Le contribuable pris pour un citron comme cet échec industriel pour une usine de recyclage
Qui paiera la facture d’une société dont la maison mère est basée en Suisse qui s’était à coup de millions d’Euro de marketing délectée de pouvoir transformer les déchets en produits.
Retour sur un fiasco industriel retentissant qui se termine par une facture adressée non pas au fautif mais au contribuable.
Entre 1999 et 2010 l'usine Citron (Centre International de Traitement et de Recyclage des Ordures Nocives), située à Rogerville en Seine-Maritime, emmaganisait des déchets jugés nocifs comme les piles au mercure ou les objets contenant des métaux lourds. Mais après divers incendies et incidents, et un procédé de recyclage qui ne fonctionnait pas, elle a mis la clé sous la porte. CITRON a été mis en liquidation judiciaire en décembre 2010. Aujourd'hui c'est une bombe écologique dont le nettoyage va coûter des millions d'euros aux contribuables français.
CITRON Suisse, basé à Zürich, en faillite comme sa filiale française, expédiait au Havre par wagons entiers en provenance de Bâle des déchets de déchiqueteurs, c'est-à-dire des résidus de broyage automobile imprégnés d’hydrocarbures et de résidus plastiques dont la Suisse n’avait que faire.
L’association Robin des Bois qui a suivi avec intérêt l’évolution de cette mésaventure a réalisé un reportage photographique édifiant, une visite guidée à l’intérieur et à l’extérieur de CITRON.
Les vastes halles d’une ancienne usine d’engrais phosphatés et les 13 hectares isolés dans les marais de l’estuaire de la Seine ont servi de 1998 à 2010 de paravent à des filières de recyclage factices et polluantes.
Les préfets successifs de la Seine-Maritime ont émis en un peu plus de 10 ans 13 arrêtés de mise en demeure et la DREAL de Seine-Maritime a dressé 7 procès verbaux d’infraction.
Cette vigilance de façade n’a pas empêché CITRON de prospérer et d’obtenir des autorisations d’extension d’activités.
Malgré les accidents de travail, les incendies, les explosions, CITRON a été encouragé jusqu’à la chute finale par les collectivités et les services de l’Etat ; les producteurs de déchets inattentifs aux mises en garde de Robin des Bois ont utilisé jusqu’au bout ce paravent béni par les autorités.
La com de CITRON prétendait transformer les déchets en produits. Le service commercial et les managers de CITRON se revendiquaient comme des pionniers de l’économie circulaire.
Des leçons sont à tirer de cet échec cinglant et sanglant sur le plan financier et environnemental. Nous en sommes loin. Pour l'association Robin des Bois, le nouveau plan déchet tel qu’il est entériné par le ministère de l’Ecologie déborde de recommandations incantatoires, déjà appliquées ou inapplicables faute de moyens humains et financiers. Et rajoute que malgré les demandes répétées et fondées du Conseil National des Déchets, la construction en France de filières de recyclage ne fait pas partie des axes prioritaires.
Priorité à la com, à la collecte, à l’exportation et à d’autres CITRON.
Retour de Com en 2000 avec Robin des Bois qui s’alarmait d’une usine en pleine déconfiture :
Communiqué Robin des Bois du 21 juillet 2000 - CITRON trop pressé
Le recyclage n'est pas exempt de dangers. CITRON (Centre International de Traitement et de Recyclage des Ordures Nocives) vient pour la deuxième fois d'être victime d'un incendie accidentel. Implanté dans la zone industrialo-portuaire du Havre, CITRON entend recycler à des prix attractifs des déchets industriels spéciaux (DIS) comme les piles et accumulateurs, les tubes fluorescents au mercure, les boues d'hydroxydes métalliques, les emballages souillés, les thermomètres au mercure et autres déchets mercuriels et contaminés aux métaux lourds "de toutes catégories". La montée en puissance de l'usine s'est soldée par un incendie le 23 mai 1999 et hier, 20 juillet 2000. Alors que CITRON n'a toujours pas prouvé la faisabilité du recyclage pyrométallurgique dont il a l'exclusivité, des milliers de tonnes de déchets à recycler s'entassent dans les halles de stockage et à l'extérieur. A ce capharnaüm s'ajoutent des conteneurs de déchets radioactifs issus du démantèlement de l'entreprise qui occupait précédemment le site, une usine d'engrais superphosphatés fermée par Hydro Agri France.
Aux difficultés techniques du procédé CITRON s'ajoutent donc les risques d'un stockage illimité de substances et matériaux dont la recyclabilité n'est pas prouvée. Les prix "attractifs" consentis par Citron attirent des marchés étrangers et français. L'armée française envoie chez CITRON ses stocks de piles et accumulateurs usagés.
Robin des Bois demande, avant qu'un troisième accident ne survienne, la suspension immédiate des arrivages de déchets multiples collectés par le service commercial de CITRON, la remise à plat du dossier technique tant en ce qui concerne le procédé que les conditions de stockage, et l'abrogation de l'arrêté préfectoral autorisant l'exploitation.
Plus tard, Robin des Bois constatait que CITRON récupérait une bonne partie des piles de ZIMAVAL, l’autre grande imposture de la pile. Soutenu par les collectivités locales, l’Union Européenne, l’ANVAR, ZIMAVAL a été mis en liquidation judiciaire fin 2002, 2 ans après le début d’exploitation. Le temps d’accumuler 3.500 t de piles à recycler, de facturer la prestation d’élimination et de mettre les clefs sous la porte. Le procédé miracle était une mystification. Dans une maquette 1/10ème du process, les tests démontraient que la qualité du zinc récupéré était exceptionnelle. Et pour cause, Luc Savariau aujourd’hui agent d’assurances dans le Calvados et à cette époque génie du recyclage utilisait du zinc pur pour prouver l’efficacité de sa technique hydrométallurgique. Avant de faire faillite, ZIMAVAL approuvé par des ONG écologistes a su capter la confiance de la grande distribution et de bien d’autres détenteurs en France et à l’étranger.
CITRON avait une vocation internationale. Son implantation dans la zone portuaire du Havre facilitait les transactions avec l’étranger. Les piles arrivaient par conteneurs maritimes d’Europe et de Taiwan.
En juillet 2000, une explosion dans un conteneur de piles au lithium en attente de traitement avait blessé 2 opérateurs et entraîné l’évacuation des écoles à Honfleur : à la suite, CITRON et son PDG ont été condamnés par le TGI de Rouen le 30 juin 2004.
ZIMAVAL : Piles: la face cachée
3500 tonnes de piles et de déchets entassés dans la prairie autour de l'usine, dans des big-bags et à ciel ouvert; la liquidation judiciaire; des clients bernés: 300 communes, la FNAC, Boulanger, Nature et Découvertes, Surcouf... Tel est le bilan d'une "entreprise leader" dans le recyclage des piles et accumulateurs. Après un an de pseudo-activité, grâce à l'aide financière de l'ADEME, de l'Europe, de l'ANVAR, des collectivités locales, ZIMAVAL, établie à Falaise dans le Calvados, va fermer, laissant sur le tapis des piles venues du monde entier notamment de Taiwan; son directeur déclarait avec compassion en 2001 que la prestation était demandée par un pays qui n'a pas les moyens techniques de traiter les piles. Il ajoutait que "la COGÉMA ne fait pas autre chose en retraitant les déchets radioactifs du Japon". La filière hydrométallurgique mise au point par ZIMAVAL n'a jamais fonctionné. Elle a pourtant reçu les prix Life environnement 1999 (Union Européenne), Anvar 1999, Ester d'Or 1998 (Technopole de Limoges) et les éloges de plusieurs associations environnementales. Seul a fonctionné dans cette usine un service commercial hyperperformant qui a capté les marchés et les lots de piles et qui a fait payer les prestations de services aux différents clients avant même que le procédé soit opérationnel. Le discours du directeur général de ZIMAVAL a su convaincre les services de l'État, désireux, sous la pression des différents ministères et de l'opinion publique, de développer le recyclage des piles sans prendre en compte le principe de précaution.
Chaque année en France, 720 millions de piles et 30 millions d'accumulateurs sont mis sur le marché, soit 31.000 t. Obligatoire depuis le 1er janvier 2001, leur collecte est une des plus faible d'Europe: 10 % du gisement mis en vente. L'importation de piles usagées en provenance de l'étranger (Pays-Bas, Danemark, Taiwan...) compense les faibles tonnages collectés dans l'hexagone. Les services de l'État et l'ADEME focalisent leur attention sur la collecte et délaissent le suivi du traitement. La France, en disposant d'une capacité théorique de traitement de plus de 41.500 t annuelles sur 9 sites, serait en mesure de répondre en totalité aux besoins. Ces sites de recyclage méritent un suivi, qui est à ce jour quasi-inexistant et complaisant.
Désormais la ville de Falaise se retrouve avec un site pollué et polluant sur les bras. Faudra-t-il à nouveau mobiliser les fonds publics de l'ADEME pour vider et décontaminer le site de ZIMAVAL?
Citron et sa poudre de recyclage des lampes…
Selon un courrier envoyé à Robin des Bois en décembre 2010 par l’éco organisme dédié au recyclage des lampes et autres équipements lumineux, les poudres fluorescentes avec leurs contenus mercurisés qui étaient en attente de démercurisation chez CITRON auraient été prises en charge par la société MBM (Mercure Boys Manufacture) de Voivres-les-Le-Mans (72) avant stockage définitif dans des installations réservées aux déchets dangereux (ISDD). MBM a été mis en liquidation judiciaire au printemps 2014. Environ 20.000 tonnes d’écrans de télévision à tube cathodique concassés sont abandonnés à ciel ouvert ou sous des bâches déchirées. Des déchets dangereux avec des teneurs élevées en plomb, en mercure, en cadmium ; ils contiennent aussi des terres rares très faiblement radioactives. Les amas de verre débordent des aires de stockage et libèrent des poussières diffuses et des eaux de ruissellement non canalisées. Tous ceux-ci à 200 km de Paris et des sièges des éco organismes français chargés de la collecte et de la bonne fin de l’élimination des téléviseurs et des ordinateurs en fin de vie.
Recylum a l’art de dégotter des prestataires guettés par la liquidation judiciaire.
CITRON a aussi accueilli sans les traiter des déchets issus d’une autre usine spécialisée dans le démantèlement des DEEE (Déchets d’Equipements Electriques et Electroniques). La CEDRE (Compagnie Européenne De Recyclage Electronique) installée à Issé (Loire-Atlantique) est elle aussi tombée en faillite fin 2005.
Résultat, une galerie d’horreur au port du Havre… La marche forcée de CITRON se traduisait par une augmentation spectaculaire des capacités de traitement, à l’origine fixées à 23.000 t / an et en 2005 montées à 100.000 t / an.
Depuis son entrée en action, l’usine avait multiplié les ratés et les anomalies. Pollutions atmosphériques, incendie des stocks, explosion d’un conteneur de piles au lithium, nuages de poussières noires, surstockages, prise de feu dans les wagons de Résidus de Broyage Automobiles (RBA) importés de Suisse, fumerolles s’échappant des toitures, atmosphères intérieures opaques, épandage de liquides mercuriels.
En 2005, une mission de l’Agence de l’Eau visant à reconduire l’homologation et le conventionnement de CITRON pour les années 2005 et suivantes confirmait les risques sanitaires et environnementaux dénoncés par l’association depuis 1996 :
A l’extérieur : ruissellement des eaux de pluie et égouttures issues des mâchefers sous-produits de l’incinération. Stockage de broyats de RBA à même le sol. Big-bags de verres broyés et souillés sans abri.
Halle de stockage : odeur très forte d'ammoniac. Défaut d'extraction d’air.
Halle du four : dalle de circulation intérieure couverte de boues de mâchefers. Emissions internes de fumées. Défaillances du système d’extraction des gaz.
Déchets sortants : les mâchefers contenant des phénols, benzène, toluène au-delà des normes admissibles sont transférés dans la décharge du Port Autonome du Havre dédiée aux déchets ménagers et industriels banals, pour servir de matériaux de couverture et de voirie.
A cette époque, Robin des Bois venait par ailleurs d’être destinataire d’informations alarmantes selon lesquelles l’exploitant utilisait comme stockage-tampon d’eaux polluées les galeries techniques souterraines mises en place par les ex-gestionnaires des lieux, la COFAZ, puis Norsk Hydro, spécialisés dans la fabrication d’engrais phosphatés. Les galeries n’etait pas étanches et semblaient régulièrement envahies par l’eau de mer. Les eaux polluées migraient ensuite vers le grand canal du port du Havre, contaminant les sédiments portuaires qui étaient ensuite dragués et rejetés en mer en face de la ville, sur le dépôt sous-marin d’Octeville. Selon les mêmes sources, la charpente de la halle de traitement était rongée par les sous-produits corrosifs à la verticale de l’unité de traitement des eaux de lavage des gaz.
D’une galerie d’horreur à l’apocalypse… Sous le prétexte d’extraire les métaux valorisables et de produire des mâchefers inertes utilisables en techniques routière et cimentière, CITRON acceptait avec l’aval des services de l’Etat des boues de stations d’épuration et des Résidus de Fumées d’Incinération d’Ordures Ménagères (REFIOM).
Il reste environ à l’intérieur des 2 halles de stockage et de traitement 30.000 tonnes de déchets dont, en première approche, l’élimination reviendrait à environ 17 millions d’euros, sans doute plus. Le Grand Port Maritime du Havre, propriétaire du foncier et SITA qui a racheté les bâtiments se sont engagés à y contribuer à hauteur de 6,6 millions d’euros. SITA a pour projet de reconvertir le site en une unité de production de vapeur et d’électricité à partir de déchets de bois de démolition et d’emballage.
Il est prévu que les déchets à l’intérieur des halles soient extraits d’ici la fin de 2015. A suivre.
Entre fuites et déchets… CITRON n’a jamais été très regardant sur les conditions de sécurité. Entre décembre 1998 et octobre 2010, pas moins de 14 fuites, incendies et départs de feu, explosions ont ponctué les activités et mis en danger la santé des personnels. Plusieurs alertes ont été lancées à ce sujet par la médecine du travail et un contrôleur de l’Agence de l’Eau Seine-Normandie. Un site fermé peut être aussi polluant et dangereux pour l’environnement qu’un site en exploitation. A preuve, l’état fuyard des citernes d’acide et de base tel qu’il a été constaté par Robin des Bois en septembre 2014.
Entre encres, marées noires, métaux lourds, toners solidaires, mercure, batteries de la 12ème Base de Soutien du Matériel de l’Armée, parfum de luxe et une mystérieuse fécule de patate.
Et ne parlons pas de l’extérieur… 120.000 tonnes environ de mâchefers s’entassent à l’extérieur des bâtiments. Selon CITRON, il s’agissait de « produits commercialisables » dénommés « capping ». Analysés à la demande du contrôleur de l’Agence de l’Eau Seine-Normandie, ils contiennent du benzène, du toluène, du xylène, des phénols. Ils sont auto inflammables d’autant que de nombreux résidus de plastiques et de piles y sont mêlés. Les fractions les plus fines et les plus vulnérables aux eaux de pluie ont été entreposées sous des halles provisoires pour ralentir la migration des polluants dans les sols et dans le grand canal du port du Havre.
L’élimination de ces déchets dangereux est évaluée par l’ADEME entre 40 et 50 millions d’euros. A l’heure actuelle, l’option retenue est de les laisser sur place, ils commencent à être colonisés par la végétation et menacés par l’oubli. Heureusement que Robin des Bois est là.
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