Le solaire Thermique et Thermodynamique, 1 filière au gisement considérable mais laissée pour compte…
Alors que la troisième édition du Colloque Solaire Thermodynamique, organisée par le SER, mardi 19 novembre, a été l’occasion de rassembler les industriels du secteur afin d’échanger sur les atouts de la filière française à l’international, a permis ainsi d’adresser des messages forts à destination des pouvoirs publics, dans un contexte de croissance importante du marché international afin d’initier une dynamique à poursuivre notamment avec les quatre projets de recherche et développement retenus dans le cadre de l’Appel à Manifestation d’Intérêt (AMI) lancé par l’ADEME, puis les deux centrales de démonstration qui verront le jour à la suite de l’appel d’offres solaire de 2011.
Les perspectives d’évolution du marché mondial sont, en effet, considérables, comme l’a rappelé Cédric PHILIBERT, de l’Agence Internationale de l’Energie : en 2050, ce ne sont pas moins de 11% de l’électricité mondiale qui pourraient être produite à partir de cette technologie, et nombreux sont les pays qui se sont, d’ores et déjà, engagés dans des programmes ambitieux, comme en ont témoigné les représentants du Ministère turc de l’Energie, et de la MASEN, l’Agence Marocaine pour l’Energie Solaire. Les industriels français disposent de nombreux atouts pour saisir une partie significative de ce marché, à condition toutefois que les conditions soient réunies.
A cette fin, l’ADEME pourrait lancer, prochainement, de nouveaux AMI, dans le cadre du Programme d’Investissements d’Avenir (PIA), pour continuer à soutenir la recherche et l’innovation, qui permettent aux acteurs français de se différencier vis-à-vis de leurs concurrents.
D’autre part, pour que les entreprises françaises puissent disposer de références solides de dimension industrielle et se positionner dans des appels d’offres à l’international, le prochain appel d’offres solaire, qui sera lancé début 2014, devra réserver un volume de 100 MW à la technologie thermodynamique.
Enfin, à l’occasion de ce colloque, les industriels ont exprimé leur souhait que les outils de soutien à l’export (FASEP, RPE, etc.) soient adaptés, et l’accompagnement des acteurs optimisé, pour bâtir une stratégie gagnante qui donnera à la France les moyens d’atteindre des objectifs ambitieux en termes de part de marché au niveau mondial.
Comme l’a rappelé Alexis GAZZO, du cabinet de conseil Ernst&Young, si la France parvient à atteindre 10 % de part de marché mondial, l’industrie solaire thermodynamique pourrait engendrer 1,1 milliard d’euros de retombées économiques pour notre pays sur la période 2013-2030, et plusieurs milliers d’emplois.« Ces objectifs sont tout à fait atteignables, à la condition que les pouvoirs publics poursuivent le financement de la R&D et que nous disposions, sur notre territoire, de réalisations industrielles de référence », a rappelé Roger PUJOL, Président de la Commission Solaire Thermodynamique du SER.
Pour corroborer, les perspectives du marché du Solaire Thermodynamique, une étude établie par Alcimed, société de conseil en innovation et développement de nouveaux marchés, montre que la filière du solaire dispose d’un fort potentiel mais qu’elle est largement sous exploitée en France.
Jusqu’en 2006, le solaire thermique a bénéficié d’une politique favorable pour se développer fortement et représenter près de 200 000m2 de panneaux installés chaque année. Malgré des objectifs ambitieux et une croissance d’un facteur 14 attendue entre 2008 et 2020, le solaire thermique souffre de difficultés majeures sur le marché français : un manque d’un soutien cohérent à la filière, une communication insuffisante et un déficit d’expérience et de formation.
Une filière laissée pour compte par les pouvoirs publics en France :
L’absence d’un plan de soutien national et la priorité donnée à d’autres énergies renouvelables ont abouti à un marché limité à 300 000m2/an, en stagnation depuis 5 ans. En effet, contrairement à nos voisins européens, Allemagne et Autriche en tête, le solaire thermique est le parent pauvre des énergies renouvelables en France. Elle représente ainsi 1,1% des ENR en Allemagne contre 0,3% en France, différence qui tend à s’accentuer malgré un ensoleillement de 20% supérieur en France.
- Un soutien de l’Etat en pointillé à la filière avec la RT 2012 et le Fonds Chaleur Deux cas particuliers illustrent les difficultés et incohérences associées au soutien des pouvoirs publics à la filière : la réglementation thermique 2012 (RT 2012) et le Fonds Chaleur.
L’objectif initial de la RT 2012 était de promouvoir l’innovation et certaines énergies, en particulier le solaire thermique. Finalement, le texte définitif autorise des alternatives telles que les chauffe-eau solaires thermodynamiques, moins performants, moins chers à l’installation et plus faciles à vendre pour les professionnels. Contrairement à l’effet initialement recherché, la RT 2012 privilégie des technologies anciennes et/ou moins performantes, au détriment du solaire thermique.
Le mode de calcul actuel du Fonds Chaleur, prenant en compte uniquement les coûts d’investissements et non de fonctionnement, favorise largement la biomasse au détriment du solaire thermique. Cela est donc particulièrement inadapté à cette technologie, dont la source d’énergie, le soleil, est gratuite.
- Une méconnaissance de cette énergie renouvelable
Une façon d’œuvrer à l’essor du solaire thermique est la communication sur cette énergie, aussi bien auprès du grand public que des professionnels. Aujourd’hui, il existe une profonde méconnaissance des potentialités de la technologie couplée à un amalgame avec le photovoltaïque, qui permet la production d’électricité et non de chaleur. Une part importante des clients et des utilisateurs potentiels associent ainsi solaire et électricité, les modifications de tarif de rachat de l’électricité et les difficultés que rencontrent la filière photovoltaïque limitent d’autant les investissements dans le solaire thermique.
- Un coût élevé en raison d’un déficit de formation et de structuration
Le prix initial des systèmes solaires thermiques, près de 6 000€ pour un chauffe-eau solaire individuel, est jugé excessif par rapport à d’autres énergies (biomasse, chauffe-eau thermodynamique notamment) et comparé à d’autres pays européens. En effet, la France n’a pas développé cette énergie d’un point de vue économique et n’a pas structuré sa chaîne de valeur en conséquence.