Hasardeuse Europe, des ambitions a minima en matière de politiques énergétiques
La Commission Européenne a présenté, le 22 janvier, une feuille de route cadrant des propositions en matière de politiques énergétique et climatique à l’horizon 2030.
Ce cadrage européen propose l’adoption de trois objectifs européens : un objectif contraignant de réduction des gaz à effet de serre de 40% par rapport à 1990, un objectif contraignant de 27% d’énergies renouvelables, et un objectif indicatif avec de nouvelles ambitions en matière d’efficacité énergétique car il faudra attendre la fin de l’année pour une révision de la directive actuelle, qui ne permet d’atteindre, au mieux, que 16,8 % d’économies d’énergie d’ici 2020 (bien en-deçà de l’objectif non-contraignant de 20 %).
La présentation du cadrage pour 2030 visant à remplacer celui de 2009 dit des "trois fois vingt" qui prévoyait que l'Union européenne réduise ses émissions de gaz à effet de serre de 20% d'ici à 2020 par rapport à 1990, et réalise 20% d'économies d'énergie grâce à des gains d'efficacité dans le bâtiment, les transports et les équipements électroménagers, montre que les ambitions de l’Union Européenne restent ternes et représentent des seuils minimaux évitant ainsi la confrontation entre le conformisme et le modernisme.
Concernant le volet climatique, pour atteindre l’objectif de l’UE consistant à réduire d'ici à 2050 les émissions de gaz à effet de serre de 80 à 95 % par rapport aux niveaux de 1990, la commission entend rappeler que l'objectif ambitieux d'une réduction des gaz à effet de serre (GES), doit être d'au moins 40% d'ici à 2030 (par rapport à l'année de référence 1990). Cette non-mesure, puisque elle demeure un seuil minimum pour rester sur la trajectoire d’une réduction des émissions de 80 % d’ici 2050, donc du seuil bas de la fourchette 80 %-95 %, fait suite à une lettre regroupant les ministres de l'environnement français, britannique et italien, et les ministres allemands de l'économie et de l'environnement, soutenue par les ministres de l'environnement des Pays-Bas et de l'Espagne, envoyée à la Commission le 6 janvier dernier. Avec un marché européen de crédits carbone saturé, rajouté à l'annonce de la Commission concernant le surplus de quotas, dont la sur-allocation fausse les réductions effectives de gaz à effet de serre ne font que plomber le panorama climatique.
L'adoption de cet objectif peu ambition de 40% doit servir à l'UE de catalyseur en vue des futures négociations climatiques qui devront déboucher sur un nouvel accord international à Paris en 2015.
Sur le volet en matière d’énergies renouvelables à l’échelle de l’UE, l’objectif de 27 % la part d’EnR en 2030 sera vraisemblablement atteinte. Ce non objectif révèle aussi le manque de volonté pour insuffler une nouvelle industrie qui permettrait à l’UE d’être un leader incontesté dans le domaine des énergies vertes. En effet, il s’avère beaucoup moins contraignant que celui édicté en 2009, issu du "paquet" énergie-climat’’, dit des "trois fois vingt" qui prévoyait une réduction de 20% des émissions de GES, de réaliser 20 % d’économies d’énergie et surtout la part des énergies renouvelables dans la consommation totale d’énergie augmentée à 20 % d’ici à 2020. Première conclusion, l’’’objectif’’ de 27 % est beaucoup moins contraignant qu’il ne le préconise. Cet objectif fixé à 27 % valide le processus croissant de la production des EnR mais confine sa trajectoire montante en raison ou les Etats Membres, s’ils le souhaitent, ne seront pas individuellement comptables des progrès réalisés. Et pourtant, C’est bien l’énergie qui fait loi…. WEO2013, les EnR compteront pour près de la moitié de l'augmentation de production électrique mondiale jusqu'en 2035
S’agissant du volet efficacité énergétique, plus que les deux volets précédents, l’objectif n’est pas encore déterminé. Le rôle de l’efficacité énergétique dans le cadre pour 2030 sera analysé de manière plus approfondie lors d’une révision de la directive sur l’efficacité énergétique, qui devrait être finalisée dans le courant de l’année. Une fois cette révision achevée, la Commission examinera la nécessité d'apporter des modifications à la directive. Les plans énergétiques nationaux des États membres devront également couvrir l’efficacité énergétique.
La conclusion sur les objectifs pour 2030 en matière de climat et d’énergie montre une politique attentiste dont la seule préoccupation est de préserver les forces en présence. Convaincu que la décentralisation de systèmes énergétiques ne répond pas aux critères des grands énergéticiens, la Commission a donc misé sur le statut quo qui révèle la fragilité du continent à se renouveler.
Un signal qui prend une allure de carton rouge en matière de politiques énergétique et climatique efficace, en vue des prochaines négociations de la COP 21….
D’autant que le discours énergétique de la Commission laisse entrevoir une nouvelle voie en faveur du Gaz de schiste, voir prochain article : ca sent le gaz dans l'UE...