Retour sur 21 visions de la ‘’Ville ADAPTABLE’’ à travers 7 sites : Part.1
Le blog, ayant présenté succinctement les lauréats de la 12ème session d’EUROPAN, a donc souhaité scruter cette semaine, 1 article par jour qui détaille ces 21 visions prospectives, à travers les sept sites français.
Huit éditos sur ses regards croisés, le premier se porte sur le thème ‘’La Ville Adaptable’’.
Le thème de la ‘’Ville adaptable’’ correspond aux réflexions de notre société en perpétuel mouvement. Les questionnements sociétaux à l’échelle d’un territoire ramènent d’une manière plus singulière à réfléchir sur nos modes de vies, nos usages, nos quotidiens à travers les rythmes et respirations de la ville.
La ville est, par nature, un lieu de maximisation des interactions mais c’est aussi un lieu de séparation. Une ville attractive qui se développe et où l’on se sent bien est un territoire organisé où les individus se rencontrent et échangent. La question de l’intensité urbaine et de la rencontre est essentielle. Une ville n’est pas une ville si on ne peut pas s’asseoir, boire et uriner gratuitement dans la journée, mais aussi la nuit ou le week-end.
Le temps était une dimension encore très peu abordée en matière d’aménagement et d’urbanisme. On pense les villes, on les organise, on les aménage comme si elles ne fonctionnaient que 16h/24h et seulement la semaine. Jusqu’à présent, on a agencé l’espace pour gagner du temps – je pense à nos TGV en France, aux autres trains à grande vitesse en Europe et ailleurs –, mais on a rarement agencé le temps pour gagner de l’espace. Tout le monde s’interroge sur la manière dont on peut construire la ville sur la ville, mais en fait la ville poursuit son extension sur l’espace.
Nos modes de vie ont changé mais la fabrique de la ville, la matérialité, ne s’est pas toujours adaptée aux nouveaux modes de vie quotidiens, ou aux nouveaux cycles de vie comme, par exemple, l’allongement de la durée de vie. On constate qu’il y a également une utilisation quasi mono-fonctionnelle des bâtiments (ce n’est pas forcément le cas de celui dans lequel on se trouve), des quartiers mais aussi des espaces publics.
Le temps est une dimension essentielle comme clé de lecture des dysfonctionnements, comme levier en termes de développement durable. Le temps concerne tout le monde dans la vie quotidienne. Le temps répond à la demande des populations en Europe en termes de proximité, de participation. Le temps renvoie aussi à la dimension sensible de chacun pour laisser place à la création.
Pour changer de regard, voir la ville comme une pulsation – en journée elle attire, le soir elle expulse –, on doit avoir une approche systémique et multi-scolaire. Mais on doit penser la ville comme un système de flux et non pas comme un système de stocks : il y a des gens et des choses qui rentrent, il y a des gens et des choses qui sortent. Il faut aussi penser à une ville en mouvement plus qu’à un espace figé, et aussi qu’il s’agit d’une entité à trois dimensions et non d’un plan.
La ville est aussi un espace qui n’est pas seulement utilisé par les résidents. Elle est aussi faite pour des utilisateurs temporaires : les travailleurs, les visiteurs, les usagers.
Celles et ceux qui passent leur temps éveillés dans votre ville, jamais on ne leur demande leur avis lorsque l’on organise un espace. Le banc, qu’est-ce qu’on en fait ? Est-ce qu’on l’installe ? Et où ? Et ensuite pour qui l’installe-t-on ? Pour les personnes âgées, pour les jeunes, pour les clochards... ? Pour qui installe-t-on le banc ? Pour ceux qui votent là ou pour ceux qui votent ailleurs ?
Les caractéristiques du temps urbain : étalement, éclatement, urgence :
À partir du moment où l’on a changé de regard sur les temporalités urbaines, on doit analyser leurs caractéristiques nouvelles : l’étalement, l’éclatement et l’urgence.
L’étalement de la ville sur l’espace, c’est la ville diffuse. La ville s’étale en ignorant les frontières. Mais l’étalement, c’est aussi celui des activités sur le temps. L’économie a grignoté le temps de la sieste, le temps du repas, le temps du week-end, et le temps de la nuit. 18 % des salariés aujourd’hui en Europe travaillent la nuit. Le week-end est désormais un temps de travail, le samedi aussi et, de plus en plus, le dimanche. Le temps des repas a diminué de moitié en vingt ans. Pour les Anglais, c’est douze minutes le repas de midi en moyenne. En France, on est encore à quarante minutes mais ça a quand même diminué de moitié. On se couche 1 h 30 plus tard que nos parents. Donc, la figure actuelle, c’est la ville continue, 24 h/24 h et 7 j/7 j.
La ville a éclaté en espaces où l’on dort, où l’on travaille, où l’on s’amuse, en espaces où l’on s’approvisionne. La figure de cette ville composée de zones insulaires, c’est la ville archipel. Mais concomitant est l’éclatement des temps.
On a fonctionné pendant longtemps au rythme du soleil, puis au rythme des cloches, puis au rythme de la sirène de l’usine (8 h-12 h/14 h-18 h). Aujourd’hui, 53 % des salariés travaillent en horaires atypiques. Donc, une majorité de gens travaille en horaires décalés. On est passé des grands rythmes sociaux au temps pivot du téléphone portable. Et ça, c’est l’idée d’une ville à plusieurs temps : on n’est plus dans un seul, on est dans plusieurs temps.
La troisième caractéristique du temps urbain contemporain, c’est l’urgence et, avec les télécommunications, le temps réel qui implique une accélération généralisée, avec une synchronisation mondiale.
Les mobilités s’étalent de la même façon : elles éclatent et deviennent de moins en moins régulières, de plus en plus périphériques et événementielles. Ce sont de plus en plus des mobilités de loisirs que l’on continue pourtant de regarder comme si c’était toujours du domicile/travail qui ne représente que 25 % des mobilités. Ces mobilités sont de moins en moins prévisibles et sont de dernière minute. Elles sont zigzagantes, donc travailler sur le temps, ça passe par des ajustements des systèmes de transport, mais ça veut dire aussi relocaliser les services près de l’habitat et relocaliser les services près des entreprises.
Par rapport à ces évolutions, l’individu devient de plus en plus mobile. Il est poly-topique : il a plusieurs lieux. Il est poly-actif : il a un portefeuille d’activités plus qu’un seul métier. Il est de plus en plus instable : en famille, au travail, dans sa localisation. Il est de plus en plus imprévisible, il devient de plus en plus un hybride alors que l’offre urbaine est toujours plus statique et rigide. Les conséquences de ces évolutions, c’est tout d’abord l’accroissement de la complexité : on est face à quelque chose qu’on a du mal à comprendre, qu’il faut penser en trois dimensions et y intégrer le temps : 30 % des Européens disent ne plus maîtriser le temps. C’est aussi une consommation accrue d’espaces : chaque fois que l’on produit une nouvelle fonction, on produit un nouvel objet célibataire en périphérie et, donc, on accroît la ville. C’est une désynchronisation et des difficultés à concilier la vie professionnelle et la vie familiale. Et puis, sans doute, des difficultés à se rencontrer au sens où l’on pouvait le dire avant.
Mais alors qu’existe-t-il comme réponses ? D’abord, il y a des réponses individuelles par rapport à l’accélération : la reprise en main de la maîtrise de son temps : si je veux, je peux arrêter. C’est l’explosion des loisirs lents, c’est le lâcher-prise d’un certain nombre de personnes, à un moment de la vie. Et puis, il y a aussi des réponses collectives à travers des courants militants comme le Slow Food ou la Città Slow, ces villes qui fonctionnent au ralenti. Mais c’est aussi la capacité que l’on a d’inventer, dans tous nos territoires, des fêtes : la fête des voisins pour faire quartier ; les vides grenier où l’on va acheter le cendrier de son voisin ; les nuits blanches : on a vu l’explosion de ces fêtes qui permettent en soirée de faire territoire et de faire ville, et ça marche !
La ville malléable comme réponse ?
Mais il y a des réponses aussi en termes de polyvalence des espaces, de rotation d’activités et d’hybridation. C’est la question de la ville malléable. Quelques exemples à différentes échelles : les quais de la Seine deviennent une plage pour l’été ; la place de la mairie devient une patinoire à Strasbourg ; une école accueille d’autres activités le soir ; un avion transporte des hommes la journée et du courrier la nuit ; un couloir de bus devient un parking la nuit ; un espace anxiogène devient un lieu de spectacle pour des artistes ; un espace vide dans le désert devient une ville le temps d’un événement, une rue devient un terrain de foot, mais aussi un bar devient un lieu de travail, un espace hybride ; une laverie devient une bibliothèque, une gare, un supermarché.
Donc, par rapport à ça, et au-delà de ces petites expériences que l’on peut constater dans les villes, l’objectif autour de la ville malléable c’est de pouvoir répondre à des contraintes en utilisant la clé des temps. Comment s’adapte-t-on à la diversité de la demande au long de la vie, de l’année et des jours ?
Comment limite-t-on la consommation d’espace et optimise-t-on les surfaces disponibles ? Comment réduit-on les coûts ? Et, enfin, comment gagne-t-on en intensité urbaine pour faire ville ?
La ville malléable c’est une cité qui se laisse façonner sans rompre. Ce n’est pas la ville 24h/24h, ce n’est pas la ville éclatée, mais c’est une cité qui est dans une logique d’intelligence collective et où on se laisse le droit d’expérimenter et de se tromper pour revenir en arrière. Une ville malléable, c’est la polyvalence et l’usage alterné de l’espace public et des bâtiments, donc à différentes échelles temporelles : de l’année à la journée, en passant par les saisons ; et à différentes échelles spatiales : de l’habitation à l’agglomération, en passant par le quartier et la rue. La ville malléable, c’est aussi des espaces publics polyvalents ; des bâtiments polyvalents ; un mobilier urbain qui soit adaptable, modulaire et convertible ; une signalétique en temps réel puisque la ville va changer d’affectation au cours du temps ; un nouveau design de la ville ; et, surtout, une co-conception à chaque étape.
Une ville malléable, c’est également de nouvelles règles pour de nouveaux usages : ce sont des règles de partage de l’espace collectif : c’est déjà difficile le partage d’un espace collectif dans la ville aujourd’hui, comment fait-on lorsque les activités tournent dans un même espace, dans un même bâtiment ? Donc, il faut des règles. Il faut établir des limites spatiales et temporelles de cet usage alterné : quand et où ça s’arrête ? Il faut une signalétique adaptée, une organisation de la gestion de calendriers d’usages, mais aussi des chartes d’usage de l’espace collectif afin d’éviter les conflits : on commence, à travers des chartes de la nuit, des codes de la rue, à penser ces questions-là.
Il faut aussi, bien évidemment, des outils de gestion et d’aménagement spatio-temporels de la ville : je me ferai l’avocat des agences des temps et des mobilités pour essayer de donner le bon tempo aux villes ; un schéma de cohérence temporel pour gérer les agendas, donc, des urbanistes du temps, ça doit bien pouvoir s’inventer ; et puis pour obliger les gens qui construisent ou travaillent sur un bâtiment ou un espace public à penser cette notion de temps, il faudrait qu’on intègre un principe de « haute qualité temporelle ». Puisqu’on veut être dans quelque chose de souple et d’adaptable, il faut quand même que l’on affirme des principes pour éviter l’apparition de nouvelles inégalités liées à la souplesse et à la flexibilité : la notion de droit à la ville, la notion de participation et la notion d’égalité urbaine dans l’espace et dans le temps.
On sera obligé d’inventer de nouveaux concepts, un nouveau vocabulaire : « les usagers temporaires », « les centralités temporaires », « l’architecture temporaire »... on sera peut-être aussi obligé de penser le citoyen comme un citoyen temporaire. La ville malléable entraîne une gouvernance adaptée aux rythmes. En conclusion, l’intérêt de la ville malléable, c’est la créativité, c’est échapper aux contraintes et aux limites en termes d’espace et d’énergie. C’est l’urbanité, c’est utiliser les technologies de l’information pour l’intelligence, ça permet de mobiliser les artistes pour fabriquer des espaces publics et une ville qui ressemble à quelque chose et où on a envie d’aller s’installer. Et, enfin, c’est certainement une nouvelle façon d’habiter. On parle d’habiter l’espace, mais on peut aussi parler d’habiter le temps.
Extrait de la thématique E12, Europan Europe Luc Gwiazdzinski, géographe urbaniste, Grenoble (FR)
ADAPTABILITÉ 1 - LES SITES
Cette session s’est distinguée par une diversité des participations du côté des villes. Ce que nous appelons « les villes » a été, dans deux cas, des agglomérations (Vichy Val d’Allier, Roissy Porte de France), dans deux autres cas, un établissement public (EPPS) et un groupement d’intérêt public (GIP Marseille Rénovation Urbaine) et, dans les autres cas, des villes. Notons également la participation de nombreux partenaires qui ont rejoint, pendant le concours, les représentants des sites : une université, des bailleurs, des membres de collectivités voisines pour les agglomérations, etc. Les descriptifs synthétiques des sites attestent de cette pluralité.
Et les habitants ? S’ils sont représentés par des élus, ils ne sont cependant pas directement partie prenante du concours. Ils demeurent les grands absents d’Europan qui, pourtant, rassemble largement, comme ils sont sans doute encore les grands absents des processus de transformations des territoires.
Comment bâtir un site pour Europan ? Il est intéressant de constater combien un thème fabrique un site et, de même, comment un site, avec le développement des problématiques spécifiques et contextuelles qu’il suppose, nourrit le thème. Il y a réversibilité et réciprocité thème/sites. Plusieurs personnes l’ont relevé. C’est déjà un travail d’exploration que de formuler pourquoi et comment un site et les enjeux qu’il représente, qu’il suscite, peut répondre ou s’inscrire dans le thème. C’est la partie la plus délicate et originale du dossier. La démarche vers Europan réveille une situation souvent en attente (pas prêts, trop d’incertitudes, peu à espérer d’un concours classique ou d’un appel d’offre) et provoque l’engagement dans une réflexion « extraordinaire ».
Répondre au sujet de l’adaptabilité et, dans le même temps, formuler des attentes sur un site représente à la fois un travail de fond et un marathon quant au timing dévolu au déroulement du concours : quelques semaines au cours desquelles, avec l’assistance d’un expert désigné par Europan, on réunit les acteurs de terrain, on suscite des débats. Les compromis et les prises de décisions rapides qui en découlent mettent tout le monde à égalité. On remet parfois les compteurs du devenir urbain à zéro. Les acteurs se projettent dans un futur, dans une réflexion à laquelle ils ne sont généralement pas conviés. Il ne s’agit pas de boucler un programme qui définisse une fois pour toutes l’avenir, mais d’engendrer des réponses qui interrogeront encore plus le comment faire, le quoi faire et avec qui.
Tout en faisant l’objet de cette construction in situ, les sites en France ont été regroupés, lors d’un atelier de travail réunissant experts et conseil scientifique, dans une classification européenne afin d’être envisagés sous un ciel commun.
« Plateformes urbaines dynamiques » Marseille et Saint-Herblain ont été comparés à Aalborg (DK), Bitterfeld-Wolfen (DE), Budapest (HU), Don Benito (ES), Gjilan (KO), Kristinhamn (SE), Schiedam (NL), Winttenberge (DE)
« La revitalisation d’espaces publics actuellement peu attrayants nécessite une réflexion à une échelle plus large que celle du site donné. Même s’ils sont parfois de petite taille, ces espaces sont des leviers stratégiques pour une dynamisation urbaine. Leur influence en termes d’identité et d’image dépasse souvent leurs limites physiques et appelle donc à une transformation plus importante du tissu existant. “Angles morts” n’ayant jamais eu une utilisation adéquate ou bien lieux dont la fonction initiale est aujourd’hui obsolète ou inadaptée aux besoins des habitants, ces sites peuvent servir de plateformes à une appropriation, de point de départ pour la mobilisation de la population locale ou d’un public plus large. L’aménagement ou réaménagement de ces zones peut être considéré de diverses manières : comme un rafraîchissement par des espaces multifonctionnels, avec des structures temporaires ou extensibles qui agissent comme des piqûres d’acupuncture ; comme un ballon d’essai ayant pour but de faire connaître un territoire donné, de déclencher un cofinancement ou investissement privé et d’identifier de nouveaux rythmes d’intensité. »
Fosses, Paris-Saclay et Vichy Val d’Allier ont été réunis avec Baerum (NO), Höganäs (SE), Kaufbeuren (DE), Kreuzlingen / Konstanz (CH / DE), Milano (IT) sous la terminologie
« Écorythmes »
« La ville contemporaine cherche à anticiper l’avenir et à se préparer aux changements imprévisibles qu’il porte en lui. Différentes stratégies sont actuellement développées pour construire les conditions d’une résilience créative, donc à savoir s’adapter à un environnement changeant. L’hypothèse des Écorythmes consiste à fonder le développement urbain sur une meilleure synergie entre les milieux naturels et urbains afin de rompre avec la logique d’opposition qui a conduit à un éloignement du citadin des réalités naturelles et à une dégradation progressive de celles-ci. Cet éloignement du citadin et de la nature n’est pas seulement spatial, il est aussi temporel. En effet, le paysage n’est pas un tableau figé, une belle image, mais un milieu vivant où règnent des cycles (saisons, jour et nuit, marées, variations climatiques, vies faunistique et floristique...), des forces de croissance, des mouvements rapides ou lents, des migrations et transhumances, etc. À l’inverse d’un urbanisme moderniste ayant privilégié une rupture entre les rythmes urbains et naturel, il s’agit, à travers les sites portant tous une dimension paysagère forte, d’encourager la mise en œuvre des processus opérationnels fondés sur le maintien, l’instauration ou la régénération de ces écorythmes. »
Rouen, avec Assen (NL), Donauwörth (DE), Kuopio (FI), Seraing (BE), Vila Viçosa (PT),
Wien - Karan (AT) s’est retrouvé dans la catégorie « Entre-temps »
« L’adaptabilité, c’est aussi donner aux procédés d’élaboration d’un projet la possibilité d’intégrer de façon créative l’incertitude, le manque de financement, le rôle inconnu de la compétition du site donné à l’avenir, ou même les transformations territoriales de longue durée qui l’affecteront. Comment, en effet, la“ période d’attente”, avant la mise en œuvre d’un projet, pourrait-elle être structurée de manière à faciliter des scénarios multiples, à impliquer de nombreux acteurs, à permettre enfin des transformations éventuelles de la vision initiale des aménagements urbains ? Dans un tel cas, l’adéquation et l’intelligence du projet pourraient être assurées par des procédés de toutes sortes façonnés en continu par la dynamique du contexte du territoire. En d’autres termes, il s’agirait de laisser le temps au projet d’évoluer de façon organique, de croître tel une plante enracinée dans le site même. »
« Territoires en réseau » a réuni le site de Paris avec Alamada - Porto Brandao (PT), Ås (NO), Barcelona (ES), Ciney (BE), Kalmar (SE), Mannheim (DE), München (DE), Venezia (IT)
« Il s’agit de sites qui, en raison de leur lien avec une entité plus grande, développent leurs potentialités urbaines. Cette entité peut être physiquement concrète, comme une infrastructure de transport, ou peut être un réseau virtuel de relations entre plusieurs nœuds urbains. Bien que les communautés qui habitent ou utilisent ces sites puissent être petites et apparemment isolées, la connexion avec le réseau leur ouvre des possibilités d’amélioration de leur vie urbaine par un nouveau mélange de différents programmes et une urbanité plus complexe. Comment peut-on préparer ces territoires à résister aux différents scénarios qui pourraient affecter les autres éléments du réseau ou le réseau lui-même ? Devraient-ils être organisés de façon à ce qu’ils puissent adopter différents rôles au sein du réseau ? Comment peuvent-ils s’adapter à la possibilité de changements importants du réseau, voire à sa disparition, par la définition de leurs propres caractéristiques urbaines et architecturales ? »
Cette classification, les différents éléments de description des sites ainsi que leurs enjeux constituent, pour les candidats, une matière complexe qui contribue à l’originalité du concours.
La plupart des projets urbains, très longs à murir, risquent de se révéler obsolètes dans un avenir proche. Il est rarement donné de pouvoir partir d’un sujet, d’un thème et d’avoir le temps de remettre en questionnement la ville. C’est ce que permet Europan : d’abord, d’une façon collective, non seulement nationale mais aussi européenne, voire internationale, grâce notamment à la mixité des équipes de candidats ; ensuite, d’une façon concrète, en offrant la possibilité d’un questionnement élargi et partagé, d’un nombre important de réponses grâce à l’aura du concours auprès des jeunes générations, mais aussi de la profession – architectes, urbanistes, paysagistes – et la participation, au côté d’un jury composé d’experts, aux différents débats qui rythment le déroulement de la session.
ADAPTABILITÉ 2 - LES CANDIDATS
Le règlement du concours s’est adapté, tout comme son objet, par l’ouverture du concours, pour les représentants des équipes, aux urbanistes et aux paysagistes – et non plus seulement aux architectes – et par l’incitation à créer des associations de disciplines variées. De fait, Erasmus poursuit son œuvre de liaison étroite entre les jeunes professionnels venus d’horizons différents qui se retrouvent également dans les agences européennes. C’est le cas, par exemple, du collectif Bluefoamit, mentionné à Rouen.
La prise de connaissance et l’exploration des sites déterminant le ou les choix finals constituent une phase importante dans le déroulé de la session. Les cinquante et un sites sont présentés de façon synthétique, le dossier complet étant ensuite remis lors de l’inscription définitive. Certains candidats s’organisent et partagent la lecture des dossiers en amont. Certains visitent de nombreux sites lors des rencontres organisées sur place. Ces dernières, en France, ont été particulièrement généreuses pour cette session, s’étant déroulées presque sous forme d’ateliers – avec des interventions d’élus ou des directions de services, de partenaires, des visites de sites, des exposés, des échanges de questions/réponses. Cet épisode comparatif correspond déjà largement à une acculturation des sujets et du paysage de l’adaptabilité.
Par ailleurs, deux séries de conférences ont ponctué la saison, l’une à Nantes, à l’École nationale supérieure d’architecture, et l’autre, à la Cité de l’architecture et du patrimoine pour le lancement du concours. Nantes a été l’occasion d’une prise de parole croisée autour de l’adaptabilité sous plusieurs formes : du devenir de « territoires obsolètes » de Mathis Güller, de la « réinvention des villes dans les substances urbaines existantes » de l’agence AUC, de « la malléabilité urbaine » de Luc Gwiazdzinski, de « la résilience des villes » au travers des statistiques de Marco Stathopoulos, enfin de l’adaptabilité – ou non – du vivant en milieu urbain de l’écologue Luc Abadie. Les retranscriptions des conférences seront intégrées dans une publication et mises à disposition à l’occasion du lancement de la Ville adaptable 2 (Europan13)
Les conférences de lancement du concours à la Cité de l’architecture et du patrimoine ont été centrées autour de l’exposé de différentes expériences professionnelles. Au préalable, Chris Younes, philosophe membre du conseil scientifique d’Europan, a introduit le thème et Michel Lussault, géographe, a interrogé l’impact sociétal de celui-ci. La présentation des sites par les élus et leurs équipes a définitivement ancré le sujet. Cette présentation est toujours consultable sur le web (www.viméo.com).
ADAPTABILITÉ 3 - LES PROJETS
Ouverture et transparence ont été constamment recherchées tout au long des deux années de la session. Dès le rendu du concours, les projets dans leur totalité (soit 369 en France) ont été communiqués aux « villes » en même temps qu’aux experts et aux membres du jury. Les experts ont analysé les propositions, se répartissant les projets, les triant, les classant, les annotant, puis les visitant de nouveau collectivement avant de les présenter au jury et aux villes.
Le résultat a surpris. Personne ne s’attendait à un tel nombre de propositions, avec une moyenne de cinquante réponses par site. Même le site de Maupertuis, réputé difficile, en a recueilli trente-neuf. Comment attirer l’attention sur un territoire à part, et comportant pourtant de multiples enjeux ? L’ouverture symbolique du site par Europan l’a permis.
Cette fenêtre – autrement dit, et dans le bon sens du terme, cette mise en scène – positionne les acteurs et les conditionne pour accepter des propositions non attendues, voire non envisagées. Le troisième projet sélectionné de Rouen, par exemple, amène à reconsidérer le positionnement stratégique de la gare. Le recul des villes sur « leur site » provoque un parcours à travers un champ de possibles, d’habitude difficilement exprimable ou concevable pour des élus dans la durée des mandats. Et les techniciens ne portent pas seuls la responsabilité des remises en question. Europan permet donc de voir loin en un temps record et ce, tambour battant !
Cette session a fait en sorte que les villes puissent participer activement aux choix des projets, tout au long des deux tours du jury. Entre-temps, le Forum européen des villes et des jurys organisé à Paris Pantin a réuni l’ensemble des participants, autour de huit à neuf projets présélectionnés par site, pour deux jours d’échanges et de débats qui ont abouti à de réelles découvertes et aussi à des positionnements concertés, préalables au choix et au vote définitifs des jurys nationaux.
La publication d’analyses transversales des projets qui suivra fera émerger les idées des projets en sélection (et parfois des finalistes) et les synthétisera avant dispersion sur les sites, où les équipes et les villes prendront le relais. Cette substance a en effet vocation à être diffusée, distillée, comme un courant frais venant alimenter écoles d’architectures, universités ou professionnels et maîtres d’ouvrages. Elle a déjà servi pour l’élaboration du thème de la prochaine session, Europan.
ADAPTABILITÉ 4 - LES SUITES DU CONCOURS
Les résultats du concours ouvrent une nouvelle étape clé. Retenir trois projets par site en France n’est pas seulement, au regard du code des marchés publics, une attitude conforme, mais permet aussi de continuer à questionner le sujet à travers la confrontation des équipes et d’explorer les idées parfois complémentaires développées par celles-ci. De développer non seulement un scénario, mais plusieurs, avec des gens venant d’horizons différents, et les porter en concertation, en discussion, de façon plurielle. C’est là une réflexion poussée à toutes les échelles : faisabilité, vérifications, concertations, confrontations au contexte in situ. La méthode employée est éminemment liée au concours, elle se doit d’être expérimentale, et élargie aux partenaires.
Nous aimerions que tous puissent se saisir de l’originalité des idées qui se dégagent des projets, et puissent prendre le relais. Car s’il s’agit de réfléchir, il s’agit surtout de faire, d’expérimenter et de mettre en expérimentation. S’adapter aux réponses et aux propositions est un enjeu pour les villes, autant que s’adapter au réel l’est pour les candidats pour qui la sélection est l’occasion d’un passage à l’acte, bien loin des appels d’offre règlementaires.
Les suites d’Europan ont vocation, autant que faire se peut, à constituer des modèles : tenter de faire évoluer des normes, les documents d’urbanisme, partager l’expérience du projet à travers des processus de co-construction, faire évoluer le métier des concepteurs urbains. In fine, une nécessaire adaptabilité aux projets pour les lois en cours... Les suites du concours ont également pour objectif d’étoffer un réseau, celui des villes participantes, session après session, et de constituer un « club des villes Europan » où s’échangeraient des points de vue et des expériences.
LA VILLE ADAPTABLE 2 - VERS EUROPAN13 AUTO-ORGANISATION / PARTAGE / PROJET (PROCESSUS)
Au regard de l’intérêt démontré pour le sujet et du terreau fertile des résultats, il est proposé pour Europan13 de poursuivre le thème générique de « la ville adaptable » : adaptation à la nécessité d’un développement plus durable, mais aussi au contexte de crise économique que traverse la plupart des villes européennes. Trois concepts génériques structurent ce thème global : La résilience comme enjeu : être capable de prolonger ou retrouver une identité des éléments structurants de la ville (bâtis ou paysagers) dans un contexte d’importants bouleversements ; l’adaptabilité sociale comme objectif : concilier la cohérence de ces structures avec l’évolutivité des usages et des pratiques ; l’économie comme modalité : gérer des transformations urbaines dans des contextes différents d’acteurs et de ressources, mais avec des moyens limités, en période de crise économique et à l’ère de la ville de l’après pétrole. Prendre en compte ces trois thèmes induit des évolutions de la commande urbaine et architecturale dans les logiques d’acteurs (État-providence versus auto-organisation), dans les contenus (ségrégation versus partage), mais aussi dans les processus de conception (objet versus projet (processus) – voir ci-après les fiches détaillées. Europan souhaite donc que les sites à la fois se situent dans les grands enjeux autour de l’adaptabilité des villes européennes, mais qu’ils proposent également des innovations concrètes dans la commande proposée par les représentants des sites, suscitant des démarches nouvelles de projet de la part des jeunes concurrents. Europan se déroulera le long des années 2014 et 2015, les résultats du concours seront connus en décembre 2015.
Les sessions du concours, comme il ressort de cette introduction, sont en mouvement perpétuel, entre recherches de sites et expérimentations. Le démarrage des suites d’Europan12 in situ devra permettre d’alimenter la session 13 au vu des thématiques choisies.
Europan France souhaite à tous ses partenaires, villes et collectivités, jeunes professionnels, experts et chercheurs, enseignants et étudiants, maîtres d’ouvrages publics et privés, une très bonne inter-session 12/13. Celle-ci se concrétisera lors d’une rencontre européenne en septembre 2014, qui réunira tous les acteurs de la session 12 pour fêter collectivement les résultats, ainsi que les futurs participants à la Ville adaptable 2.
COMPOSITION DU JURY ET EXPERTISE EN FRANCE
Jury - Personnalité
Bertrand-Pierre GALEY, directeur de l’architecture, ministère de la Culture et de la Communication, France, président du jury
Représentants de la commande urbaine / architecturale
Jean-Marc OFFNER, directeur de l’Agence d’urbanisme, Bordeaux Métropole Aquitaine, a’urba, France / Serge CONTAT, directeur général de la RIVP (Régie immobilière de la Ville de Paris), France
Professionnels de la conception urbaine / architecturale
Tania CONCKO, architecte et urbaniste, Amsterdam, Pays-Bas / Brigitte MÉTRA, architecte, METRA&ASSOCIES, Paris, France / Joào NUNES, paysagiste, PROAP, Lisbonne, Portugal / Pascal ROLLET, architecte, Lipsky & Rollet Architectes, Paris, France
Suppléants
Nicolas REYMOND, architecte et urbaniste, atelier Nicolas Reymond, Paris, France / Marion VACONSIN, architecte paysagiste, Bouriette & Vaconsin architecture urbanisme paysage, Bordeaux, France
Commission d’expertise des sites
Laurence SCHLUMBERGER-GUEDJ, architecte conseil de l’État - Drac Haute-Normandie, architecte conseil à la Direction des Musées de France, enseignante à l’École nationale supérieure d’architecture Paris - La Villette et à l’Institut d’urbanisme de Paris / Albert Gilles COHEN, architecte et urbaniste, enseignant titulaire TPCAU à l’Ensa Paris - La Villette / Fabien GANTOIS, architecte et urbaniste agence AAFG, enseignant à l’Ensa Paris - La Villette / Emmanuel REDOUTEY, urbaniste, agence ER.amp, enseignant associé à l’Institut d’urbanisme de Paris
Commission d’expertise des projets
Fabien GANTOIS, coordinateur de l’expertise de projet, architecte et urbaniste agence AAFG, enseignant à l’Ensa Paris - La Villette / Chloé DUFLOS, architecte et urbaniste agence MUZ / Julie FERNANDEZ, architecte, agence LOG-architectes / Magali VOLKWEIN, architecte et urbaniste, direction du pôle urbanisme - Agence Devillers et Associés / Nicolas GUÉRIN, architecte et urbaniste agence NP2F architectes / Alain GUEZ, architecte et urbaniste, maître-assistant à l’Ensa Nancy, chercheur membre du LAA et du LAVUE UMR CNRS 7218 / Thomas SECONDÉ, paysagiste, agence AC&T Paysage & Territoire / Tae-Hoon YOON, architecte et urbaniste agence SATHY
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