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Des défaillances majeures dans le suivi financier du projet pour le rétablissement du caractère maritime du Mont Saint-Michel

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Des défaillances majeures dans le suivi financier du projet pour le rétablissement du caractère maritime du Mont Saint-Michel

Des défaillances majeures dans le suivi financier du projet pour le rétablissement du caractère maritime du Mont Saint-Michel

Missionné par le ministère de l’égalité des territoires et du logement ainsi que le ministère de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, le ministère de la culture et de la communication et le ministère délégué au budget, en février 2013, le Conseil général de l’environnement et du développement durable, à l’Inspection générale de l’administration, à l’Inspection générale des affaires culturelles et à l’Inspection générale des finances ont mené une mission d’appui aux services de l’État ainsi qu’au syndicat mixte chargés du projet de rétablissement du caractère maritime du Mont Saint-Michel.

Ses premiers travaux ont conduit la mission interministérielle à établir sept constats généraux :

• le projet de rétablissement du caractère maritime du Mont Saint-Michel (projet RCM) est unanimement considéré comme une belle réussite technique, avant même son achèvement qui n’interviendra qu’en 2015 1 ;

• le projet RCM se caractérise par un nombre élevé de parties prenantes dont la coordination s’avère particulièrement laborieuse : la collaboration des différents acteurs s’effectue dans un contexte de tension et de défiance mutuelle qui ne contribuent pas à faciliter l’avancement du projet ;

• l’État n’est jusqu’à maintenant pas parvenu à trouver un mode de coordination de ses propres services et un mode de coopération avec les collectivités locales qui lui permettent de peser sur les décisions stratégiques du projet à hauteur de la contribution financière qui est la sienne, en particulier sur les arbitrages relatifs au système d’accueil des visiteurs ;

• alors même qu’il a pour objectif de protéger et de mettre en valeur un site naturel exceptionnel (la baie) au centre duquel se trouve le Mont Saint-Michel, le projet RCM est resté essentiellement un projet technique porté par des ingénieurs et n’a été accompagné d’aucune stratégie de mise en valeur touristique et culturelle du Mont Saint-Michel ;

• le fonctionnement du site en général et le dispositif d’accueil des visiteurs en particulier ne visent pas à assurer la satisfaction des visiteurs mais sont au contraire définis en fonction des contraintes et des objectifs propres aux différentes parties prenantes du site ;

• l’ensemble des dysfonctionnements du dispositif d’accueil des visiteurs (parc de stationnement et système de transport jusqu’au Mont) relevés par la mission l’amène à douter qu’une véritable expertise technique, touristique et financière ait été mobilisée au cours des travaux préparatoires à la mise en place de la délégation de service public ;

• la mission s’interroge sur le caractère judicieux des offres commerciales faites en 2009 par l’entreprise délégataire, qui a ainsi proposé un dispositif dont la réussite technique et l’équilibre économique reposaient sur des compétences et sur une expertise qu’elle ne possédait pas en interne (en particulier l’exploitation à grande échelle de navettes hippomobiles).

Conformément à la lettre de mission, la mission interministérielle s’est attachée dans ce premier rapport à :

• préciser les conditions de bouclage financier du projet RCM ;

• préciser les conditions pour que la délégation de service public relative au parc de stationnement et au système de transport des visiteurs reste à l’équilibre ;

• proposer les améliorations à engager par le syndicat mixte pour se mettre en conformité avec les règles de la comptabilité publique, suite au rapport de la chambre régionale des comptes.

Dans un second rapport, la mission fera des propositions concernant l’organisation générale du site du Mont Saint-Michel après l’achèvement du projet RCM.

Tout d’abord, la mission a identifié des défaillances majeures dans le suivi financier du projet RCM et conclut que le syndicat mixte ne maîtrise pas réellement la dimension financière du projet. Toutefois, le point d’étape financier établi par la mission indique que le projet RCM doit pouvoir être achevé dans le respect de l’enveloppe financière actuelle (184,74 millions d’euros courants). Par ailleurs, les charges de fonctionnement du syndicat mixte pour la période postérieure à l’achèvement du projet RCM peuvent être estimées en première analyse à 4,3 millions d’euros courants par an. Ces conclusions doivent néanmoins être fiabilisées par un travail technico-financier visant à identifier et évaluer les aléas possibles.

Ensuite, la mission considère que ces défaillances du suivi financier du projet RCM sont la cause essentielle des dysfonctionnements de la gestion comptable et financière du syndicat mixte que la chambre régionale des comptes a mis en évidence dans un rapport récent. Cette situation appelle des changements immédiats dans le fonctionnement du syndicat mixte : clarification des responsabilités, mise en place de procédures de reporting, renforcement de la fonction comptable et financière du syndicat mixte.

Outre cette amélioration du suivi financier du projet RCM, la mission formule des recommandations visant à mettre la gestion comptable et budgétaire du syndicat mixte en conformité avec les règles de la comptabilité publique :

• le syndicat mixte doit mettre en place au plus vite une comptabilité d’engagement pluriannuelle, avec l’appui méthodologique de la direction régionale des finances publiques ;

• la structure du financement du projetRCM doit être précisée par une clarification de la maquette financière de référence, de façon à permettre l’élaboration d’un plan d’amortissement ;

• le syndicat mixte doit proposer une évaluation précise de ses charges de fonctionnement pour la période postérieure à l’achèvement du projet RCM avant l’été 2014.

Enfin, la mission a analysé la délégation de service public décidée en 2006, conclue en 2009 et mise en œuvre en 2012 portant sur la construction et la gestion du parking ainsi que sur l’exploitation du système de transport. A l’usage, il s’avère que le recours à une DSP n’est sans doute pas le dispositif juridique le plus souple pour un projet nécessitant des ajustements réguliers d’organisation. Au processus initial de consultation qui n’était pas exempt de défauts s’est ajoutée une série d’avenants qui ont fragilisé par leur ampleur cumulée la solidité du cadre contractuel de la DSP. Le suivi insuffisant exercé par l’autorité concédante comme les difficultés majeures rencontrées par le délégataire ont provoqué des retards et des dysfonctionnements significatifs.

Le dispositif actuel présente deux fragilités qui conduisent la mission à s’interroger sur sa viabilité :

• sur le plan juridique : il fait peu de doute que l’avenant n°5 bouleverse l’économie générale du contrat dans un sens très favorable au délégataire, ce qui pose dès lors la question de sa légalité ; sans préjuger de la décision du juge administratif, la probabilité que la procédure lancée contre l’avenant n° 5 aboutisse à son annulation est élevée, ce qui fait peser un risque juridique majeur sur l’ensemble du dispositif ;

• sur le plan financier : l’incapacité du délégataire à mettre en service des navettes hippomobiles conformes au contrat initial induit une perte de recettes considérable et permanente qui déséquilibre l’économie générale de la concession ; dans le dispositif actuel, seul un hypothétique redressement de la fréquentation du site permettrait au délégataire de parvenir à un équilibre financier pour la durée restante de la concession.

Dans l’immédiat, la mission recommande aux deux parties :

• d’engager conjointement une stratégie commerciale répondant prioritairement aux attentes de la clientèle touristique,

• d’améliorer la grille tarifaire en tenant compte de l’étude produite pour le compte du syndicat mixte et des recommandations émises par les diverses consultations organisées par celui-ci,

• de ne pas considérer que la question du matériel de transport est réglée par les solutions actuelles mais de porter réellement la capacité de transport au niveau fixé par le contrat,

• de mettre en place une adaptation saisonnière aux contraintes des salariés du dispositif actuel des navettes montoises et d’explorer toutes les solutions techniques à même de répondre à leurs préoccupations.

La mission recommande au syndicat mixte :

• de clarifier rapidement la répartition des responsabilités entre lui-même et le conseil régional de Basse-Normandie en matière de suivi du contrat de DSP,

• d’engager un audit des comptes de l’exploitant pour disposer d’un état fiable de la situation financière de la DSP,

• d’initier une réflexion sur les conditions dans lesquelles il serait possible de mettre de fin à la délégation de service public sous sa forme actuelle.

©ZVIEW

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