Connaître l’impact et le rôle des activités industrielles sur l’environnement…
Relocaliser l’industrie en France, stimuler par la nouvelle France industrielle, doit permettre de redonner un élan d’activités de production. Cette dynamique encourageante qui vise à relancer l’appareil productif à travers différents secteurs économiques doit aussi répondre à l’un des enjeux notamment sur la relation des activités industrielles sur l'environnement par type d'activité.
C’est donc dans ce cadre que le Commissariat général au développement durable a publié dans la collection Repères une édition consacrée à l’industrie et à l’environnement.
Depuis 1993, la part de l’industrie dans le Produit intérieur brut (PIB) a baissé de 6,5 points tandis que celle du tertiaire a progressé de 7 points. Ainsi, en 2011, l’industrie contribue à 12,7 % du PIB de la France, loin derrière les services (près de 80 % du PIB) mais devant la construction (6,3 %) et l’agriculture (1,9 %). Cette diminution résulte de la combinaison de deux tendances :
• l’externalisation de certaines activités (services administratifs, maintenance des équipements, nettoyage des locaux, restauration du personnel, transport, etc.) qui sont devenues des activités de service relevant du tertiaire, mais auxquelles l’industrie a toujours recours ;
• la restructuration d’activités, ou les délocalisations d’établissements, conséquences d’une mondialisation renforcée.
La baisse d’activité industrielle peut donner une image trompeuse quant à son importance en regard des enjeux environnementaux. Que ce soit en termes d’émissions ou de consommation de ressources, l’industrie peut directement porter atteinte aux milieux mais également indirectement via des activités tertiaires ou les importations.
D’ailleurs, l’image de l’industrie française n’est pas au beau fixe. D’après le baromètre d’image de l’industrie (février 2013, OpinionWay/UIMM), deux tiers des personnes ayant entendu parler d’industrie dans les médias considèrent que c’était de manière négative. Quatre Français sur cinq ont le sentiment que les industriels ne s’impliquent pas dans la préservation de l’environnement. Mais qu’en est-il réellement, comment l’industrie a-t-elle pris en compte l’environnement dans son fonctionnement ?
Bien qu’aujourd’hui on parle davantage de « filières industrielles » que de secteurs pour traiter du système productif français, l’information environnementale désormais disponible, et sur laquelle s’appuie l’édition du CGDD, est celle d’établissements, d’entreprises industrielles, ou encore de branches d’activité. Mais l’enjeu de connaissance du rôle des activités industrielles sur l’environnement par type d’activité, impact et territoire est nécessaire et reste d’autant plus fort que la relocalisation d’activités industrielles et le développement de filières d’avenir sont d’actualité.
L’édition Repères mentionne qu’en 2011, l’industrie représente 25 % de la production totale marchande française, 76 % des exportations et 83 % des importations.
L’industrie manufacturière assure 86 % de la production de l’industrie (loin devant la production d’énergie (10 %), « eau/déchets et dépollution » (3,5 %) et les industries extractives (0,5 %)), 92% de ses importations et 98 % de ses exportations.
Les importations contribuent à 37 % de l’offre totale manufacturière, tandis qu’un tiers de celle-ci est destiné à l’exportation. Les secteurs textile/cuir/peaux, fabrication de machines/équipements divers, chimie/ pharmacie et automobile/autres moyens de transports, se placent au-dessus de ces moyennes, l’agroalimentaire et le bois-papier-carton très en deçà.
La stagnation de la production manufacturière depuis 2000 s’est accompagnée de la poursuite de la croissance des importations : la production a crû d’un tiers en 2011 par rapport à 1993 et les importations de 160 %, le poids de ces dernières dans l’offre progressant, selon le secteur, de 5 points (agroalimentaire) à 35 (textile, cuir et peaux). Malgré une hausse de 120 % des exportations depuis 1993, la balance commerciale de l’industrie manufacturière est déficitaire depuis 2005 ; seuls les secteurs alimentaire, « chimie/pharmacie » et « automobile/autres moyens de transport » gardent un solde positif en 2011. Cette tendance est marquée sur les secteurs textile/ cuir/peaux, et cokéfaction/raffinage qui cumulent également depuis 1993 des pertes d’emplois salariés jusqu’à 2 à 3 fois supérieures à la moyenne de l’industrie manufacturière ainsi que des baisses de production.
Quelles pressions exercées par l’industrie ? L’industrie est le principal secteur à la fois producteur et consommateur de matières premières.
Le numéro Repères montre que d’une part, en 2011, les industries extractives ont fourni 61 % des matières extraites sur le territoire, soit 398 millions de tonnes (Mt) dont 91 % sont des minéraux issus de carrières et destinés à la construction. D’autre part, l’industrie transforme ces matières brutes extraites ainsi que des produits de l’agriculture, la pêche et la sylviculture (biomasse), mais également l’essentiel (93 %) de leurs pendants importés.
Il précise également que d’un côté, la quantité de matières brutes extraite du territoire, en excluant les minéraux de carrières, a baissé de 50 % depuis 1990 et celle extraite à l’étranger et importée par l’industrie, estimée à 148 Mt, s’est stabilisée (+ 3 %). De l’autre, les importations de l’industrie ont augmenté de 125 % (en volume, prix chainés) entre 1993 et 2011. En effet, outre des matières brutes, l’industrie utilise également des produits semi-finis dans ses processus, en partie importés.
Le CGDD observe qu’ainsi, la répartition entre matières « brutes » et produits « semi-finis » importés par l’industrie a évolué depuis 1990. Pour les matières de types bois et ses produits dérivés, minerais métalliques et produits à base dominante de métal ou encore minéraux industriels et de construction, l’industrie se tourne de plus en plus vers des produits « semi-finis ». Par contre, pour celles de type « biomasse », elle privilégie les matières « brutes » plutôt que « semi-finies ». Quant aux hydrocarbures et leurs produits dérivés, dont les extractions ont presque disparu en France, qu’ils soient « bruts » ou « semi-finis », les importations augmentent.
Enfin, parmi les produits semi-finis importés, 5,5 Mt sont des matériaux issus du recyclage de déchets (métaux ferreux et non-ferreux, papiers-cartons, plastiques...). Ils sont réintroduits dans les cycles de production industriels, en substitution de tout ou partie de matériaux « neufs ».
S’agissant de l’eau, le CGDD explique que pour l’industrie, elle peut être un solvant, une matière première, un fluide de nettoyage des équipements et des produits fabriqués, ou encore un fluide caloporteur servant au fonctionnement d’une chaudière ou au refroidissement d’une installation. Dans ce dernier cas, notamment en production d’électricité, la consommation nette d’eau est faible, l’essentiel de l’eau prélevée étant restitué au milieu.
Le CGDD note que sur l’ensemble des prélèvements soumis à redevance, la « production d’énergie », avec 22 Mdm3 en 2010, est le plus gros préleveur d’eau (66 % du total d’eau prélevé en France), dont 99 % sont destinés au refroidissement des installations productrices d’électricité. Hors prélèvements de la centrale nucléaire du Blayais, introduits dans le bilan à partir de 2008, les volumes sont relativement constants depuis 2003, voire en légère baisse depuis 2008.
Parallèlement, la note du CGDD mentionne que le second préleveur industriel est l’industrie manufacturière : 1 733 Mm3 en 2010, soit 5,2 % de l’eau totale prélevée, dont 58 % en eaux superficielles et 42 % en eaux souterraines. Depuis 2003, ses prélèvements ont baissé de 32 %, les premiers préleveurs restant la « chimie/pharmacie » (42 %), loin devant le « bois/papier/ carton » (16 %), les IAA (15 %) et les autres secteurs (moins de 8 % chacun). Si tous ont réduit leurs prélèvements d’eau, de 17 % (« cokéfaction raffinage ») à 64 % (« textile, cuir et peaux »), seules les IAA et la « chimie/pharmacie » ont simultanément augmenté leur production (respectivement de 3 % et 6 % en volume prix chainés).
Concernant les industries extractives et le secteur « déchets et dépollution », le CGDD estime qu’elles représentent moins de 1 % du total prélevé. Depuis 2003, les premières ont baissé de 27 % leurs prélèvements mais ont extrait 15 % de matières en moins. Le secteur « déchets et dépollution » a fait progresser son activité de + 4,5 % (en volume prix chaînés) tout en diminuant de 29 % ses prélèvements.
En 2010, la consommation totale de produits énergétiques de l’industrie pèse 66 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep), soit 36 % de celle de la France métropolitaine ; elle est supérieure à celle des commerces et services (22 %) mais inférieure à celle des ménages (38 %). Elle inclut les produits utilisés à des fins non énergétiques.
Dans l’industrie, les plus gros consommateurs sont la « production d’énergie » (23 %), la « chimie/pharmacie » (21 %), puis la « métallurgie/fabrication de produits métalliques » (15 %) et les IAA (11 %). 35 % des produits énergétiques consommés par l’industrie sont du gaz, 25 % de l’électricité, 19 % des produits pétroliers (y compris comme matières premières), 16 % des combustibles minéraux solides (CMS) et 5 % des énergies renouvelables (ENR). 87 % des CMS consommés le sont par la métallurgie et la « production d’énergie » et 63 % des produits pétroliers par la « chimie/pharmacie » et les « caoutchoucs/plastiques ».
Entre 1993 et 2008, la consommation de l’industrie a peu évolué (-0,3 %) alors que sa production a augmenté de 39 %. Cela correspond à -21 % de CMS et -13 % de produits pétroliers, contre +22 % de gaz, +12 % d’électricité et +19 % d’énergies renouvelables. Tous les secteurs dont l’activité est en hausse ont réduit leurs consommations de CMS mais ont augmenté celles de gaz et d’électricité. Pour les produits pétroliers, seuls la « production d’énergie », « eau, déchets et dépollution » et les « caoutchoucs/plastiques » ont augmenté leurs consommations. Alors qu’en 1993, 60 % des EnR consommées étaient sous forme de bois, elles ne sont plus que 42 % en 2008, les autres EnR (biomasse, liqueur noire, biogaz, biocarburants...) ayant gagné du poids.
Entre 2008 et 2010, la consommation de produits énergétiques de l’industrie baisse de 3 %. Elle diminue dans tous les secteurs excepté ceux en hausse d’activité (« production d’énergie ») ou en stabilisation (IAA).
La déclaration annuelle des émissions de polluants dans l’eau est obligatoire pour toutes les ICPE A, certains élevages, les stations d’épuration et les industries extractives.
En 2011, 1 869 exploitants industriels ont déclaré des masses de polluants au-dessus des seuils, soit environ autant qu’en 2007. 75 % des déclarants industriels relèvent de l’industrie manufacturière et 22 % de « eau, déchets et dépollution ». 26 % des établissements manufacturiers déclarants sont en « métallurgie/fabrication de produits métalliques », 23 % en agroalimentaire et 17 % en « chimie/pharmacie ».
Pour chaque famille de polluants, l’industrie est à l’origine de 80 % à 99 % des masses émises déclarées.
Le secteur « eau déchets et dépollution » déclare le plus de matières azotées, phosphorées et d’hydrocarbures. En effet, les stations d’épuration collectent et traitent les eaux urbaines mais certaines également les effluents industriels et agricoles (élevages) qui leur sont raccordés.
Plus de 70 % des matières en suspension rejetées dans l’eau sont émis par la « métallurgie/fabrication de produits métalliques ». Les rejets de composés organohalogénés adsorbables (AOX) proviennent essentiellement du « bois/papier/ carton « (utilisation de produits chlorés pour la décoloration de la pâte à papier). La « chimie/pharmacie » émet de 75 % à 100 % des masses en composés organohalogénés volatils (COHV).
Sur la période 2007-2011, l’ensemble des émissions déclarées par l’industrie manufacturière a baissé de 7 % à 95 % (métaux), à l’exception des phénols (+35 %). Durant cette même période, sa production a également diminué de 6 % en volume. Les baisses importantes en aluminium (Al), fer (Fe), chrome (Cr) et leurs composés s’expliquent principalement par l’obligation d’une diminution (à partir de 2011) des rejets en mer d’un unique fabricant d’alumine (qui générait plus de 87 % des émissions industrielles de ces métaux). En 2011, cet établissement a donc converti environ 40 % de ses émissions en « boues » sèches.
Les émissions dans l’air (hors gaz à effet de serre) :
En 2010, l’industrie représente entre 8 % (cuivre, Cu) et 89 % (selenium, Se) des rejets métalliques dans l’air, 16 % des particules totales en suspension (PES), dont les PM10 et 30 % du total des gaz acidifiants, eutrophisants et photochimiques (AEP) émis (dont 75 % du total en SO2).
Selon le polluant, le secteur le plus émetteur varie. 75 % des émissions industrielles de particules en suspension proviennent des industries extractives et du « bois/papier/ carton », 44 % des particules métalliques de la « métallurgie/fabrication de produits métalliques » (premier émetteur industriel) tandis que les « caoutchouc/plastiques/ fabrication d’autres produits non métalliques » se caractérisent par les émissions les plus élevées en COVNM (21 %) et la production d’énergie pour celles en NOx (23 %) et en SO2 (30 %).
Enfin, les dioxines et furannes (PCDD-F) émises par l’industrie, sont surtout imputables aux secteurs « eau, déchets et dépollution » et « métallurgie/fabrication de produits métalliques ».
Entre 1993 et 2008, l’industrie a réduit ses émissions de polluants, exceptés celles de monoxyde de carbone (CO) et de Se, tout en augmentant sa production de 39 %. Sur cette période, pour le « bois, papier, carton », seules les émissions de particules en suspension ont cru. Il en est de même de la métallurgie dont seules les émissions de CO (qui représentent 87 % de celles de l’industrie) ont progressé, les émissions métalliques notamment ayant baissé de 88 %. La hausse des émissions de Se est essentiellement due à celle du secteur le plus émetteur, « caoutchouc, plastiques et autres produits minéraux non métalliques ». Les émissions totales de zinc (Zn) et de chrome (Cr) ont baissé de plus de 80 % pendant que celles de l’industrie diminuaient encore plus (-88 %).
Entre 2008 et 2010, les émissions industrielles ont baissé de 23 % pour les métaux, 7 % pour les PM10 et 1 % pour les gaz AEP ; la production industrielle a, elle, diminué de 6 %.
Les émissions de gaz à effet de serre :
En 2010, l’industrie est à l’origine d’un tiers des gaz à effet de serre (GES) émis en France métropolitaine soit 176 millions de tonnes équivalent CO2 (Mteq CO2), dont 63 % par l’industrie manufacturière et 21 % par la « production d’énergie ». Dans l’industrie manufacturière, les secteurs les plus émetteurs sont la « chimie/ pharmacie » (23 %), les « caoutchoucs/plastiques/autres produits minéraux non métalliques » (22 %), la « métallurgie/fabrication de produits métalliques » (18 %), « cokéfaction/raffinage » (17 %) et les IAA (11 %). 86 % des GES rejetés par l’industrie sontduCO2,9%duCH4.
Les GES inventoriés annuellement sont ceux pris en compte dans le protocole de Kyoto. Il s’agit du méthane (CH4), du dioxyde de carbone (CO2), du protoxyde d’azote (N2O), des hydrofluorocarbures (HFC), de l’hexafluorure de soufre (SF6) et des perfluorocarbures (PFC).
Entre 1993 et 2008, l’industrie réduit ses émissions de 14 % alors que l’ensemble des émissions françaises baisse de 2 %. Dans le détail, il s’agit de - 4 % en CO2 et au moins - 67 % pour les SF6, N2O et PFC. Seules les émissions de HFC (+7 %) et CH4 (6 %) ont augmenté. Pour les HFC, la hausse s’explique par l’interdiction des chlorofluorocarbures (CFC) et des hydrochlorofluorocarbures (HCFC) depuis 2000 et leur substitution par des HFC. Pour le CH4, la hausse est imputable au secteur « eau, déchets et dépollution » et notamment à ses installations de stockage de déchets dangereux et de traitement des eaux usées, l’industrie manufacturière ayant elle réduit ses émissions de 15 %.
Les secteurs industriels qui ont augmenté leur production entre 1993 et 2008 ont réduit leurs émissions de GES excepté les IAA, « eau, déchets et dépollution » et également mais légèrement les « caoutchoucs/plastiques/autres produits minéraux non métalliques ».
Entre 2008 et 2010, alors que les émissions françaises baissent de 3 %, celles de l’industrie diminuent également de 7 %. Dans chaque secteur industriel, il s’agit soit d’une baisse soit de la stabilisation des émissions.
Ces baisses sont cependant relatives : en effet, elles concernent les émissions induites par la production des secteurs sur le territoire. Les émissions liées à leurs importations de matières et produits ne sont notamment pas incluses.
La production de déchets :
Le règlement statistique européen sur les déchets (RSD) distingue les déchets dits « dangereux » (DD) et « non dangereux » (DND). De plus, il inclut les déchets minéraux mais exclut les déchets nucléaires.
En 2010, l’industrie a produit 38 millions de tonnes (Mt) de déchets répartis ainsi : industrie manufacturière, 53,3 % ; « eau/déchets et dépollution », 41,4 % ; industries extractives, 2,7 % et « production d’énergie », 2,6 %. Après le secteur de la construction (73 %), elle est le second producteur de déchets en France avec 11 % (mais environ le triple en excluant les déchets minéraux).
Ses déchets sont d’abord des DND (32 Mt, dont 55 % par l’industrie manufacturière et 39 % par « eau/déchets et dépollution »), soit 52 % du total français auxquels s’ajoutent 6 Mt de DD (45 % par l’industrie manufacturière et 53 % par « eau/déchets et dépollution »), soit 9,4 % du total.
Au sein de l’industrie manufacturière, le « bois/papier/carton » est le premier producteur de déchets en volume. Avec la métallurgie et l’agroalimentaire, il génère 70 % des DND manufacturiers, constitués d’abord de bois, de papier, de métaux ou de mélanges de matériaux divers.
Côté DD manufacturiers, 78 % proviennent des secteurs « chimie/pharmacie » et « métallurgie », 11 % des secteurs « fabrication de machines » et « automobile/autres matériels de transport ». Mais les premiers produisent environ 10 fois plus de tonnes de DD par million d’euros de production que les derniers. Les DD sont à 70 % de nature chimique (solvants usés, solutions acides ou basiques...), des résidus d’opérations thermiques (9,3 %), des huiles usagées (5,8 %), des déchets minéraux (5,7 %) et des boues ordinaires « sèches » résultant du traitement des effluents industriels (3,1 %). En 2010, l’industrie manufacturière a produit 10,3 % de DD de moins qu’en 2006 et 6,4 % de DND de moins qu’en 2008, tandis que sa production en volume baissait de 7 % sur 2006-2010 et 2008-2010.
Les accidents et incidents avec des conséquences environnementales :
Les exploitants des ICPE et des INB doivent déclarer auprès des autorités compétentes les incidents et accidents survenant dans leurs installations, et notamment ceux ayant des conséquences environnementales (le terme générique d’ « accident » est utilisé par la suite).
En 2011, les ICPE industrielles ont déclaré 201 « accidents » ayant des conséquences environnementales, soit 70 % de plus qu’en 1993 et 200 accidents en moyenne par an. Ils sont répartis de la façon suivante : 75 % en industrie manufacturière, 21 % en « eau, déchets et dépollution », 2 % dans les industries extractives et 2 % en production d’énergie (hors centrales nucléaires).
En 2011, 74 % de ces « accidents » ont provoqué une pollution atmosphérique, 25 % une pollution des eaux superficielles, 5 % une contamination des sols et 3 % ont porté atteinte à la faune sauvage. Un accident sur deux est un incendie, 11 % sont des explosions et 95 % sont des rejets de matières incidentels.
En 2011, c’est le secteur « cokéfaction raffinage » qui apparaît le plus sujet aux « accidents » en termes d’occurrence (environ 1 établissement sur 12). Vient ensuite la « chimie/pharmacie », loin devant les autres secteurs manufacturiers. En nombre « d’accidents », c’est cette dernière qui en occasionne le plus au sein de l’industrie manufacturière (un tiers d’entre eux), devant les IAA (15 %), la « métallurgie/ fabrication de produits métalliques » (13 %) ou encore « cokéfaction raffinage » (11 %).
Pour les INB, ces « accidents » sont des « évènements significatifs pour l’environnement » (ESE). Les premiers critères permettant de comptabiliser spécifiquement les ESE dans les centrales nucléaires ont été définis en 2004 mais ont été revus en 2006. Ainsi, depuis 2006, le nombre d’ESE déclarés par les 19 centrales nucléaires est passé de 27 à 86 en 2008 puis s’est stabilisé autour de 100 (115 cependant en 2011).
Les sites et sols pollués par l’industrie :
Fin 2011, en France, 3 079 sites et sols pollués (SSP) ont pour origine l’industrie (soit 83 % de tous les SSP) dont 78 % l’industrie manufacturière, 17,5 % « eau, déchets et dépollution », 3 % les industries extractives et 1,5 % la production d’énergie. Parmi ces 3 079 sites, 15 ont été contaminés par des substances radioactives dont 33 % à cause d’anciennes activités horlogères.
Plus d’un tiers des SSP se trouve en Rhône-Alpes, Nord - Pas-de-Calais et Île-de-France, avec plus de 200 sites pollués dans chacune de ces régions, Sur les 3 079 SSP, 61 % d’entre eux ont déjà été étudiés voire traités mais sont non banalisables, soit plus de 75 % des SSP dans les régions Pays de la Loire, Paca et Languedoc-Roussillon.
12 % d’entre eux sont en cours de travaux et 24 % à l’étude, une pollution étant avérée. Enfin, pour moins de 3 % d’entre eux, l’absence de pollution n’est pas encore confirmée.
82 % des SSP comptés dans l’industrie manufacturière ont été détectés sur des sites pratiquant des activités de mécanique, électricité, traitement de surfaces (à hauteur de 26 %), de métallurgie/fabrication de produits métalliques (25 %), de « chimie/ pharmacie » (19 %), de « bois/papier/carton » (6 %) et de « textile/cuir/peaux » (5,5 %). Moins de 2 % des sites pollués relèvent d’une activité agroalimentaire ou de « cokéfaction/raffinage ».
Les cessations d’activité sont à l’origine de 80 % des SSP inventoriés dans Basol. Ainsi, par exemple, les régions Nord - Pas-de-Calais et Rhône-Alpes, qui ont perdu beaucoup d’établissements dans le secteur du textile depuis 1993, comptabilisent le plus de SSP dans ce domaine.
Les substances chimiques à risque dans l’industrie (application de Reach) :
La prévention des risques chimiques s’appuie sur plusieurs réglementations européennes, notamment le règlement Reach, entré en vigueur le 1er juin 2007. Il concerne l’industrie chimique, mais aussi d’autres secteurs industriels (plasturgie, métallurgie, textile, etc.) qui utilisent des substances (préparations ou mélanges) ou même des entreprises non industrielles (importateurs). L’Echa vise ainsi l’enregistrement de 30 000 substances parmi les plus de 100 000 utilisées en Europe.
Depuis le début de la mise en application du règlement Reach en 2008, fin août 2013, les entreprises industrielles françaises de type « fabricant » ont fait enregistrer 1 057 substances (celles de type « fabricant importateur » 352), soit 14 % (respectivement 4,8 %) des substances enregistrées en Europe. Elles correspondent à 2 060 dossiers, soit 5,5 % de l’ensemble des dossiers enregistrés en Europe.
Sur l’ensemble des substances déclarées par les entreprises françaises, deux tiers émanent de « fabricant » » et 22 % des autres entreprises industrielles, c’est-à-dire des « fabricant importateur ». De plus, la majorité des dossiers français enregistrés par l’Echa émane d’entreprises industrielles (soit 64 %).
Fin août 2013, l’Allemagne arrive en tête des 20 297 dossiers d’entreprises industrielles enregistrés auprès de l’Echa avec 29 % de ces dossiers, puis vient la France et l’Italie (10 % chacune), l’Espagne (8 %) et le Royaume-Uni (7 %). En nombre de substances déclarées par les entreprises industrielles de type « fabricant », l’Allemagne domine largement avec 51 % des substances enregistrées, loin devant la France (22 %), l’Italie (19 %) ou encore le Royaume-Uni (16 %).
En 2012, les différents services d’inspections ont effectué 6 000 contrôles portant sur le respect des obligations et des exigences de Reach. Les « écarts aux règlements » détectés portaient principalement sur la non-conformité de la fiche de données de sécurité devant accompagner les produits classés dangereux, des manquements dans l’étiquetage des produits biocides, et le non respect d’interdictions d’usage de certaines substances.
Les entreprises industrielles impliquées dans les nanotechnologies et les nanomatériaux :
En 2011, d’après la Direction générale de la compétitivité, de l’industrie et des services (DGCIS) environ 150 entreprises industrielles françaises ont une activité dans le domaine des nanotechnologies, soit 53 % de toutes les entreprises actives dans ce domaine contre 36 % dans les services. Sur ces 150 entreprises, près de 40 % d’entre elles sont issues du secteur « fabrication de machines, appareils et équipements divers », 25 % de la « chimie/pharmacie » et 11 % des « caoutchoucs/plastiques/ fabrication autres produits minéraux non métalliques ». Le domaine des nanomatériaux rassemble les deux tiers d’entre elles.
En 2011, entre 140 et 180 entreprises ont été identifiées comme « actives » dans le domaine sensible des nanomatériaux. Environ 32 % d’entre elles sont industrielles et produisent et transforment des nanomatériaux ou fabriquent des produits semi- finis qui intègrent des nanomatériaux. Les autres entreprises industrielles impliquées (moins de 50 %) fabriquent des produits finis qui intègrent soit des nanomatériaux soit des produits semi-finis.
Les nanomatériaux « historiques » constituent l’essentiel des 720 tonnes de nanomatériaux utilisés dans les produits en France : noir de carbone (pneus), carbone (matériels sportifs, hardware), dioxyde de titane (peintures, crème solaire), nano- argent (vêtements, emballages alimentaires), nano-silice (pneus, dentifrice)...
Le marché des nanomateriaux est en pleine expansion mais reste mal connu. L’évaluation des risques potentiels de ces substances sur la santé et l’environnement est encore très incomplète. Selon les conclusions d’experts scientifiques, on ne peut pas exclure l’existence d’effets sanitaires sur l’homme ni de conséquence sur l’environnement à la suite d’une exposition à des nanomatériaux.
Afin de pouvoir mieux estimer les expositions et évaluer les risques spécifiques à ces substances, la France a donc mis en place en 2012 un dispositif réglementaire de déclaration annuelle des substances à l’état nanoparticulaire, applicable dès janvier 2013. L’objectif est notamment de mieux connaître ces substances et leurs usages, de disposer d’une traçabilité des filières d’utilisation, et de collecter les informations disponibles sur leurs propriétés (éco)toxicologiques.
Ainsi, tout fabricant, importateur ou distributeur en France d’une substance à l’état nanoparticulaire, en l’état ou contenue dans un mélange sans y être liée, ou d’un matériau destiné à rejeter cette substance dans des conditions normales ou raisonnablement prévisibles d’utilisation, est tenu à une déclaration annuelle dès lors qu’il produit, importe ou distribue au moins 100 g/an de cette substance.
Pour 2012, la première année d’application, plus de 930 déclarants, dont plus de 90 fournisseurs étrangers, ont réalisé plus de 3 400 déclarations.