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Rémunérations, cumul des mandats, emprunts toxiques chez certains bailleurs sociaux…

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Rémunérations, cumul des mandats, emprunts toxiques chez certains bailleurs sociaux…

Rémunérations, cumul des mandats, emprunts toxiques chez certains bailleurs sociaux…

La CLCV, l’association nationale de défense des consommateurs et usagers, a publié les rapports d'inspection de 67 bailleurs sociaux réalisés en 2013 par la Mission d’inspection du logement social (Miilos). Si les conclusions qui en découlent avancent de nombreux points positifs, notamment à travers le confort et l’amélioration du patrimoine, à l’engagement pour la rénovation thermique ou pour une meilleure attribution des logements, ils révèlent aussi de graves dérives dans la gestion de certains bailleurs sociaux.

Les bailleurs sociaux font l’objet d’un contrôle par un corps dédié, la Mission interministérielle d’inspection du logement social (Miilos). Contrairement à la Cour des comptes, ces rapports ne sont pas publics mais seulement « communicables ». Avec beaucoup de difficultés, la CLCV a obtenu 67 rapports d’inspection de bailleurs élaborés en 2013 par la Miilos. L’association a en effet essuyé un premier refus de la Miilos, puis nous avons saisi la Commission d’accès aux documents administratif (CADA) qui a rendu un avis favorable. La Miilos a refusé une seconde fois et, suite à une deuxième intervention de la CADA, la communication des documents a finalement été acceptée. Si une association qui compte plus de 400 administrateurs locataires HLM a autant de mal à obtenir ces documents, il est probable que cela soit encore plus difficile encore pour un locataire ou tout citoyen agissant de façon individuelle.

Les organismes HLM remplissent une mission d'ordre public. De ce fait, il est indispensable que les rapports concernant leur gestion soient accessibles à un large public, dont leurs locataires.

Sur ce point légitime, la CLCV demande ainsi que les rapports de la Miilos soient mis en ligne comme le font la Cour des comptes et les Chambres régionales des comptes pour les autres services publics locaux.

La CLCV produit ici une analyse de ces rapports au regard de l’intérêt des habitants. Elle met aussi en ligne sur son site Internet l’ensemble de ces rapports afin qu’ils soient à la disposition des locataires et du public.

- La question de gouvernance ?

Les rapports que la CLCV présente montrent que la gouvernance des bailleurs est très perfectible. Notamment les conseils d’administration, et ainsi les représentants des locataires à ce conseil ne sont pas suffisamment informés et associés aux décisions. Ces défauts de gouvernance ont des conséquences concrètes: dans certains organismes HLM, des emprunts sont contractés avec imprudence sur les marchés financiers, des conflits d’intérêt ne sont pas prévenus, des mises en concurrence ne sont pas effectuées et les rémunérations des dirigeants sont déplafonnées sans contrôles. Plus généralement, on court toujours le risque qu’un conseil d’administration ne devienne qu’une chambre d’enregistrement.

La lecture des rapports et la pratique concrète de l’association soulèvent deux difficultés appelant des mesures. Il y a parfois des défauts complets de transmission ou de mise au vote du conseil, défauts qui doivent disparaître. Le problème le plus profond, inhérent à beaucoup de conseils d’administration, tient au fait que les informations données sont trop parcellaires et que les administrateurs ne disposent pas d’une formation nécessaire pour participer de façon éclairée. Il s’agit à la fois des administrateurs représentants des locataires mais aussi des conseillers municipaux. Dans certains cas, la gouvernance reste l'affaire de la direction générale et du bureau sans passer par le conseil d'administration.

D’autres organisations (les conseils d’administration des grandes entreprises, les comités d’entreprises) ont en partie pallié ces difficultés en organisant pour les administrateurs des formations préalables ou des journées particulières faisant un point sur un sujet avant une séance de conseil. Le recours à des experts indépendants à l’initiative des représentants des locataires, sur le budget des organismes HLM, reprendrait un modèle qui a fait ses preuves dans les comités d’entreprise.

Parce que la gouvernance du logement social doit être effective, la CLCV demande une très nette amélioration de la formation des administrateurs ainsi qu’une présentation plus approfondie et pédagogique des dossiers importants mis au vote. Cette formation et ces débats plus approfondis sur la gestion des organismes doit ainsi passer par un élargissement des compétences des conseils de concertation locative.

- Prévenir des pratiques dommageables pour les locataires

Dans un certain nombre d'organismes HLM, minoritaires il est vrai, les rapports soulignent des pratiques directement dommageables pour les locataires : les plafonds de loyer (OPH Eure par exemple) et les niveaux d’augmentation de loyer (OPH Malakoff) ne sont pas respectés, certains logements ne sont pas aux normes y compris en matière de sécurité (OPH Clichy habitat), quand d’autres bailleurs sont très en retard sur l’éradication de l’amiante (OPH de Seine-Saint-Denis).

La mise en place systématique d’une démarche de qualité faciliterait notamment le respect des normes de sécurité et de confort.

- Tirer les leçons des « emprunts toxiques »

Pour gérer leur dette, un nombre substantiel de bailleurs (SA HLM Batigère Nord Est en Lorraine, Neolia dans le Doubs, l’OPH Lyon Habitat par exemple) a eu recours à des produits structurés et à des «swaps» de taux qui ont évolué de façon très désavantageuse, prenant alors l’appellation d’emprunts toxiques. Si cette pratique n’engage qu’une faible part de l’encours total de dette, la somme des pertes, qui n’est pas encore calculée, sera substantielle et de fait impactera les marges de manœuvre du logement social.

La pratique de gestion active de la dette consiste à avoir recours à des instruments souvent sophistiqués pour chercher à obtenir des conditions d’emprunts à un taux plus bas. La contrepartie à ce taux plus bas est une prise de risque, souvent sous-estimé par les intéressés, et ce risque s’est exprimé lors de la crise de 2008. Des bailleurs qui pensaient pouvoir bénéficier de taux attractifs ont alors fini par avoir des dettes à des taux de 7-8 % et parfois plus de 10 %.

Le recours à ces pratiques, souvent sans consultation réelle du conseil d’administration1, est d’autant plus incompréhensible que les bailleurs sociaux bénéficient d’un accès au fonds du livret A à des taux plus bas que le marché. Ce dispositif leur permet d’avoir déjà, sans risque, un taux préférentiel (environ un point en dessous du marché). Vouloir un taux encore plus bas en ayant recours à des produits sophistiqués amène alors des prises de risques élevées qui n’ont pas lieu d’être pour un gestionnaire d’une mission publique qui plus est à caractère social.

Si les banques (Dexia, Caisse d’Epargne, etc) qui ont fait la promotion de ces instruments portent une forte responsabilité, les dirigeants des bailleurs sociaux n’auraient pas dû céder à ces sirènes. La CLCV demande un renforcement de la gouvernance sur les questions de financement et de placement. L’accès privilégié aux fonds du livret A doit permettre de bannir les pratiques de « gestion active de la dette» (recours aux marchés financiers). La loi de régulation bancaire de 2013 prévoit un encadrement des pratiques pour les collectivités et services publics locaux mais qui reste non pertinent pour les HLM où l’accès au fonds du livret A doit pouvoir permettre de ne pas se tourner vers les marchés financiers.

L’association revendique ainsi qu’une disposition règlementaire prohibe la gestion active de la dette dans le champ du logement social.

- Améliorer la gestion pour maîtriser les coûts

Les rapports de la Miilos proposent de nombreuses pistes pour une meilleure maîtrise des coûts. Par exemple, les groupes réunissant plusieurs SA HLM (bailleurs sociaux privés) ont recours à des sous- traitances internes dans des conditions qui peuvent être parfois économiquement désavantageuses pour les locataires. D’autres, comme la société d’économie mixte, la Régie immobilière de la Ville de Paris, ont vu leur coût interne croitre de façon trop importante.

La CLCV demande que les bailleurs sociaux aient recours au principe de l’audit indépendant qui vienne mesurer la pertinence des différentes solutions de sous-traitance, ces audits devant bien entendu être présentés en conseil d’administration.

- Sur les attributions : de nets progrès mais quelques cas problématiques

Les rapports Miilos notent des progrès dans la politique d’attribution des logements (moins d’irrégularités, destination sociale plus affirmée). Certains bailleurs restent problématiques comme à Issy les Moulineaux où la part des locataires à très bas revenus est environ deux fois inférieure à la moyenne francilienne des HLM.

- Aussi de nombreux points positifs

Les rapports montrent les nombreux points positifs dans l’activité des bailleurs que ce soit, selon les cas, dans l’entretien des logements, la maîtrise des coûts et des charges, l‘attribution sociale des logements ou l’engagement dans la rénovation thermique. Autant de points positifs inscrits dans les rapports que nous rendons publics qu’il convient de signaler et qui doivent être partagés et analysés par les bailleurs comme autant de bonnes pratiques.

Conclusion : se servir des rapports de la Miilos dans l’intérêt des locataires

La CLCV propose aux parties prenantes du secteur de mieux tirer profit des inspections de la Miilos. Outre leur mise à disposition du public, il s’agit notamment :

- D’améliorer la gouvernance par une meilleure information et formation du conseil d’administration. De donner aux administrateurs les moyens d’une expertise indépendante.

- D’interdire de façon réglementaire les pratiques de gestion active de la dette quand le bailleur a normalement accès au fonds du livret A.

- De veiller à la disparition définitives des loyers, ou augmentation des loyers, au-delà des plafonds légaux.

- Se saisir des cas de logements hors normes sur des questions de sécurité ou de santé. Engager une démarche de qualité formelle.

- S’appuyer sur des bonnes pratiques locales soulignées par la Miilos pour favoriser leur généralisation.

L’ensemble de ces mesures doivent être envisagées avec les associations de locataires dont les représentants ont été élus par les habitants.

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