.
-2 Certaines recommandations nécessitent des analyses et des études complémentaires, puis des dispositions législatives ou réglementaires pour aboutir.
Recommandations de niveau 1 : celles devant figurer dans une instruction adressée aux préfets de région et de département, à l'attention des services
* Rappeler quel est le zonage de montagne correspondant aux règles d'urbanisme et en organiser la communication auprès de tous les partenaires, pour leur permettre de comprendre la distinction avec les classements montagne pour les dotations aux communes, au titre de l'agriculture et des territoires de massif.
* Mettre en place, au niveau central, un pilotage de la politique d'urbanisme en montagne ; au niveau des massifs et des régions, une organisation en réseau ; et pour tous, l'échange des données sur un site dédié afin d’assurer la cohérence des positions de l’État.
* Rappeler aux services dans l'instruction la doctrine pour l'application des règles d'urbanisme : pour l'extension de l'urbanisation, le principe de continuité, la définition des hameaux nouveaux, la gestion des dérogations. En outre, demander la constitution dans les massifs, les départements, les vallées, d'un recueil des bonnes pratiques adaptées au contexte naturel et paysager et au bâti traditionnel.
* Contrôler la mise en conformité par les communes et leurs groupements de leurs documents d'urbanisme avec la loi montagne.
* Faire rappeler par les représentants de l'État dans les conseils d’administration des CAUE, ou lors de la négociation des chartes des PNR, la nécessaire prise en compte des enjeux de qualité architecturale et paysagère pour que ces organismes concourent encore davantage auprès des élus et des particuliers à leur prise en compte.
* Préciser les modalités d'application des règles en bordure des lacs et plans d'eau. En particulier inciter les services à les inventorier et fixer la surface minimale des plans d'eau à prendre en compte.
* Modifier l’article R.121.14 du code de l’urbanisme pour inscrire l'obligation d'évaluation environnementale des dossiers d'UTN (décret n°2012-995 du 23 août 2012) et assurer la communication de cette obligation.
* Rappeler aux services qu’ils doivent communiquer aux collectivités toutes les informations dont ils disposent sur les risques naturels. Développer et maintenir la compétence technique nécessaire pour la mise en œuvre de la politique de prévention des risques, même en l'absence d'une équipe départementale du RTM.
* Demander aux services de produire des analyses générales, leur en donner les moyens et veiller à ce que soit organisée la mutualisation au sein des services et entre eux afin d’asseoir les positions de l'État et éclairer les démarches communales.
* Expliciter le volet que les SCoT doivent contenir s'agissant des projets touristiques valant UTN, préciser l'objet de leur examen par les commissions spécialisées. Préciser également la nature de l'avis à rendre par les comités de massif sur la création de réserves naturelles et les classements de sites. Ne plus solliciter l’avis des commissions spécialisées sur la nécessité de réaliser une étude d'impact suivant le cas par cas.
Recommandations de niveau 2 : des chantiers à lancer pour :
* Proposer de nouveaux critères de définition de la zone montagne, pour assurer une plus grande cohérence du classement et faciliter la compréhension des politiques spécifiques.
* Lancer une démarche d'analyse des compétences spécifiques nécessaires aux services intervenant en montagne. Mettre en place des formations initiales et continues et gérer les mobilités en prenant en compte ces compétences.
* Proposer l'adaptation de la procédure des unités touristiques nouvelles au contexte économique actuel et aux situations particulières des massifs en liaison avec tous les partenaires de l'État. Revoir et simplifier la procédure en prenant en compte l'ensemble des autres procédures obligatoires.
* Modifier l’article R.121.14 du code de l’urbanisme pour inscrire l'obligation d'évaluation environnementale des dossiers d'UTN (décret n°2012-995 du 23 août 2012) et assurer la communication de cette obligation.
* Rappeler aux services la nécessité de motiver les actes en visant explicitement la loi montagne et diffuser un recueil des jurisprudences à tous les services, le mettre sur un site internet.
* Élaborer et diffuser une politique de l'État pour le réaménagement des sites touristiques suivant les principes du développement durable. Recenser les bonnes pratiques et soutenir les collectivités territoriales qui engagent des processus opérationnels de réhabilitation des sites touristiques en difficulté.
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