Réguler les dispositifs d’ANC pour associer performance technique, maîtrise des coûts et liberté de la concurrence.
Une mission commandée les cabinets du ministère de l'écologie, du développement durable et de l'énergie et du ministère des affaires sociales et de la santé et menée par le Conseil général de l’environnement et du développement durable (CGEDD) et l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a permis d’évaluer les procédures d'agrément des dispositifs de traitement en assainissement non collectif ainsi que les prescriptions techniques pour une capacité inférieure ou égale à 20 EH. Il en ressort que le dispositif mis en place par les arrêtés de 2012 sont en grande partie bien compris mais ne sont pas parfaitement maîtrisé.
Les dispositifs d'assainissement non collectif (ANC) sont des installations de traitement des eaux domestiques qu'il appartient aux particuliers de mettre en œuvre lorsque leur habitation n'est pas desservie par un réseau public d'assainissement. La mission a pu observer qu’au côté des filières traditionnelles (fosses septiques toutes eaux avec épandage-traitement par le sol), le rapide développement de nouvelles filières (filtres plantés de roseaux, filtres compacts, cultures libres, cultures fixées immergées) a conduit les pouvoirs publics à soumettre les dispositifs relevant de ces dernières à un agrément garantissant un niveau adéquat de protection de l'environnement, de la santé publique et du consommateur.
Cet agrément qui est préalablement requis tant pour l’implantation de matériel neuf dans le cadre d’une première installation que pour la réhabilitation des dispositifs existants, est délivré au terme d’une évaluation de l’aptitude du produit à traiter des effluents pollués, par essais sur plates-formes. Ces essais sont réalisés par des organismes dits notifiés (ON) : le Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB) et le Centre d’Étude et de Recherche de l'Industrie du Béton (CERIB). Le protocole d’essai majoritairement mis en œuvre est celui adapté du marquage CE prévu par le règlement 305/2011 applicable aux produits de construction.
Toutefois, la mission note que si l'examen des sources d’information permet d’écarter le risque d’un impact majeur sur la qualité des masses d'eau à l'exception de certains sites sensibles, notamment à proximité de zones de baignade ou de zones de captage, en revanche, malgré les nombreuses innovations techniques intervenues dans la conception de ces dispositifs compacts, les risques d’insalubrité liés au rejet de substances potentiellement dangereuses dans le milieu naturel restent élevés à proximité immédiate du rejet, notamment quand ces rejets sont superficiels et non dans le sol.
Elle précise aussi qu’ils sont également susceptibles d’occasionner des troubles de voisinage en raison de nuisances olfactives.
La mission a estimé que dans le contexte d’un parc français de l’assainissement non collectif représentant près de cinq millions d’installations, plusieurs dizaines de milliers de dispositifs « agréés » ont d’ores-et-déjà été installés relevant de plus de 300 modèles ayant obtenu l’agrément. Au-delà des aspects sanitaires et environnementaux, la mission explique que ce marché, dont le développement important favorise une activité économique créatrice d'emplois, mérite d’être régulé afin de conjuguer performance technique, maîtrise des coûts et liberté de la concurrence.
Elle rajoute qu’aux fins de répondre à l’ensemble de ces enjeux, il importe prioritairement de stabiliser un cadre réglementaire encore récent, une réforme profonde des arrêtés du 7 septembre 2009 et 27 avril 2012 n’apparaissant ni opportune ni nécessaire. La mission recommande toutefois trois évolutions réglementaires : la prescription d’une capacité de stockage minimale pour les dispositifs ; l'obligation d’un contrat d’entretien- maintenance sur la base d'un dossier-type avec la tenue d'un registre des opérations effectuées ; une coordination et une formalisation des procédures imposées aux industriels.
A plus longue échéance, la France devra promouvoir au sein des organismes communautaires de normalisation une évolution du protocole de marquage CE. Dans cette attente, elle est juridiquement fondée à imposer des restrictions à la circulation de produits susceptibles d’avoir un impact sanitaire et environnemental.
La mission a pu mesurer à l’occasion de ses travaux l’insuffisance des données disponibles pour l’ANC, et recommande d’accélérer la constitution d’une base nationale de connaissance du parc français, qui permette d’objectiver les diagnostics et de légitimer les actions menées par la puissance publique.
S’agissant de la gouvernance, elle a identifié trois axes de priorité : la mise en place d’un suivi in situ labellisé au plan national et conduit selon un protocole harmonisé ; la pérennisation du « Plan d’Action National ANC » (PANANC) et l’organisation, en son sein, d’une réflexion sur les mesures propres à structurer et sécuriser la filière de l’ANC, notamment par la définition d’un cadre contractuel clarifiant le partage des responsabilités entre les différents acteurs; la mobilisation des échelons du département et du bassin et l’inscription de l’ANC dans le cadre plus large de la politique locale d’urbanisme.
La traduction opérationnelle des recommandations formulées dans ce rapport devra être conduite par les services de la direction de l’eau et de la biodiversité en lien avec les services de la direction générale de la santé, à l’issue d’un processus de concertation au sein des instances du PANANC qui devra veiller à bien prendre en compte les travaux du comité consultatif de l’ANC.
Liste des recommandations
Les évolutions souhaitables du dispositif d’agrément
Recommandation 1: stabiliser le cadre réglementaire définissant les procédures de contrôle en maintenant l’état du droit tel qu’il résulte des dernières modifications de l’arrêté du 27 avril 2012
Recommandation 2 : introduire dans l’arrêté du 7 septembre 2009 une disposition imposant la signature d’un contrat d’entretien-maintenance de tout dispositif d’ANC en filière agréée en installation neuve ou en réhabilitation, ou dont le contrôle exercé par le SPANC aurait révélé un dysfonctionnement. Un agrément devra être créé en concertation avec l’inter-profession et un contrat type mis en ligne sur le site interministériel ANC afin d’éviter toute perspective de marché captif
Recommandation 3 : introduire dans l’arrêté du 7 septembre 2009 une prescription technique applicable aux ANC en filières agréées, fixant un volume utile minimum de 3 m3 pour le traitement primaire (prétraitement) et le stockage de boues
Recommandation 4 : promouvoir auprès de la Commission européenne et des pays partenaires une modification de la norme harmonisée européenne afin de faire converger le protocole d’essai « marquage CE » vers le protocole complet imposé par la réglementation française
Recommandation 5: encadrer et harmoniser le fonctionnement des organismes notifiés français par la production de documents techniques communs (spécifiant fréquence de vidange, conditions d’usage intermittent, modalités d’évacuation des eaux traitées, calcul du coût sur 15 ans) et assurer une meilleure transparence tarifaire
La gouvernance nationale doit prendre en compte toutes les questions qui se posent au fonctionnement du régime d’agrément
Recommandation 6: accélérer la constitution d’une base de données nationale de connaissance du parc des installations d’ANC français et des risques sanitaires et environnementaux associés
Recommandation 7 : mettre en place un suivi in situ labellisé au plan national, mis en œuvre par des établissements scientifiques et techniques publics, suivant un protocole harmonisé et un échantillonnage d’installations représentatif des différents bassins et procédés techniques
Recommandation 8 : conforter le volet industriel du PANANC par un meilleur relais, en son sein, des travaux du Comité consultatif de l’ANC, et une plus étroite association aux processus décisionnels
Recommandation 9 : organiser, au sein du PANANC, une réflexion sur les mesures propres à structurer et sécuriser la filière de l’ANC, par la définition d’un cadre contractuel clarifiant le partage des responsabilités entre le particulier comme maître d’ouvrage et les entreprises et structures intervenantes
Une gouvernance prenant en compte un dispositif national à application locale et décentralisée
Recommandation 10 : mobiliser les échelons intermédiaires du département et du bassin et engager une réflexion sur l’intégration de l’ANC dans la politique locale d’urbanisme
Recommandation 11 : expertiser la délimitation des « zones à enjeu sanitaire et environnemental » au sens de l’arrêté du 27 avril 2012 et inventorier les mesures réglementaires prises par les autorités locales
AA2 - ASSAINISSEMENT - Le blog de habitat-durable
ASSAINISSEMENT Vue du ciel, à des milliers de kilomètres, elle est toute bleue... Recouverte aux trois quarts d'eau, la Terre semble à l'abri de la soif. Pourtant, l'eau demeure une ressource ra...