Un accord-cadre 2014-2018 pour la préservation du fleuve Rhône
A l’occasion des 80 ans de la Compagnie nationale du Rhône (CNR), la ministre de l’écologie et de l’énergie, a annoncé la signature d’un accord-cadre entre CNR et l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse, auquel la DREAL de bassin Rhône-Méditerranée et l’ONEMA s’associent.
L’ambition est de faire du Rhône un fleuve vivant, aux puissantes fonctionnalités naturelles à travers la restauration écologique du lit historique du Rhône et le retour des anguilles, emblématiques de la Méditerranée française.
L’accord-cadre totalise plus de 70 M€ d’opérations réalisées ou à engager sur 2014-2018 pour changer le visage de l’écologie du Rhône.
Un niveau sans précédent dans l’histoire du Rhône. Ainsi, CNR aura à ses côtés l’agence de l’eau qui apporte un financement à hauteur de 50%. L’ONEMA et la DREAL apporteront leur expertise pour prioriser les actions les plus utiles.
Cet accord préserve le potentiel hydroélectrique et promet des progrès environnementaux du Rhône, avec :
• La restauration écologique de tronçons court-circuités du vieux Rhône, avec des travaux à Péage de Roussillon et Montélimar et la mise à l’étude d’une opération à Donzère Mondragon, et d’autre part la remise en mouvement des sédiments dans le lit du Rhône pour le décolmater et dynamiser les habitats ;
• La restauration de la continuité piscicole pour amener les anguilles à la Drôme (180 kms de l’embouchure) et rétablir les continuités du Rhône et des affluents nouvellement classés prioritaires (liste 2) ;
• L’amélioration de la connaissance scientifique pour la qualité de l’environnement de la plaine alluviale du fleuve.
Ces progrès sensibles seront visibles pour les riverains et touristes du Rhône. Les régions et les collectivités locales prennent appui sur ces réalisations environnementales et initient actions de découverte et offre de tourisme vert propices à la création de valeur.
Cet accord-cadre est la colonne vertébrale du volet écologique du futur plan Rhône (2015-20). Il fait suite à l’accord national sur l’hydroélectricité durable de 2009, et répond à la fois aux exigences du Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux et du plan grands migrateurs, et s’inscrit dans le cadre des Missions d’Intérêt Général de CNR.
CNR et l’agence de l’eau Rhône Méditerranée et Corse ont signé le 30 juin 2009 un partenariat novateur : en définissant ensemble leurs priorités d’intervention et les résultats à atteindre, ils portent une politique environnementale ambitieuse pour une gestion équilibrée de la ressource en eau et un bon état des milieux. Ils répondent ainsi aux objectifs quantitatifs et qualificatifs fixés par le Schéma Directeur d’Aménagement et de Gestion des Eaux, document de planification établi pour le bassin Rhône-Méditerranée à horizon 2015 et aux orientations du Grenelle de l’Environnement.
Concilier les usages de l’eau
La logique de ce partenariat est d’agir de manière cohérente sur tout le linéaire du Rhône et surtout de manière globale, en conciliant les différents usages de l’eau: restauration des milieux aquatiques et amélioration de la biodiversité par l’augmentation des débits réservés au Vieux-Rhône, la réhabilitation de lônes et le rétablissement de la continuité piscicole; préservation de la capacité de production énergétique exclusivement renouvelable par la réalisation de Petites Centrales Hydroélectriques qui valorisent les débits réservés.
Valoriser les territoires
En redonnant vie au fleuve, les signataires de l’accord-cadre et les collectivités locales partenaires s’inscrivent dans une démarche de développement durable qui dépasse la seule dimension écologique: projets de valorisation touristique ou programmes pédagogiques destinés à favoriser la réappropriation du fleuve par les riverains sont menés par les acteurs locaux suite aux réaménagements de milieux annexes du fleuve. CNR les accompagne au titre de ses Missions d’Intérêt Général, marquant ainsi son engagement dans la durée pour le développement économique et l’emploi dans les territoires.
La charte territoriale du Vieux-Rhône de Péage de Roussillon signée en septembre 2012 en est une illustration. Animée par le SMIRCLAID (Syndicat Mixte du Rhône court-circuité Loire Ardèche Isère Drôme), elle associe l’Etat, la Région Rhône-Alpes, la Compagnie Nationale du Rhône, l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse et l’Association des Amis de l’Ile de la Platière autour d’un projet global de réhabilitation du fleuve, à la fois écologique, économique et social.
Quatre axes d’intervention
Le premier accord-cadre a permis de mener expérimentations, études préalables, opérations pilotes et travaux autour de 4domaines d’intervention :
• La restauration hydraulique et écologique du Rhône :
Bras d’eaux calmes connectés au Rhône, soit en permanence soit lors des crues, les lônes présentent un fort intérêt écologique. Elles servent d’habitats pour la reproduction et l’alimentation de nombreuses espèces et jouent aussi un rôle très important dans le ressuyage des plaines après les crues.
L’objectif des restaurations sur les secteurs identifiés comme prioritaires dans le SDAGE est de bonifier la qualité des milieux aquatiques et préserver voire enrichir la biodiversité rhodanienne. Parmi les projets mis en œuvre :
- Réhabilitation de la lône pilote de la Roussette du Vieux-Rhône de Montélimar qui a permis une recolonisation du site par 13 espèces protégées de flore, 5 espèces protégées d’amphibiens et 4 espèces patrimoniales de libellules,
- Lancement de l’opération de restauration du Vieux-Rhône de Péage de Roussillon à travers la réalisation des travaux sur les deux lônes pilotes de Noyer Sud et de la Sainte,
- Conduite du schéma directeur de réhabilitation des lônes et marges alluviales du Vieux-Rhône de Donzère-Mondragon.
• La restauration de l’axe de migration et des connexions piscicoles :
Dans le cadre du Plan Rhône, l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse a conduit une démarche de concertation associant CNR, l’Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques, la DREAL de Bassin et l’association Migrateurs Rhône Méditerranée qui a abouti à une stratégie de reconquête du Rhône par les poissons migrateurs. Elle vise à restaurer la continuité piscicole du fleuve, de la mer à la confluence avec la Drôme (rive gauche) et avec l’Eyrieux (rive droite).
- Réalisation de la passe à poissons de Comps à la confluence Rhône-Gardon : cette passe de 11 bassins permet à l’alose, la lamproie et l’anguille d’accéder au Gardon, premier affluent qu’ils rencontrent lors de leur remontée du Rhône. Avec cet équipement construit sous maîtrise d’ouvrage CNR, 14 km supplémentaires de cours d’eau s’ouvrent à la migration.
- Installation de 4 passes pièges à anguilles sur les centrales d’Avignon et Caderousse : après l’expérimentation en 2005 et 2006 à Beaucaire d’un système spécifique permettant aux anguilles de remonter le Rhône, CNR a équipé ses centrales d’Avignon et Caderousse en 2010 dans le cadre de ses Missions d’Intérêt Général. En 2012, 370 000 anguilles ont été comptabilisées au passage de la centrale de Beaucaire.
- Construction de la passe à poissons au droit de la Petite Centrale Hydroélectrique de Rochemaure.
• La préservation de la biodiversité des milieux :
Il s’agit à la fois de partager les connaissances en matière de préservation des milieux naturels, rechercher des solutions et développer des actions communes :
- Extraction de la jussie, plante invasive, sur la lône de Caderousse,
- Engagement au Plan de Biodiversité Haut-Rhône aux côtés du Syndicat du Haut-Rhône, de l’Etat, de la Région Rhône-Alpes et des collectivités locales,
- Contribution aux études régionales menées par les Conservatoires d’Espaces Naturels afin d’identifier et hiérarchiser les zones humides non gérées.
• L’acquisition de connaissances :
L’objectif est de soutenir des recherches dans les domaines environnementaux qui permettent de mieux comprendre des phénomènes naturels et le comportement d’espèces vivantes et par conséquent d’agir sur l’environnement de façon efficace et respectueuse :
- Contribution à la mise en place de l’Observatoire des Sédiments du Rhône, plus important programme de recherche créé en 2009 dans le cadre du Plan Rhône. Sa mission consiste à produire des données concernant les flux sédimentaires et les pollutions associées et diffuser les connaissances nécessaires à une bonne gestion des sédiments du fleuve.
Au-delà du soutien financier, CNR apporte ses connaissances du fleuve et l’appui technique des experts de son Centre d’Analyse Comportementale des Ouvrages Hydrauliques (CACOH) et de son ingénierie lors de certaines études.
- Financement de recherches pour mieux évaluer les conditions de migration des anguilles sur le Rhône avec l’Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques (ONEMA) et l’association Migrateurs Rhône Méditerranée (MRM) notamment. Ces études visent à mieux connaître les voies de circulation des anguilles, mesurer l’efficacité des nouveaux dispositifs de montaison et faciliter la dévalaison de ce migrateur jusqu’à la mer.
Au total, sur la période du premier accord-cadre et de l’avenant signé pour l’année 2013, plus de 10 millions d’euros ont été réalisés en études et travaux sous maîtrise d’ouvrage de CNR. L’Europe au travers des fonds FEDER, l’Etat, les Régions et les collectivités locales apportent des contributions financières complémentaires à celles de l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse et de CNR.
Afin d’atteindre les objectifs du SDAGE, le 2ème accord-cadre vise à poursuivre et intensifier le partenariat entré dans une phase opérationnelle, en s’appuyant sur l’expérience acquise et sur la concertation avec la DREAL de Bassin Rhône-Méditerranée et l’ONEMA, nouvellement associés, et les collectivités locales. Partenaires techniques et financiers, la DREAL de Bassin Rhône-Méditerranée et l’ONEMA étaient déjà membres du Comité de Pilotage du 1er accord-cadre.
Restauration hydraulique et écologique du Rhône
Les travaux sur les deux secteurs prioritaires précédemment définis –Péage de Roussillon, et Montélimar - se poursuivront sur les 2-3 ans à venir sous maîtrise d’ouvrage et maîtrise d’œuvre CNR.
Le Vieux-Rhône de Péage-de-Roussillon, depuis le barrage de Saint-Pierre de Bœuf jusqu’à Peyraud/Saint-Rambert d’Albon (12 km) et ses annexes fluviales présentent une richesse écologique remarquable. Le secteur, qui compte plus d’une dizaine de lônes, est classé NATURA 2000 et abrite la Réserve naturelle de l’île de la Platière. Le projet de restauration de lônes, inscrit à l’accord-cadre, vise 3 grands objectifs :
• La restauration écologique des milieux aquatiques
• La remobilisation des matériaux
• La prise en compte des espèces exotiques envahissantes
Au cours du 1er accord-cadre, 2 lônes pilotes ont été remises en eau : la lône du Noyer Sud et la lône de la Sainte. La deuxième phase du projet porte sur 8 autres sites et représente un coût d’environ 6 millions d’euros, financés à 50% par l’agence de l’eau Rhône Méditerranée Corse ; 41,5% par CNR ; 8% par la Région Rhône-Alpes et 0,5% par le SMIRCLAID (Syndicat Mixte du Rhône court-circuité Loire Ardèche Isère Drôme).
Le Vieux Rhône de Montélimar s’étend sur 13 km entre le barrage de Rochemaure et le pont de Viviers. Le programme comprend la réhabilitation hydraulique et écologique de 2 lônes, la mise en service d’une passe à poissons d’ici fin 2014 associée à la création d’une petite centrale hydroélectrique, au droit du barrage de Rochemaure et la remise en connexion piscicole de certains bras annexes et affluents.
Pour valoriser cette opération majeure et fédérer des projets liés au fleuve, 6 communes riveraines (Rochemaure, Le Teil, Viviers en Ardèche et Ancône, Châteauneuf-du-Rhône, Montélimar dans la Drôme) se sont regroupées autour d’un schéma de développement durable du territoire. Partenaire de ces collectivités, CNR a participé au titre de ses Missions d’Intérêt Général à une première action : la réhabilitation de l’ancienne passerelle de Rochemaure qui permettra prochainement le passage de la véloroute ViaRhôna.
Sur le 3ème secteur prioritaire, Donzère-Mondragon, des études environnementales préalables et de faisabilité seront engagées en 2014 sur les lônes retenues.
Sur les sites déjà restaurés (Haut-Rhône, Vieux-Rhône de Pierre-Bénite), l’effort portera sur l’accompagnement des acteurs locaux dans l’optimisation du fonctionnement écologique des sites. Enfin, de nouveaux sites d’intérêt écologique, identifiés dans le Plan Rhône, feront l’objet d’études de pré-diagnostic pour juger de l’opportunité de programmes de restauration.
Restauration de l’axe de migration et des connexions piscicoles
Les actions visent à poursuivre la mise en œuvre de la « stratégie pour une reconquête du Rhône par les poissons migrateurs » du Plan Rhône, inscrite dans le plan de gestion des poissons migrateurs (PLAGEPOMI) 2010-2014 et à envisager les travaux de rétablissement de la continuité piscicole sur les ouvrages de la CNR, afin de respecter l’arrêté préfectoral de classement des cours d’eau.
Parmi les projets majeurs qui seront menés : les passes à poissons au barrage de Vallabrègues et de Le Pouzin, en lien avec les projets de Petites Centrales Hydroélectriques et au barrage de Sauveterre ; restauration de la continuité piscicole sur l’aménagement hydroélectrique de Sault-Brénaz.
Préservation de la biodiversité des milieux
L’accord prévoit de poursuivre la réalisation ou le soutien d’actions qui contribuent à la préservation de la biodiversité et des milieux naturels : participation à la gestion des sites protégés, soutien financier à la politique de préservation et restauration de zones humides avec les Régions ; lutte contre les espèces exotiques envahissantes qui déséquilibrent l’écosystème; actions en faveur d’espèces protégées (loutre, tortue Cistude...).
Acquisition de connaissances
Les partenaires participent à l’Observatoire Homme-Milieu (OHM) Vallée du Rhône chargé de coordonner, identifier les synergies et assurer une valorisation commune des actions de recherche sur le fleuve conduites au sein de la Zone Atelier Bassin du Rhône, tant au niveau de la gestion sédimentaire que du suivi scientifique de la restauration écologique du fleuve.