L'érosion et la sédimentation pourraient déclencher des séismes superficiels
Outre la perte de territoires côtiers, environ un quart des côtes françaises métropolitaines recule, alors que seulement un dixième gagne des terres en mer par sédimentation, dans un communiqué publié le 21 novembre dernier, le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) indique que les processus de surface, c'est-à-dire l'érosion et la sédimentation, pourraient déclencher des séismes superficiels (inférieurs à cinq kilomètres de profondeur) et favoriser la propagation de grands séismes profonds jusqu'à la surface. C'est ce que viennent de démontrer des chercheurs des laboratoires de Géosciences Rennes (CNRS/Université de Rennes 1), de Géosciences Montpellier (CNRS/Université de Montpellier 2) et de l'Institut de physique du globe de Paris (CNRS/IPGP/Université Paris Diderot) en collaboration avec un scientifique taiwanais. Alors que la tectonique des plaques était généralement considérée comme le seul mécanisme capable d'influencer durablement l'activité des failles, les processus de surface augmenteraient aussi les contraintes que subissent les failles actives, comme celles situées à Taïwan, une des zones les plus sismiques au monde. Ces travaux sont publiés dans Nature Communications le 21 novembre 2014.
Au cours des dernières décennies, de nombreux travaux se sont intéressés à l'évolution des paysages des chaînes de montagne aux échelles de temps géologiques (1 à 100 millions d'années). Objectif : mieux comprendre la dynamique et les relations entre les processus d'érosion, de sédimentation ou de déformation tectonique. Des travaux récents ont démontré que la surface de la Terre pouvait changer très fortement en seulement quelques jours, mois ou années, par exemple lors d'évènements extrêmes comme les typhons ou les séismes de fortes magnitudes. Ces évènements génèrent de nombreux glissements de terrain et un transport sédimentaire accru dans les rivières, comme ce fut le cas en 2009 lors du passage à Taïwan du typhon Morakot qui a entrainé une érosion brutale des paysages. Ces changements rapides de la forme de la surface de la Terre modifient l'équilibre des forces en profondeur à l'emplacement des failles actives.
À Taïwan, où les taux d'érosion et de déformation sont parmi les plus élevés au monde, les chercheurs ont mis en évidence que les taux d'érosion de l'ordre de 0,1 à 20 millimètres annuels peuvent induire une augmentation, de l'ordre de 0,1 à 10 bar, des contraintes subies par les failles situées à proximité. Ces forces sont probablement suffisantes pour déclencher des séismes superficiels (jusqu'à cinq kilomètres de profondeur) ou pour favoriser la propagation des séismes profonds, d'autant plus si elles sont amplifiées par des évènements extrêmes d'érosion lors des typhons et des séismes de fortes magnitudes. Les chercheurs ont ainsi démontré que la tectonique des plaques n'est pas le seul mécanisme capable d'influencer durablement l'activité des failles sismiques et que les processus de surface, tels que l'érosion ou la sédimentation, peuvent imposer suffisamment de contraintes aux failles actives pour provoquer des séismes superficiels.
Grâce à une analyse des relations entre processus de surface et déformation active de la Terre en temps quasi-réel, cette étude offre de nouvelles perspectives pour la compréhension des mécanismes déclencheurs des séismes.
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