DEUX LAUREATS FRANÇAIS DE L’APPEL A PROJET « NER 300 » DE LA COMMISSION EUROPEENNE SUR LES ENERGIES RENOUVELABLES : « NEMO » ET « GEOSTRAS »
Pour la première fois, la vente des quotas de carbone va permettre de financer des projets contre le changement climatique. Parmi les dix-neuf projets sélectionnés par la Commission, deux sont Français.
La Commission européenne a annoncé mardi 8 juillet avoir sélectionné 19 projets dans 12 pays de l'UE, qui vont se répartir un milliard d'euros, provenant de la vente de quotas de carbone. Ces projets ont pour but de lutter contre le changement climatique.
Crée en 2005, le marché du carbone européen vise à plafonner les émissions de CO2 de 12000 sites industriels. Après avoir alloué les quotas gratuitement, les Etats ont été autorisés à mettre aux enchères une partie des quotas destinés aux entreprises. L'effondrement des prix du carbone en raison d'une surabondance de quotas a néanmoins incité la Commission à retirer des quotas du marché pour tenter de ranimer les prix-la tonne de CO2 flirte actuellement avec les 5 euros par tonne, contre 30 euros en 2008.
L'enveloppe s’inscrit dans le cadre du deuxième appel à projets du programme NER 300 qui vise à capturer et stocker le carbone en toute sécurité. Ces projets seront financés à la fois par la vente de quotas d'émission de carbone du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (UE) et les fonds non dépensés lors du premier appel à projet.
Le paquet Climat-énergie adopté sous présidence française de l’Union européenne a doté l’Europe d’un cadre réglementaire lui permettant de s’engager pleinement vers une réduction de ses émissions de gaz à effet de serre.
Parmi les mesures adoptées, l’article 10 bis de la directive 2009/29/CE, relative au système communautaire d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre, prévoit la création d’un mécanisme de financement destiné aux démonstrateurs de taille commerciale de captage et stockage du CO2 (CSC) et de démonstrateurs d’énergies renouvelables innovantes.
Ce mécanisme de financement est doté de 300 millions de quotas d’émissions provenant de la réserve des nouveaux entrants du système d’échange communautaire. Les modalités de sélection et de financement des projets dans le cadre de ce mécanisme communément appelé NER300 pour « New Entrant Reserve 300 » ont été définies par la Décision 2010/670/UE du 3 novembre 2010.
Celle-ci prévoit notamment :
- un financement des projets jusqu’à hauteur de 50% des « coûts pertinents » au sens de l’article 3 de la décision,
- le lancement de deux appels à projets successifs, le premier étant doté de 200 millions de quotas, le deuxième de 100 millions de quotas
- une sélection des projets en deux phases :
- la pré-sélection a lieu au niveau national,
- la sélection finale des projets est réalisée au niveau européen
- un minimum d’un démonstrateur sélectionné par pays et un maximum de trois, les projets transfrontaliers n’étant pas comptabilisés pour cette limite.
Rappel :
1 / Le fonds européen « NER 300 » (New Entrant Reserve 300) est un outil de financement de projets démonstrateurs dans les domaines
- du captage et stockage de CO2
- et des énergies renouvelables.
Créé en 2008 sous présidence française dans le cadre du 3ème paquet Energie-Climat, il dispose d’une enveloppe de financement de plus de 2 milliards d’euros.
2 / La sélection des projets lauréats s’est effectuée dans le cadre de deux appels à projets.
• Dans le cadre du deuxième appel à projets, la France a soumis en juillet 2013 quatre projets à la Commission Européenne, portant sur :
- les hydroliennes (« NormandieHydro », EDF EN et « Tritons », GDF SUEZ),
- l’énergie thermique des mers (« Nemo », Akuo Energy),
- et un projet franco-allemand de géothermie profonde (« Geostras », FONROCHE GEOTHERMIE).
• Les deux projets « Nemo » et « Geostras » ont été retenus.
3 / A l’issue du premier appel à projets, deux projets français avaient été sélectionnés en décembre 2012 dans les domaines :
- des éoliennes flottantes (« VertiMED », EDF EN),
- et des biocarburants de 2ème génération (« UPM Stracel BtL», UPM).
Un large éventail d’énergies renouvelables est désormais couvert, montrant la diversité de l’expertise nationale, et la capacité de la France à se projeter dans un nouveau modèle énergétique, au service de la lutte contre le changement climatique.
4 / La sélection de ces deux nouveaux projets « Nemo » et « Geostras » permet aux lauréats soutenus par la France de bénéficier de 89 M€ de subventions européennes.
Sur les deux appels à projets du NER 300, les quatre lauréats français totaliseront des subventions européennes de 292 M€, dont :
- 169 M€ pour UPM Stracel,
- 34 M€ pour VertiMED,
- 72 M€ pour Nemo,
- et 17 M€ pour Geostras. Les projets d’hydroliennes « NormandieHydro » et « Tritons » n’ont pas été retenus sur la liste principale des lauréats.
I/ Le projet « Nemo », DCNS, porté par Akuo Energy pour capter l’énergie thermique des mers
L’énergie thermique des mers (ETM) consiste en l’exploitation de la différence de température entre les eaux de surface et les eaux profondes des océans.
Il s’agit d’une technique particulièrement adaptée à la zone intertropicale où le gradient de température est important.
Contrairement aux autres énergies renouvelables, l’ETM fournit une énergie de base, stable, garantie, et permet une production d’électricité non intermittente, renouvelable et décarbonée, sans aucune incertitude sur la ressource (accès, disponibilité, coût). C’est une technologie très respectueuse de l’environnement (faible impact visuel et paysager, absence de rejet de gaz à effet de serre) et qui concourt à la stabilité des réseaux insulaires fragiles.
La France détient une des technologies les plus avancées.
Le projet NEMO – une centrale de production d’énergie thermique des mers flottante d’une puissance installée de 16 MW, implantée en Martinique.
NEMO est un projet stratégique de développement de cette technologie française. C’est la première étape mondiale pour parvenir à la maturation industrielle d’une technologie innovante, principalement consacrée au monde insulaire et tropical.
Ce projet pilote s’appuie sur le prototype à terre mis en œuvre par l’expert naval DCNS depuis 2010 à la Réunion et qui a permis de qualifier la technologie ETM. D’un démonstrateur à la Réunion au projet NEMO de ferme pilote en format industriel à la Martinique, l’Outre-Mer est au cœur de la stratégie de développement commercial de la technologie et de consolidation de cette filière industrielle française.
Il permet de développer une technologie d’énergie renouvelable innovante conçue comme une réponse spécifique aux problématiques des zones insulaires tropicales non interconnectées. Cette innovation française offre ainsi la réponse technologique et industrielle attendue de l’Europe en faveur de la transition énergétique dans les territoires ultramarins. Elle fait de l’Outre-Mer le laboratoire de l’innovation en matière de développement des énergies renouvelables.
Le projet NEMO est une plateforme flottante qui constitue le format «en mer» (offshore) du développement de la technologie ETM. A terme, cette technologie offshore vise les sites isolés densément peuplés, nécessitant une production d’électricité dans des zones où le coût de l’énergie fossile est élevé. L’ETM offshore apporte une alternative jusqu’alors inexistante aux centrales thermiques pour la production d’électricité de base (non intermittente) dans les zones insulaires tropicales. D’autres versions «à terre» (onshore) de cette technologie offriraient aussi de nouveaux débouchés commerciaux, ainsi qu’un moyen de valoriser les co-produits de l’ETM (climatisation, désalinisation, aquaculture, agriculture....). Cette complémentarité technologique et commerciale entre les versions
onshore et offshore est l’une des clefs du succès de la filière française face à la concurrence internationale.
Un partenariat 100% français structurant une nouvelle filière industrielle
NEMO est soutenu par un partenariat 100% français associant Akuo Energy, en tant que développeur de projet et DCNS en tant qu’industriel et fournisseur de technologie ETM, qui ont l’opportunité de constituer avec ce projet une équipe de France championne à l’export de cette technologie. Les composants les plus importants de la technologie sont, en outre, produits en métropole avec des partenaires français.
La Région Martinique s’est également fortement engagée dans le projet traduisant la volonté de l’île de s’inscrire dans cette histoire industrielle française. Le partenariat sera structuré autour de l’actionnariat de la société de projet, composé majoritairement d’AKUO Energy avec une participation minoritaire de DCNS ainsi que du Conseil régional de Martinique via la Société d’Economie Mixte Energie de Martinique (EDM). Des partenaires financiers institutionnels sont pressentis pour compléter ce tour de table.
Enfin, le projet est soutenu au travers de partenariats structurés avec les régions Martinique et Réunion, et de démarches associées avec plusieurs instituts de recherche comme l’IFREMER, France Energies Marines, LEGOS (CNRS) et le LEMAR (Université de Bretagne Occidentale).
Un déploiement commercial à l’international à fort potentiel
NEMO constitue le premier pas vers la construction d’une filière industrielle initiée en territoire français et dont les perspectives commerciales internationales à l'export sont extrêmement prometteuses. En effet, des développements importants sont possibles dans la zone intertropicale, à la fois dans les grands archipels (Indonésie, Philippines), les systèmes insulaires (Caraïbes, Pacifique, Océan Indien) ainsi que les zones côtières (Mexique).
Perspectives d’emplois
Le partenariat dispose en France des compétences et du savoir-faire nécessaires à la réalisation de la centrale en mer NEMO ainsi qu'au développement commercial de la technologie. Les composants les plus importants seront ainsi produits en Métropole, tandis que la mise en œuvre opérationnelle s’appuiera sur des bases arrières ultramarines. La plateforme pilote NEMO sera construite et assemblée dans un chantier naval français et permettra pour sa réalisation la création de près de 1300 emplois. Les constructions en phase commerciale de centrales offshore devraient mobiliser plus de 2000 emplois en France pendant 4 ans par centrale.
II/ Le projet franco-allemand « Geostras », porté par FONROCHE sur la géothermie profonde
Projet de centrale géothermique avec coproduction d’électricité et de chaleur
La géothermie profonde a pour but de capturer la chaleur contenue dans le sous-sol ou dans les nappes d’eau souterraines via des liquides géothermiques présents dans des réservoirs profonds (entre 2000 et 5000 mètres en France) afin de produire de l’énergie en continu.
Il s’agit d’une source d’énergie renouvelable présente en quantité sur l’ensemble de la planète et exploitée depuis des milliers d’années. Elle fait figure, au niveau mondial, de stratégie prioritaire pour la réduction des énergies fossiles et des émissions de CO2. Son marché devrait connaître une croissance très significative dans les années à venir et est estimé par l’Agence Internationale de l’Energie à 200 GW en 2050.
La géothermie est une énergie de base, produisant environ 8000 h/an, qui permet de produire une énergie renouvelable, décarbonée et compétitive. La France dispose d’importantes ressources géothermiques sur son territoire. En Outre-mer, la géothermie peut avoir une contribution significative pour atteindre des objectifs d’autonomie énergétique. Sur le territoire métropolitain, des nouveaux projets de centrales géothermiques avec coproduction d’électricité et de chaleur s’inscrivent dans la transition énergétique des territoires.
La France compte parmi les pionniers dans le domaine de la géothermie profonde/électrogène et est en train de constituer une filière industrielle. Le cluster « GEODEEP » récemment constitué par les acteurs de la filière vise à valoriser pleinement le savoir-faire français en la matière, sur le territoire métropolitain et à l’international.
Le projet GEOSTRAS – Une centrale de production d’énergie renouvelable géothermique avec coproduction d’électricité (6,7MWe brut) et de chaleur (35MWth) implantée en Alsace.
Ce projet transfrontalier sera réalisé à Strasbourg avec un partenariat industriel franco-allemand fort.
Il a pour objectif d’optimiser les méthodes douces de mise en production du réservoir géothermique notamment grâce à l’amélioration d’architecture de puits, enjeux essentiels d’acceptabilité sociétale en milieu péri-urbain.
La valorisation énergétique géothermique en surface est le deuxième enjeu du projet GEOSTRAS, notamment via une technologie innovante de production d’électricité et la valorisation de chaleur à basse température.
Cet outil sera conçu, optimisé, et exploiter de manière à avoir un système de cogénération géothermique offrant à chaque instant une production thermique et électrique maximale.
Il sera corrélé à un système innovant de gestion des productions en fonction des différentes fluctuations des paramètres extérieurs (réservoir géologique, consommateurs thermiques, réseau d’électricité, conditions de la source froide). Une meilleure anticipation, une meilleure compréhension des phénomènes, couplée à une intégration de l’énergie dans l’analyse du système, permettront d’offrir un système industriel fiable et reproductible pour une filière en plein essor.
Partenaires industriels locaux - partenariat fort avec des industriels locaux qui achèteront la chaleur géothermique produite.
Les industriels locaux bénéficieront, ainsi, d’une meilleure visibilité quant au coût de l’énergie, en comparaison au modèle des énergies fossiles.
Ce projet entre dans la continuation de la collaboration franco-allemande lancée dans le cadre du projet de Soultz-sous-Forêts (1987) et est en pleine cohérence avec les propositions du chef de l’Etat pour le lancement de la coordination franco-allemande en termes de transition énergétique.Au niveau national, le forage sera réalisé par Foragelec, une entreprise dont Fonroche est co- actionnaire avec Herrenknecht Vertical GmbH et Angers&Soehne Gmbh. Ce co-investissement dans un outil de forage dédié démontre l’engagement de Fonroche pour une vision très long terme de cette filière au côté de l’Etat français.
Perspectives d’emplois
C’est un chiffre d’affaires pour la filière cumulé de plus 1000M€ et la création de l’ordre de 8 000 emplois (directs et indirects) qui sont visés à 10 ans.