Baisse de 30% des débits du Rhône d’ici 40 ans
Lors d'un rassemblement de quelques 200 spécialistes de l’eau et des rivières, et des représentants des collectivités et de l’Etat autour du fleuve Rhône organisé par l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse le 18 novembre dernier, une étude a été rendue publique sur la quantité d’eau du fleuve à l’étiage montrant ainsi que le Rhône n’est pas inépuisable à long terme. L’agence en a profité également pour mentionner une publication, un guide écologique qui indique où et comment agir pour amener la qualité écologique du Rhône à un niveau élevé.
Le Rhône, fortement aménagé, est le fleuve français qui bénéficie du plus gros effort pour sa restauration écologique dans le cadre du Plan Rhône (135 M€). L’agence de l’eau a commandé des études scientifiques pour dimensionner les travaux qui permettront au Rhône de redevenir un fleuve vivant et attractif. Ce sont ces travaux qui sont présentés dans cette journée annuelle « eau et connaissance ».
• Baisse de 30% des débits du Rhône d’ici 40 ans
Le Rhône, premier fleuve français par son débit, est capable de satisfaire les utilisations qui en sont faites aujourd’hui. Jusqu’à présent, il n’y a pas eu de crise majeure pour l’alimentation en eau potable, l’approvisionnement en électricité du pays ou pour la survie des poissons dans le fleuve.
Pour autant, en mai 2011, le Rhône a connu une crise après que la Suisse a décidé de diminuer de moitié les débits sortant du lac Léman pour remonter les niveaux du lac et maintenir ses activités touristiques. Cet épisode prouve que la France et la Suisse doivent se donner des règles d’information réciproque et de gestion commune des débits d’eau qui entrent en France. L’étude GouvRhône, confiée à l’université de Genève, donnera au printemps 2015 des propositions pour mieux gérer les eaux du fleuve au niveau transfrontalier.
L’agence de l’eau publie une étude sur la gestion quantitative du fleuve. Elle évalue « l’empreinte de l’homme » sur le fleuve et montre que les prélèvements d’eau n’affectent qu’1% du fleuve à l’amont dans l’Ain et 20% à son embouchure en Camargue. Les 600 millions de m3 prélevés annuellement dans le fleuve servent en premier l’irrigation pour 50%, suivis par le refroidissement des centrales nucléaires (21%) puis l’industrie (15%) et l’eau potable (plus de 2,3 millions d’habitants boivent son eau). A climat constant, l’étude montre qu’une augmentation de 5% des prélèvements d’ici 2030 (soit 5 m3/s supplémentaires), ne provoquerait pas de tensions supplémentaires sur l’utilisation de l’eau du fleuve. L’agence de l’eau estime que cette augmentation de 5 à 10 m3/s peut guider et encadrer les futurs projets de développement des territoires.
A l’horizon 2060, l’étude a testé un scénario de hausse de 30% des prélèvements dans le Rhône (soit 50 m3/s supplémentaires). Cela correspond à 1 million d’habitants en plus dans le sud-est de la France qui seraient alimentés par des transferts d’eau du Rhône, à une augmentation du besoin des plantes déjà irriguées de 15% et à 65 000 nouveaux hectares irrigués en réponse à la hausse des températures.
Ces nouveaux besoins, couplés à la baisse de 30% des débits du Rhône due au changement climatique, dépasseraient la capacité du fleuve. Par exemple, le niveau de production actuel des centrales nucléaires ne serait plus garanti et l’irrigation du riz en Camargue serait rendue difficile par des remontées d’eau salée plus importantes.
Ce scénario montre qu’il faut s’adapter dès à présent sur le fleuve et son bassin, à commencer par réduire le gaspillage de l’eau. C’est l’une des 4 mesures phares du plan de bassin d’adaptation au changement climatique, adopté le 28 mai dernier.
• En 2015, toutes les masses d’eau du Rhône auront quitté la plus mauvaise classe de qualité
Le fonctionnement naturel du fleuve Rhône a été fortement modifié au 19ème et 20ème siècle pour la navigation, la production d’électricité et l’irrigation. Depuis une quinzaine d’années, des actions de restauration ont des effets visibles sur la vie aquatique. Sur le vieux-Rhône de Vernaison (69), la proportion d’espèces de poissons d’eau courante est passée de 15% à 44% suite à la multiplication par 10 du débit réservé à l’aval du barrage de Pierre-Bénite (69).
A Chautagne, dans l’Ain, cette proportion est passée de 10% à 23%. La diversité des communautés d’invertébrés augmente dans tous les sites restaurés et stagne ailleurs. 27 anciens bras du fleuve (lônes) ont été restaurés, principalement sur le Haut Rhône, et 12 d’entre eux ont été reconnectés avec le chenal principal.
Pour aller plus loin, l’agence de l’eau publie un guide pour évaluer l’état écologique du fleuve Rhône et prioriser les actions. A chaque masse d’eau correspondent des actions de restauration « sur mesure » pour atteindre le bon état.
En 2015, plus aucune masse d’eau ne sera dans la pire classe de qualité alors que 46% l’étaient avant les travaux. Leur état s’est amélioré depuis 1998, sous l’effet de l’augmentation des débits minimaux dans les parties du fleuve court-circuitées par les aménagements, et grâce à la restauration des lônes. En 2015, 8 masses d’eau passeront de médiocre/mauvais à moyen et 2 de mauvais à médiocre. Deux d’entre elles, St Alban-Sault Brenaz et Avignon-Beaucaire, atteindront le bon état. Pour l’ensemble du fleuve, l’état écologique sera bon pour 8% des masses d’eau mais il restera moyen pour 68% et médiocre pour 24% : les marges de progrès sont importantes, les efforts de restauration devront se poursuivre.
Pour la quasi-totalité des masses d’eau à restaurer, les actions clés sont la réhabilitation de lônes et la remise en mouvement des sédiments bloqués au niveau des berges aménagées pour créer de nouveaux habitats. Cela permettra d’atteindre un bon état écologique dès 2021 sur les Rhône court-circuités de Bourg-lès-Valence (26), Péage de Roussillon (38), Charmes-Beauchastel (07) et Baix Logis-neuf (26).
Pour un tiers de ces masses d’eau, dans les parties court-circuitées, il faudra aussi remettre de l’eau dans les parties court-circuitées, laisser passer plus fréquemment des crues assez fortes pour renouveler les espaces de vie des organismes aquatiques, sur le Vieux Rhône de Donzère Mondragon par exemple, et réduire les effets négatifs du marnage liés aux lâchers d’eau brutaux pour produire de l’électricité. Pour un tiers également, la construction de passes à poissons sera nécessaire sur les Rhône courts-circuités de Belley (01), Beaucaire (30) et le Rhône chenal de la Saône à l’Isère.
Ces informations viennent de servir à l’Etat, l’agence de l’eau et la CNR, réunis dans un accord-cadre, pour bâtir un programme d’actions réalistes, à échéance 2027 pour atteindre le bon état partout, et d’ici 2021 pour la moitié des masses d’eau.
Les actions de restauration du fleuve sont aussi évaluées à travers la perception qu’en ont les citoyens. Par exemple, les études sociologiques montrent que la remise en eau de bras morts sur le haut-Rhône a amélioré la perception paysagère des habitants et permis le développement d’activités touristiques et de loisirs.
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