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Indemnité kilométrique pour les vélos, de nombreux points positifs, mais de nombreuses réserves sur la poursuite de l’expérimentation

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Indemnité kilométrique pour les vélos, de nombreux points positifs, mais de nombreuses réserves sur la poursuite de l’expérimentation

Indemnité kilométrique pour les vélos, de nombreux points positifs, mais de nombreuses réserves sur la poursuite de l’expérimentation

Le ministre des Transports a présenté, dans le cadre de son plan d’actions en faveur des mobilités actives, un projet d’indemnité kilométrique (IK) pour les salariés se rendant à vélo au travail. En 2013, la coordination interministérielle pour le développement de l’usage du vélo (CIDUV) a réalisé une étude sur les enjeux et les impacts d’une telle mesure. Cette étude a démontré son intérêt économique mais aussi son coût immédiat puisqu’il est proposé d’exonérer de cotisations sociales et fiscales les sommes ainsi versées. Dans une période de restriction budgétaire le gouvernement a jugé utile de vérifier préalablement à l’adoption éventuelle de cette mesure les hypothèses d’augmentation de la part modale du vélo qui avaient été prises en compte.

Pour mesurer effectivement ce report, la Coordination et l’ADEME ont lancé en juin 2014 une expérimentation avec 18 entreprises volontaires. Cette expérimentation a pris fin le 30 Novembre 2014. Ces six premiers mois ont permis de faire un certain nombre de constats et de préciser les enjeux. Ces constats et ces enjeux font l’objet de la présente note de synthèse, ainsi que d’un rapport plus complet réalisé en parallèle et qui sera publié au cours du premier trimestre 2015.

Dans le cadre de cette expérimentation, un système de suivi a été mis en place visant à évaluer :

· les impacts sur la pratique du vélo et les effets sur la part modale,

· les impacts sur la santé au travail,

· les conditions de mise en œuvre de l’indemnité kilométrique vélo (IKV) au sein des entreprises.

La réalisation de l’expérimentation a porté sur plus de 10 000 salariés au total. La moitié de l’échantillon d’enquête est représenté par MMA, implanté sur les sites du Mans, Lyon, Strasbourg et Chartres. Les autres entreprises sont de taille variée (allant de 10 à plus de 200 salariés), et plutôt tournées vers des activités du secteur tertiaire. Les entreprises sont assez bien réparties sur le territoire et sur des secteurs d’activités assez diversifiés (bien que peu d’industries). Par ailleurs, la part modale de départ reste représentative de la moyenne nationale avec une part modale vélo de l’ordre de 2,1%.

L’expérimentation en interne à chaque structure a démarré entre le 1er Juin et le 1er Juillet 2014. Les évaluations portent jusqu’à la date du 30/11/2014.

Les impacts sur la part modale

Nouveaux cyclistes et usage du vélo

Pour estimer la part modale, il convient dans un premier temps de distinguer l’évolution du nombre de cyclistes et l’usage réel du mode vélo (fréquence d’utilisation).

La seconde enquête réalisée permet de conclure sur une multiplication par plus de deux du nombre d’usagers vélo, en passant de 200 personnes déclarées comme ayant une pratique régulière avant la mise en place de l’IK à 419 personnes lors de l’expérimentation.. Ces 419 personnes prennent en compte les 380 adhérents à l’IKV et les personnes déjà cyclistes mais ne souhaitant ou ne pouvant pas adhérer à l’expérimentation (39 personnes estimées).

Par ailleurs, concernant l’usage du mode vélo on peut discriminer trois grands types de pratiques :

- les cyclistes réguliers avant IKV ayant adhéré : ils ont un niveau de pratique régulier de l’ordre de 18 jours par mois,

- les cyclistes réguliers avant IKV n’ayant pas choisi de participer : La pratique reste élevée avec en moyenne 16 jours de pratique mensuelle,

- les nouveaux cyclistes : il s’agit d’une nouvelle pratique qui reste moins régulière (de l’ordre de 11 jours par mois).

En prenant en compte l’usage réel, on peut plutôt tabler sur une augmentation de la part modale de l’ordre de 70%, comme le montre le tableau ci-dessous.

Indemnité kilométrique pour les vélos, de nombreux points positifs, mais de nombreuses réserves sur la poursuite de l’expérimentation

Par ailleurs, Environ 5 à 8% des adhérents disent avoir augmenté leurs pratiques indépendamment de l’IKV (effet de saisonnalité) et 13% d’entre eux ont arrêté l’expérimentation (au moins provisoirement). Une hypothèse plus réaliste serait donc une augmentation de la part modale de l’ordre de 50%.

Il convient de noter qu’il s’agit d’une estimation de la part modale vélo sur des trajets domicile-travail. Les résultats de la seconde enquête mettent également en avant une évolution de la pratique sur les autres motifs de déplacements, puisque 30% des nouveaux cyclistes et 15% des anciens déclarent utiliser plus souvent leur vélo pour les autres motifs de déplacements.

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Provenance des nouveaux cyclistes

Sur les 550 personnes qui s’étaient déclarées intéressées, 380 ont choisi de tenter l’expérience. Leur profil de répartition modale (mode de déplacement utilisé avant) est représenté sur le graphique ci-dessous.

L’essentiel des nouveaux cyclistes provient des transports collectifs (de l’ordre de 54%). Le second mode concerné est la voiture particulière (VP), avec 19% des nouveaux cyclistes qui se déplaçaient avant en voiture. Pour autant, l’impact sur l’autosolisme reste faible (5%), puisque l’essentiel de la provenance des nouveaux cyclistes depuis le mode VP est le covoiturage.

A première vue, ce constat montre un faible potentiel de l’IK Vélo en termes de report modal depuis la voiture. Pour autant, la première enquête a mis en avant un grand nombre d’automobilistes intéressés par l’IK (200 autosolistes sur 550 personnes intéressées). On peut donc considérer que les leviers du changement en faveur d’un report depuis la VP existent via l’intérêt montré lors de la première enquête, mais que la période d’expérimentation reste trop courte et l’intérêt financier insuffisant pour pouvoir réellement franchir le pas pour de nombreux automobilistes. On peut noter cependant que 9% des nouveaux cyclistes étaient des utilisateurs de 2 roues motorisées.

La seconde enquête montre par ailleurs que l’impact sur la pratique est fortement différencié en fonction du milieu urbain, notamment en lien avec l’attractivité du réseau TC :

· en Ile de France, la mise en place de l’IK a permis une augmentation de la pratique de l’ordre de 5%,

· à l’inverse, sur les pôles urbains des agglomérations supérieures à 100 000 habitants, la part modale a été multipliée par 2

Sur les secteurs moins attractifs en termes de desserte en transports collectifs, les salariés peuvent plus facilement renoncer au remboursement de leur abonnement TC.

Les six premiers mois d’expérience mettent en avant un effet largement positif avec une multiplication par 2 du nombre d’usagers du vélo et une augmentation de la part modale de l’ordre de 50%.

Les nouveaux cyclistes ont tendance à avoir une pratique moins régulière que les cyclistes déjà réguliers (11 fois par semaine contre 18) mais sur des distances plus longues

Le report modal depuis les TC est très prononcé, excepté sur les réseaux TC les plus attractifs.

1/3 des nouveaux cyclistes ont également augmenté leur pratique du vélo pour d’autres motifs de déplacement.

Par ailleurs, le vivier de report modal depuis la voiture exprimé lors de la première enquête n’a pas pu encore s’exprimer pleinement à l’échelle de cette expérimentation.

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Réceptivité de la démarche

La mise en place de l’IKV renforce le profil type d’usagers du vélo au sein de l’échantillon :

· une clientèle plutôt masculine chez les nouveaux cyclistes : 60% d’hommes et 40% de femmes,

· sur des tranches d’âges entre 35 et 55 ans.

Les freins à l’usage

Au-delà de ces différences par genre et tranche d’âge, la seconde enquête fait ressortir également des attentes différentes selon les catégories d’usagers.

Parmi les freins à l’usage, la météo et les impacts sur le temps de travail jouent fortement sur le choix d’utilisation du vélo auprès de l’ensemble des cyclistes. Pour autant, alors que c’est l’état du vélo qui arrive en troisième raison d’utilisation ou non du vélo chez les anciens cyclistes, c’est le fait d’atteindre le plafond de l’IK qui arrive en troisième position chez les nouveaux cyclistes. L’incitation financière est donc un levier fort d’utilisation du vélo pour attirer de nouveaux usagers qui ne sont pas tous des sympathisants du vélo.

Le caractère financier incitatif se remarque également dans les distances parcourues. La distance moyenne parcourue par déplacement domicile – travail est de l’ordre de 30% à 50% plus importante pour les adhérents à l’IK par rapport aux données de l’Enquête Nationale Transports et Déplacements (ENTD) de 2008 qui affichent une distance moyenne de l’ordre de 3,6 km par déplacement

Le niveau d’utilisation du vélo moins élevé pour les nouveaux cyclistes est compensé par une distance moyenne parcourue assez longue permettant d’atteindre une IKV mensuelle de l’ordre de 30 euros net (soit un montant proche du plafond mensuel fixé par de nombreuses entreprises).

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Les bienfaits identifiés

Là encore, sur les avantages identifiés du vélo, les visions divergent entre nouveaux et anciens cyclistes. Les anciens cyclistes mettent en avant les avantages habituellement reconnus du vélo : le côté pratique, la rapidité et les économies financières réalisées. A l‘inverse pour les nouveaux usagers, les aspects sanitaires ressortent fortement. Dans plus de 40% des cas, le vélo est considéré comme bon pour la santé et dans 15% des cas un aspect détente est mis en avant.

L’IK vélo permet d’amener au vélo des personnes qui ne s’y seraient pas forcément mises de manière spontanée : le côté pratique et rapide de ce mode est peu mis en avant par les nouveaux cyclistes et ils effectuent des trajets plutôt longs. L’incitation financière a une vraie capacité à lever les obstacles auxquels font face les usagers du vélo et à élargir le domaine de pertinence de ce mode.

L’aspect financier constitue un vrai effet levier pour capter des nouveaux usagers, y compris parmi ceux n’étant pas convaincus des avantages du vélo, et pour élargir le domaine de pertinence du vélo.

Les bénéfices en termes de santé sont largement mis en avant parmi les nouveaux cyclistes.

Les impacts sur la santé

La mesure des impacts santé se base sur une analyse inspirée par les tests d’évaluation de l’activité physique de Ricci et Gagnon de l’université de Montréal. Cet outil de mesure a notamment inspiré le dispositif national « Bouger sur prescription ». Dans le cadre de l’évaluation de l’IK Vélo, ce dispositif a été adapté sous forme de questions afin d’avoir une première approche de l’impact avant / après sur l’activité physique des adhérents.

Premièrement, la mise en place de l’indemnité kilométrique permet de réduire de moitié le nombre de personnes ayant une activité physique insuffisante parmi les nouveaux usagers du vélo. Autrement dit, l’expérimentation a permis de remettre en selle des personnes en carence d’activité physique, ce qui contribue fortement à la réduction du risque de maladie.

Par ailleurs, la mise en place de l’IK Vélo permet aussi de nombreux gains d’activités supplémentaires sur l’ensemble du panel. Ainsi, plus de 80% de l’échantillon enregistre une activité physique supplémentaire, y compris chez les anciens cyclistes puisque le dispositif d’indemnisation sur les trajets domicile travail a également eu un impact sur l’augmentation de la pratique de vélo pour les autres motifs. En effet, d’après la seconde enquête 30% des nouveaux cyclistes et 15% des anciens ont augmenté leur pratique en dehors des déplacements domicile travail.

Le nombre d’adhérents en situation de carence d’activité physique a été divisé par 2.

Par ailleurs, l’augmentation de la pratique pour les autres motifs permet d’accroître le niveau d’activité physique pour 80% des adhérents.

Indemnité kilométrique pour les vélos, de nombreux points positifs, mais de nombreuses réserves sur la poursuite de l’expérimentation

En conclusion, plusieurs éléments de synthèse peuvent être dégagés. Parmi les points positifs, il convient de noter l’effet d’entraînement sur la pratique par l’approche financière. La mise en place de l’expérimentation sur six mois a permis de doubler le nombre d’usagers du vélo et d’augmenter de 50% à 70% la part modale du vélo. Les nouveaux cyclistes ne sont à priori pas seulement des sympathisants du vélo au regard des points négatifs mis en avant, ainsi que des avantages exposés différents de ceux évoqués par les cyclistes déjà réguliers. Ils effectuent des trajets assez longs en moyenne.

Enfin, le dernier avantage réside dans l’impact largement positif sur la santé.

Quelques points d’interrogation restent malgré tout à souligner. L’efficacité du report modal depuis la voiture particulière reste à démontrer. En effet, alors que la première enquête évoquait un nombre important d’autosolistes intéressés par l’IK, ces derniers n’ont pas été retrouvés parmi les adhérents.

Par ailleurs, l’IK qui est une mesure spécifique au vélo, entre en concurrence avec le système de remboursement des abonnements TC. En Ile de France et sur les réseaux urbains attractifs, y compris pour un ensemble d’autres motifs de déplacements, le renoncement à l’abonnement TC au profit d’une indemnité kilométrique vélo est peu intéressant, bien que le plafond fixé par les entreprises corresponde, dans tous les cas, a minima à 50% de l’abonnement TC de ces réseaux.

Côté entreprises volontaires, elles précisent qu’aucun abus n’a été recensé dans les déclarations, que ce soit dans le nombre de journées de pratiques ou sur les distances réalisées. En revanche, de nombreuses structures ont souligné des lourdeurs administratives dans les processus d’attribution de la prime puisqu’elle devait être intégrée au système de rémunération de chaque salarié adhérent. Une exonération des cotisations sociales et fiscales et un versement au même titre que pour le soutien à l’abonnement transport permettrait de réduire en partie ces contraintes auprès des structures. Au-delà des aspects administratifs, de nombreuses entreprises émettent des réserves sur la poursuite de l’expérimentation au regard du poids financier de la mesure (40 à 43 centimes / km en intégrant les charges).


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