Une baisse de 1°C entraine une baisse de 7% de la consommation…
L’ étude menée par le Service de l’Économie, de l’Évaluation et de l’Intégration du Développement Durable (SEEIDD) du Commissariat Général au Développement Durable (CGDD) intitulée « Les déterminants de la température de chauffage adoptée par les ménages » montre qu’avec 66 % des consommations énergétiques du parc résidentiel, le chauffage est l’usage le plus consommateur d’énergie dans ce secteur et représente donc un levier important pour les économies d’énergie. Pour un logement donné, la température des logements représente une bonne approximation des niveaux de consommations énergétiques, sachant qu’une baisse de 1°C induit une baisse de 7 % de la consommation,
L’étude se porte sur le fait que le secteur du bâtiment soit le premier consommateur d’énergie en France avec plus de 40 % de l’énergie finale nationale consommée, le parc résidentiel, qui représente les deux tiers de l’ensemble des bâtiments du pays, présente un enjeu majeur pour permettre à la France d’atteindre les objectifs ambitieux qu’elle s’est fixés, notamment la réduction de 38 % d’ici 2020 de la consommation énergétique du bâti existant.
Comprendre les déterminants des températures adoptées par les ménages permettrait d’identifier les leviers d’actions pour réduire les consommations énergétiques liées au chauffage. Cela semble d’autant plus pertinent qu’un décret paru en 1979 recommande une température de 19°C dans les logements. Or, les températures dans les logements auraient tendance à être supérieures à cette valeur recommandée.
Cette note présente les travaux économétriques réalisés pour expliquer les températures de chauffage adoptées par les ménages dans leurs logements (chambre, cuisine et séjour) sur la base d’une enquête réalisée par l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI).
Les travaux de cette étude se sont appuyés sur une enquête menée dans le cadre de la campagne nationale logements par l’Observatoire de la Qualité de l’Air Intérieur (OQAI), entre le 1er octobre 2003 et le 21 décembre 2005 dont l’objectif a été de dresser un état de la qualité de l’air intérieur du parc de logements français. L’enquête avait révélée que la température était un facteur explicatif potentiel de certaines situations de pollution. Les données ont été collectées auprès d’un échantillon de 567 ménages en France métropolitaine. L’étude portant sur les températures de chauffage adoptées par les ménages, seuls les logements enquêtés durant la période de chauffe, à savoir du mois d’octobre au mois d’avril, ont été pris en compte. L’étude s’est donc appuyé sur un échantillon de 373 logements.
Les températures ont été enregistrées dans les trois pièces à vivre du logement : la chambre, la cuisine et le séjour. Tous les logements ne possédaient pas toujours une chambre, une cuisine et un séjour, d’où les effectifs différents pour chaque pièce. Les températures enregistrées ont été relevées toutes les 10 minutes pendant la semaine d’enquête.
Comme résumé dans le tableau, la température moyenne est légèrement supérieure à 19°C dans la chambre et la cuisine. Elle est supérieure de plus de 1,5°C dans le séjour. Les températures maximales sont élevées, à plus de 25°C.
La température la plus souvent enregistrée diffère d’une pièce à l’autre. Dans la cuisine, le mode de température se situe à 19°C avec 19 % des ménages. La moitié des ménages fixe une température supérieure à 19°C dans cette pièce. Dans le séjour, le mode se trouve à 21°C avec près de 30 % des ménages. 75 % des ménages chauffent à plus de 19°C dans le séjour. Ils sont un peu plus de 50 % à se chauffer au dessus de 19°C dans la chambre. Le fait que les ménages passent habituellement plus de temps dans le séjour que dans la chambre ou la cuisine peut expliquer ces écarts.
Températures adoptées suivant les caractéristiques des ménages :
55 % des ménages chauffent leur chambre à une température supérieure à 19°C. La moitié chauffe leur cuisine au dessus de ce niveau tandis qu’ils sont 75 % à se chauffer à plus de 19°C dans le séjour.
Excepté dans la chambre, les femmes ont tendance à davantage chauffer la cuisine et le séjour par rapport aux hommes. Elles sont respectivement 78 % et 65 % à se chauffer au dessus de 19°C dans la cuisine et le séjour contre 45 % et 55 % des hommes.
Plus le ménage est aisé, plus la température de son logement a tendance à être élevée. Dans la cuisine, si 60 % des ménages ayant un revenu mensuel inférieur à 1 500 € chauffent à moins de 20°C, ils ne sont plus que 45 % lorsque le revenu mensuel du ménage est de plus de 3 200 €. Le même effet revenu est enregistré dans la chambre et le séjour.
Il ne semble pas y avoir de relation monotone entre l’âge et la température. Dans la chambre et le séjour, les personnes de plus de 77 ans chauffent en grande majorité (respectivement 82 % et 95 %) à plus de 19°C. Ce sont les classes d’âge comprises entre 48 et 67 ans qui chauffent le moins souvent au dessus de ce niveau de température. Chaque tranche d’âge peut avoir des raisons différentes de se chauffer à plus de 19°C. Les jeunes parce qu’ils passent beaucoup de temps dans leurs chambres, les personnes âgées car elles sont plus sensibles au froid, et les tranches d’âge restantes peuvent se chauffer plus si des enfants sont présents au sein du ménage.
Températures adoptées suivant les caractéristiques des logements :
Pour chaque pièce, la température moyenne des logements construits après 1948 est supérieure à celle des logements construits antérieurement. Les températures des logements construits après les premières réglementations thermiques de 1974 ont tendance à être légèrement inférieures à celle des logements construits entre 1949 et 1974. Cette tendance est principalement enregistrée dans la chambre et la cuisine. Dans le séjour, les niveaux de température sont quasi identiques. Dans le séjour, 84 % des ménages qui ont un logement construit après 1974 chauffent à plus de 19°C. Ils sont respectivement 63 % et 57 % dans la cuisine et dans la chambre. Cette part est moins importante dans les logements construits antérieurement. Dans les logements construits entre 1949 et 1974, ils sont 73 % à se chauffer au dessus de 19°C dans le séjour. Enfin, dans les logements construits avant 1949, ils sont respectivement 44 %, 33 % et 69 % à se chauffer à plus de 19°C dans la chambre, la cuisine et le séjour.
La température de chauffage adoptée par les ménages varie également suivant l’équipement de chauffage. En présence d’un chauffage collectif, le coût de la consommation énergétique est souvent supporté par l’ensemble de la copropriété, ce qui n’incite pas à limiter la température du logement, à la différence d’un logement équipé d’un chauffage individuel, pour lequel le ménage est facturé en fonction de ses propres consommations. Dans chaque pièce, plus de 90 % des ménages possédant un chauffage collectif chauffent à plus de 19°C. Ces pourcentages sont compris entre 30 % et 70 % lorsqu’un système de chauffage individuel est installé. Par ailleurs, près de 70 % des ménages ne possédant pas de chauffage central chauffent à une température inférieure à 19°C dans leurs chambres.
L’impact de travaux de rénovation sur le niveau de température est relativement faible et non homogène suivant la pièce étudiée. Dans la chambre et le séjour, la température diminue légèrement lorsque des travaux d’isolation sont réalisés : -0,2°C dans la chambre et -0,6°C dans le séjour pour atteindre une moyenne respective de 19,4°C et 20,1°C lorsque des travaux d’isolation ont été réalisés. Dans la cuisine, contrairement à la chambre et au séjour, la température augmente légèrement lorsque des travaux d’isolation ont été réalisés : +0,4°C pour atteindre une moyenne de 19,9°C lorsque des travaux d’isolation ont été réalisés.
Dans ses conclusions, l’étude mentionne que mettre en évidence les comportements des ménages permet de proposer des solutions adaptées afin d’améliorer le confort, mais aussi de diminuer les consommations énergétiques dans les logements.
L’étude précise aussi que les travaux économétriques réalisés ne permettent pas toujours de confirmer la significativité des déterminants des niveaux de température retenus dans la revue bibliographique.
La date de construction, lorsqu’elle est significative, confirme ce qui est affirmé dans d’autres études : la température est plus élevée dans les logements les plus récents. Quant à l’âge, les régressions ont tendance à confirmer que la température est plus élevée chez les personnes plus âgées. Par ailleurs, rien ne permet de confirmer que les jeunes vivent également dans des logements plus chauffés contrairement à ce qui est suggéré dans la littérature. Le type de chauffage semble principalement jouer un rôle dans le séjour et dans la chambre. La température y est plus élevée lorsque le logement est équipé d’un chauffage collectif. Il n’est pas significatif dans la cuisine.
Suivant les estimations, le type de logement (individuel ou collectif) n’a pas d’impact sur la température. Si pour certains auteurs l’isolation joue un rôle sur les niveaux de température, cette hypothèse n’est pas confirmée avec les travaux économétriques réalisés à partir de l’enquête OQAI. La zone climatique où se situe le logement semble être un déterminant significatif même si cette variable est rarement citée dans la littérature. La température dans les chambres est plus élevée dans les régions à climat doux. En revanche, les coefficients ne sont pas du même signe dans la cuisine. Quant au revenu, cette variable est rarement significative. Dans le cas où elle est significative, l’effet est très vite plafonné ce qui semble en opposition avec nombre d’auteurs. Enfin, le nombre de personnes dans le ménage, rarement cité, est parfois significatif en particulier dans la cuisine où, plus le ménage est grand, plus la température y est élevée.