Éolien terrestre, biomasse, solaire photovoltaïque, coûts et rentabilité
La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a publié son rapport d’analyse sur les coûts et la rentabilité des énergies renouvelables en France métropolitaine. Ce rapport dresse un bilan des filières de l’éolien terrestre, du solaire photovoltaïque, de la biomasse et de la cogénération.
L’analyse de la CRE a cherché a examiner la rentabilité de ces installations de production d’électricité à partir d’énergie renouvelable. Cette étude a pour objectif de s’assurer que le soutien public, financé par les consommateurs finals d’électricité sur la part CSPE de leur facture, ne donne pas lieu à « des profits excessifs » conformément à l’article 10 de la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité et de vérifier que les tarifs d’obligation d’achat sont adaptés aux réalités économiques, technologiques et industrielles des filières.
Sur le fondement de son analyse, la CRE a formulé un certain nombre de recommandations visant à améliorer le fonctionnement des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables.
Effectivement, au cours des dernières années, le secteur des énergies renouvelables a connu de profondes mutations en termes d’innovations technologiques, de financement des projets et de structuration des dispositifs de soutien public. Ces évolutions conduisent à s’interroger sur la pertinence et l’adéquation de ces dispositifs, qui sont spécifiques à chaque filière.
Dans ses avis sur les tarifs d’obligation d’achat, en particulier ceux de 2006 et 2010 relatifs à la filière photovoltaïque, et ceux de 2006 et 2008 relatifs à la filière éolienne terrestre, la Commission de régulation de l’énergie (CRE) avait souligné la rentabilité élevée induite par les tarifs proposés par les ministres chargés de l’énergie successifs. Ces avis avaient été élaborés sur le fondement de données de coûts déclaratives, prévisionnelles ou normatives, généralement obtenues auprès des professionnels du secteur.
L’étude sur les filières de l’éolien terrestre, du solaire photovoltaïque, de la biomasse et de la cogénération montre que pour les deux premières filières renouvelables, elles représentent les montants de charges de service public les plus significatifs pour le consommateur, quant à la troisième, elle est celle dont le développement est le plus incertain, le taux de non-mise en service des projets lauréats des appels d’offres étant très élevé ; la dernière mérite d’être analysée du fait des nouvelles conditions tarifaires mises en place à l’automne 2013. Il sera ultérieurement procédé à l’examen des filières hydraulique et biogaz ainsi qu’à des travaux complémentaires sur les filières photovoltaïque et éolienne terrestre.
Sur la filière cogénération
Les exploitants des installations de cogénération ont fait preuve d’une très grande réticence à transmettre les éléments demandés par la CRE dans le cadre de la présente étude ; les quelques données recueillies n’ont pas permis de procéder à une analyse représentative des conditions économiques et de la rentabilité du parc de cogénération français.
La CRE réitérera au premier semestre 2014 sa demande formelle de données aux exploitants des installations de cogénération sélectionnées. Elle rappelle par ailleurs que le défaut de communication et d’informations est susceptible de constituer un manquement et, à ce titre, de faire l’objet d’une sanction.
Sur la filière éolienne terrestre
La filière éolienne terrestre est une filière mature, présentant de bonnes conditions de concurrence entre les acteurs. Le coût d’investissement, très largement prédominant dans le coût de production, est composé aux trois-quarts du coût des éoliennes, qui suit actuellement une tendance à la baisse vraisemblablement amenée à se poursuivre à l’avenir.
La faible différenciation tarifaire en fonction du productible des installations éoliennes terrestres offre aux installations les mieux situées un niveau de rentabilité très supérieur au CMPC de référence1 utilisé par la CRE pour élaborer ses avis sur les tarifs d’obligation d’achat.
Le mécanisme d’obligation d’achat est dimensionné pour rentabiliser les installations qui en bénéficient sur la durée du contrat. Celle-ci est de 15 ans dans le cas de l’éolien terrestre, alors que les retours d’expérience montrent que les installations peuvent fonctionner 20 voire 25 ans sans requérir d’autres investissements que ceux de maintenance courante. Dès lors, les installations, après avoir été intégralement amorties et rémunérées sur 15 ans, continueront à valoriser l’électricité qu’elles produisent sur les marchés pendant 5 à 10 années supplémentaires.
En raison des temps de développements des parcs éoliens à terre observés actuellement, la CRE n’a pas été en mesure d’étudier l’effet des dernières dispositions législatives et réglementaires (S3RENR, loi « Brottes ») sur le développement de la filière et sa rentabilité. Elle procédera aux analyses nécessaires dès lors que les premiers parcs relevant de ces dispositions auront été mis en service.
Ces constats conduisent la CRE à formuler les recommandations suivantes :
• Le recours aux appels d’offres doit être préféré au tarif d’achat unique.
• La structure des tarifs d’obligation d’achat doit être revue afin d’éviter la rentabilité excessive des installations bénéficiant des meilleures conditions de vent, un appel d’offres permettant également d’atteindre cet objectif.
• La durée du contrat doit correspondre à la durée d’exploitation réelle des parcs éoliens, et le niveau des tarifs doit être dimensionné en conséquence. Si la durée actuelle était conservée, le niveau des tarifs devrait être ajusté pour tenir compte de la vente d’électricité sur les marchés, possible après l’échéance du contrat.
• Le niveau du tarif, inchangé depuis 2006, doit faire l’objet d’une révision régulière afin de refléter l’évolution des coûts.
Sur la filière solaire photovoltaïque
La filière photovoltaïque a connu une baisse significative de ses coûts d’investissement et d’exploitation depuis 2010, principalement due à la diminution du prix des modules, qui représente à lui seul près de la moitié des dépenses d’investissement. Les taux de rentabilité de cette filière, supérieurs au CMPC de référence voire excessifs avant le moratoire, sont en nette baisse depuis la mise en œuvre d’une tarification dynamique.
Le développement de la filière photovoltaïque a conduit à une baisse notable des coûts de production, qui s’explique par un effet d’échelle, les parcs les plus puissants étant généralement moins chers, et par un effet d’apprentissage. La mise en œuvre d’appels d’offres sur les segments les plus concurrentiels de la filière a également permis de ramener les rentabilités à des niveaux proches du CMPC de référence.
La CRE procédera à l’avenir à de nouvelles analyses (i) sur un panel d’installations plus significatif, (ii) sur des installations bénéficiant des tarifs dégressifs de l’arrêté de janvier 2013 et (iii) sur des installations lauréates des appels d’offres de 2011, une fois mises en service, afin de comparer les coûts réels aux coûts qui avaient été déclarés dans les dossiers de candidature.
Sur la base de ces observations, la CRE émet les recommandations suivantes :
• Les appels d’offres doivent être généralisés à l’ensemble des filières matures.
• Les tarifs d’achat dynamiques doivent être maintenus.
Sur la filière biomasse
Le développement irrégulier de la filière biomasse s’explique par l’impossibilité de déterminer ex ante un dispositif de soutien national, alors même que les installations sont très diverses, tant en termes de puissance que de plan d’approvisionnement ou de débouché chaleur.
L’appel d’offres pourrait constituer un mécanisme efficace pour développer des installations avec une rentabilité raisonnable, dès lors qu’il prend en compte leur dimension régionale.
Un tarif d’achat régionalisé, comportant des clauses contraignantes en matière notamment de contrôle des plans d’approvisionnement de l’installation, pourrait également constituer une solution appropriée au développement de la filière, mais présente toutefois l’inconvénient d’une complexité de construction des grilles tarifaires.