Avis défavorable sur le projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes
Le Conseil Scientifique du Patrimoine Naturel et de la Biodiversité (CSPNB), chargé d’une fonction de veille, de conseil, d’alerte et de réflexion prospective sur l’ensemble des questions scientifiques concernant le patrimoine naturel terrestre et aquatique (eaux douces ou marines), qu’il s’agisse de paysages, d’écosystèmes, d’espèces ou de génomes, vient d'émettre un avis relatif à l’impact sur les zones humides du projet d’aéroport de Notre-Dame-des-Landes.
L'avis du CSPNB précise que le projet d’aéroport de Notre-Dame des Landes, à proximité de Nantes, présente une emprise globale au sol d’environ 1400 ha. Il s’agit principalement de zones agricoles, avec une faible part de milieux forestiers. Selon les critères de l’arrêté du 24 juin 2008 relatif à la délimitation des zones humides, une proportion très élevée de ces milieux, soit 98 % sur la base de critères pédologiques et 13 % (mais 80 % pro parte) sur la base de critères de végétation, correspond à des zones humides. Ce sont en grande partie des zones humides de plateau, mais également de hauts de versants, où apparaissent de nombreuses sources. Il s’agit d’habitats de cultures, prairies, forêts ou landes humides, et également de sources, ruisseaux et mares, qui abritent des cortèges floristiques et faunistiques remarquables, présentant une grande valeur patrimoniale.
Dans son avis, le CSPNB rajoute que ces habitats résultent de la combinaison de facteurs naturels (édapho-climatiques) et de pratiques agricoles pluriséculaires, qui avaient conduit à la mise en place d’un paysage de bocage. Comme il date d’une cinquantaine d’années, le projet d’aéroport a permis de préserver ces milieux de l’intensification agricole qui a conduit à un appauvrissement très net de la biodiversité dans les territoires voisins. C’est cette situation particulière qui détermine toute l’originalité (voire l’unicité) de cette zone humide dans le contexte de l’Ouest de la France.
Ensuite, les conclusions de l'avis observe que parmi les habitats concernés par le projet, certains d’entre eux (sources et suintements d’eau avec des habitats de vases, marais, prairies et landes) se caractérisent par leur caractère oligotrophe, lié à des eaux de source de grande pureté, en particulier au niveau des teneurs en éléments azotés. Les données disponibles au niveau international en écologie de la compensation et de la restauration montrent que les bilans de telles opérations de compensation sur des zones humides restent très insatisfaisants (Robb, 2002 ; Moilanen et al., 2009) et les restaurations des fonctions écologiques seulement très partielles (Moreno-Mateos et al., 2012)
Le comité d’experts a donc estimé que la compensation à la destruction de ces zones humides serait très problématique dans le contexte actuel d’intensification agricole et de changement climatique, et en particulier que les propositions du dossier ne permettraient pas d’atteindre les critères fixés par le code de l’environnement et les dispositions du SDAGE de Loire-Bretagne : « Dès lors que la mise en œuvre d’un projet conduit, sans alternative avérée, à la disparition de zones humides, les mesures compensatoires proposées par le maître d’ouvrage doivent prévoir, dans le même bassin versant, la recréation ou la restauration de zones humides équivalentes sur le plan fonctionnel et de la qualité de la biodiversité ».
Par ailleurs, les agriculteurs eux-mêmes sont très réservés par rapport à des mesures compensatoires d’extensification de pratiques agricoles dans les territoires voisins, qu’ils considèreraient comme une « double peine » par rapport à leur activité. La mise en œuvre effective de telles mesures compensatoires par la profession agricole serait donc loin d’être assurée.
Sur la base de ces informations, le CSPNB considère que ce projet aurait un impact très important sur des agro-écosystèmes de zones humides relictuels, en voie de disparition sur l’ensemble de l’Europe de l’Ouest, précieux par leurs fonctions écologiques et leur richesse en biodiversité, dont les possibilités de compensation à l’identique apparaissent très restreintes. Il émet donc un avis défavorable à la destruction de cet ensemble très original par la réalisation de l’aéroport de NotreDame-des-Landes.
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