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Le remplacement des canalisations en plomb inévitable au 25 décembre 2013…

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Le remplacement des canalisations en plomb inévitable au 25 décembre 2013…

Le remplacement des canalisations en plomb inévitable au 25 décembre 2013…

Au 25 décembre 2013, les eaux à destination de la consommation humaine devront avoir un taux de plomb inférieur à 10 μg/l. Pour atteindre un tel seuil, le remplacement des canalisations en plomb est inévitable. Dans ce cadre l’ARC et l’UNARC ont lancé ‘’Une double action contre la « catastrophe-plomb »’’.

Estimant que la date butoir au 25 décembre 2013 pour le remplacement des canalisations en plomb mettra en infraction une majorité d’habitats, l’association de défense des consommateurs CLCV a appelé jeudi 5 décembre les pouvoirs publics à reporter de trois ans la date et à accorder des aides aux particuliers pour effectuer les travaux.

Durant les dix dernières années, les autorités organisatrices (mairies, intercommunalités, syndicats de communes), en lien avec les opérateurs d’eau (délégataires, régie), ont mis en place leur programme d’éradication des branchements sur le réseau public. C’est la collectivité locale qui est ici responsable : il lui appartient d’effectuer le renouvellement, soit en prenant un prestataire dédié désigné dans le cadre d’un marché public, soit en négociant ces travaux avec son délégataire (inclusion dans le contrat d’affermage). Mais, parallèlement à cela, très peu d’informations ont été portées à la connaissance des propriétaires. S’il a pu y avoir quelques campagnes de sensibilisation, aucune n’a été réellement approfondie et n’a abordé les questions liées à l’analyse ou aux conséquences juridiques du défaut de remplacement des canalisations. Et si d’aucuns ont déjà été confrontés à cette problématique, notamment en milieu rural et périurbain (avec parfois des litiges liés au déplacement du compteur en limite de propriété), la question du renouvellement des canalisations intérieures, notamment en copropriété, n’a été posée que très récemment, dans les années 2012-2013. Il y a donc eu un net décalage temporel entre les deux phases. De fait l’échéance du 25 décembre risque de ne faire que peu de bruit.

On estime à 838 000 le nombre de logements construits à Paris avant 1949 et dotés de canalisations en plomb1 et à 7,5 millions sur l’ensemble de la France2, généralement des immeubles anciens situés en centre-ville. Il s’agit donc d’une des plus vastes opérations de travaux dans les copropriétés, analogue à celle sur les ascenseurs, par exemple. Et, à quelques semaines seulement de l’échéance, très peu d’immeubles se sont mis en conformité de sorte que la plupart des copropriétés seront, le 25 décembre, dans l’illégalité.

LE PLOMB DANS L’EAU : L’ETAT DU RISQUE

En 1996, près de 85 000 enfants âgés de un à six ans étaient concernés par une intoxication par le plomb. En 2008-2009, le taux d’enfants atteints a été divisé par vingt, preuve que les différentes mesures mises en place ont porté leurs fruits. Les principaux vecteurs de contamination sont les peintures en plomb et autres particules dans l’air en cas de travaux ou si les revêtements sont en mauvais état de conservation.

Si la contamination hydrique aboutit rarement à des cas de saturnisme, elle contribue à imprégner l’organisme. Et ce n’est d’ailleurs pas par hasard si l’OMS a déterminé, en 1994, un seuil de 10 μg/l car il a été démontré qu’en deçà de ce taux, la plombémie (c’est-à-dire le taux de plomb dans le sang) chez l’enfant n’augmente pas. Les cas de saturnisme liés à l’eau résultent essentiellement de la combinaison de plusieurs facteurs, à savoir des canalisations en plomb et une ressource aquatique particulièrement agressive (dans les Vosges et le Massif central notamment). Il n’en demeure pas moins qu’une exposition sur une longue période à une eau ayant une forte concentration de plomb contribue à imprégner durablement l’organisme, avec les risques qui peuvent en résulter pour les enfants et nourrissons (perte de points de QI notamment).

L’ETAT DU DROIT

La Directive européenne 98/83/CE de 1998 fixe au 25 décembre 2013 la date à laquelle l’eau du robinet doit avoir une teneur en plomb inférieure à 10 μg/l, reprenant ainsi les recommandations de l’OMS. Or, pour parvenir à respecter ce taux, il faut éviter absolument tout contact entre l’eau et le plomb des canalisations et donc, supprimer ces dernières. Au regard du nombre de logements concernés, il ne fait aucun doute que la très grande majorité d’entre eux sera hors-la-loi. Le problème consiste alors à déterminer les conséquences qu’encourent les propriétaires qui ne réalisent pas les travaux nécessaires.

Comment calculer la teneur en plomb de l’eau ?

Le taux de teneur en plomb de l’eau varie en fonction de plusieurs éléments :

- le temps de stagnation dans la canalisation ;

- la longueur même de la canalisation et son diamètre ;

- la température de l’eau ;

- son pH ;

- éventuellement, un phénomène d’électrolyse si des branchements de mise à la terre sont effectués sur la canalisation.

Un arrêté définit les conditions de prélèvement pour mesurer les teneurs en plomb des eaux distribuées destinées à la consommation humaine3 :

« Le prélèvement porte sur un volume d’un litre d’eau soutiré en une seule fois, sans réalisation préalable de purges des installations de distribution d’eau et de prélèvements d’eau avant la prise d’échantillon. Le prélèvement est réalisé au cours de la journée, durant les heures habituelles d’activité, au point où l’eau sort des robinets qui sont normalement utilisés pour la consommation humaine. »

Le prélèvement se fait donc avec une stagnation assez importante et en une seule fois, ce qui a pour conséquence d’augmenter le taux de plomb dans l’eau. On comprend l’objectif qui est de déterminer un taux de concentration avec une valeur maximale, ceci par sécurité. Toutefois, ce protocole demeure assez imprécis et les termes « durant les heures habituelles d’activité » peuvent être interprétés de différentes manières. Faut-il considérer que l’échantillonnage doive être effectué en pleine journée, pendant les horaires d’activité professionnelle ou, au contraire, s’agit-il d’une activité domestique ? Le flou autour de cette définition peut entraîner des conséquences très importantes.

En effet, il a été démontré que le taux de concentration varie selon la longueur du circuit et le délai de stagnation : dans un immeuble collectif, le nombre d’occupants « tirant » l’eau va donc avoir une incidence sur le résultat de l’analyse.

Une étude a été menée dans les années 1990 pour mettre en évidence l’incidence de la stagnation de l’eau dans le taux de concentration du plomb.

Il s’agit d’un réseau expérimental réalisé avec des matériaux neufs qui se compose d’un circuit en plomb de 20 mm de diamètre et d’une longueur de 20 mètres. Le tableau ci-dessous montre bien la diminution extrêmement importante du taux de concentration du plomb dans l’eau. C’est d’ailleurs pourquoi il est toujours recommandé, dans le cadre d’une utilisation domestique, de toujours purger préalablement l’eau des canalisations avant toute utilisation domestique.

Le remplacement des canalisations en plomb inévitable au 25 décembre 2013…

En conséquence, si l’analyse est réalisée durant la journée, période généralement creuse avec des délais de stagnation assez longs, le taux de plomb sera élevé. En revanche, si elle est réalisée le matin, le fait que l’eau soit tirée par les habitants de l’immeuble (douches...) entraînera une diminution de ce même taux.

Il faut donc, non seulement mieux définir le protocole d’analyse, mais également prévoir de faire, à quelques jours d’intervalle, un second échantillon afin de corroborer les résultats du premier.

REMPLACEMENT DES CANALISATIONS : QUEL COUT ?

Il est difficile de chiffrer le coût du remplacement des canalisations en plomb. En effet, celui-ci dépend de plusieurs facteurs :

- le nombre de colonnes montantes, c’est-à-dire d’entrées d’eau dans le logement : il n’est pas rare d’avoir deux ou trois colonnes dans des immeubles anciens, ce qui renchérit d’autant le coût de l’opération ;

- la structure même de l’immeuble, notamment s’il a fait l’objet de nombreux travaux d’adaptation ou d’amélioration ;

- la taille de l’immeuble et le nombre d’appartements ;

- les matériaux utilisés (PVC...).

Devant la multiplicité des facteurs, on se rend facilement compte que chaque opération de remplacement des canalisations est spécifique et unique. D’où la difficulté pour fixer un montant moyen par logement. Un rapport du Conseil général de l’environnement et du développement durable rendu en février 2013 s’accorde pour fixer, au regard d’estimations antérieures, à 2 250 € / logement le coût des travaux.

Un coût important qui pourra difficilement être supporté par les propriétaires compte tenu de l’augmentation croissante des charges (notamment en raison des hausses de l’énergie), de la réalisation d’autres travaux obligatoires (sécurisation des ascenseurs, ravalement dans certaines communes) et des dépenses d’entretien courant du logement et, plus généralement, de l’immeuble (réfection de la toiture...).

QUELLES AIDES FINANCIERES POUR LES COPROPRIETAIRES ?

A l’heure actuelle, la plupart des copropriétaires ne peuvent supporter des travaux de plus de 2 000 € par logement, d’autant plus qu’il s’agit seulement d’une moyenne. Certes, le fait que les pouvoirs publics soient restés extrêmement discrets sur l’échéance du 25 décembre prochain explique les raisons du très faible nombre de mises en chantier mais il est évident que la principale raison de ce manque d’élan réside dans le coût de l’opération. Si l’on souhaite donc que les copropriétés soient conformes aux textes en vigueur, il sera extrêmement difficile de passer outre une aide financière.

A ce titre, les agences de l’eau pourraient participer au financement de cette opération. Ces agences, créées par une loi de 1964, ont pour objectif de faciliter les diverses actions d’intérêt commun au sein d’un bassin ou d’un groupe de bassins. Celles-ci ont vocation première à lutter contre la pollution des eaux tout en conciliant les exigences :

« - de l’alimentation en eau potable des populations et de la santé publique ;

- de l’agriculture, de l’industrie, des transports et de toutes autres activités humaines d’intérêt général ;

- de la vie biologique du milieu récepteur [...]. »

Le soutien aux actions sanitaire est donc très explicite. Même si, aujourd’hui, l’accès à l’eau potable est une problématique bien plus relative qu’en 1964, cette disposition reste inscrite et, juridiquement, le soutien financier des agences pour l’éradication du plomb ne saurait être contesté sur le plan des principes, d’autant plus qu’il s’agit du respect d’une recommandation de l’OMS rendue ensuite obligatoire au niveau européen et qui vise particulièrement à protéger les enfants.

De plus, par le passé, les agences de l’eau ont apporté un important soutien financier au renouvellement des branchements en plomb par les autorités organisatrices et leurs opérateurs. A titre d’exemple, sur la période 2002-2006, l’Agence de l’eau Seine Normandie, qui couvre notamment l’Ile de France, a distribué 3,4 mds d’euros d’aides en cinq ans. Sur ces 3,4 mds, 767 millions constituait la ligne « accès à ressource » qui se destine aux opérations de soutien à la potabilisation (souvent la subvention pour une construction d’usine de traitement). Dans cette enveloppe, 254,8 millions d’euros ont été mobilisés pour aider aux renouvellements des branchements en plomb, soit 7,49 % des aides distribuées. Mais ces fonds n’ont pas été destinés au particulier mais au réseau public... Or, il ne faut oublier que 85 % des ressources de ces agences proviennent des factures d’eau acquittées par les particuliers.

Outre un financement par les agences de l’eau, il serait tout à fait possible de penser à une intervention de l’ANAH, celle-ci ayant la capacité opérationnelle à aider les copropriétés. Il n’est d’ailleurs pas rare de voir les collectivités locales renvoyer vers cette instance pour un soutien financier.

Dans sa conclusion l ‘association CLCV estime que le remplacement des canalisations en plomb dans les immeubles est une mesure de santé publique afin de prévenir les risques de saturnisme et il ne s’agit nullement de remettre en cause la nécessité de prévenir cette maladie, d’autant plus que les principales victimes sont des enfants.

Pourtant, la situation actuelle est très problématique : mutisme des pouvoirs publics face à cette échéance, protocole d’échantillonnage largement perfectible, difficulté, voire impossibilité, pour les propriétaires de supporter financièrement le coût des travaux, flou juridique en cas de dépassement du taux de concentration du plomb dans l’eau.

Surtout, il est inutile de se leurrer : la plupart des immeubles concernés seront en infraction avec la loi.

De fait, il est indispensable que les pouvoirs publics réagissent enfin. Les municipalités et autres collectivités locales n’ont pas de compétences spécifiques pour l’habitat du parc privé et se limitent, en ce qui concerne le plomb, à l’information du public. Or, celle-ci est très faible à l’heure actuelle. Les actions et prises de décisions doivent donc se faire au plus haut niveau.

En conséquence, il est nécessaire que le gouvernement organise le report de l’échéance du 25 décembre 2013, qui ne sera de toute façon pas respectée. A ce titre il est intéressant de noter que le rapport de Dominique BRAYE, président de l’ANAH, relatif à la prévention des copropriétés en difficulté, préconise de desserrer certaines contraintes règlementaires concernant les travaux afin de différer leur échéance dans le temps. Et le document de citer expressément l’exemple des canalisations en plomb15.

Par ailleurs, il faut examiner dans quelles conditions des aides financières peuvent être accordées ; comme nous l’avons dit, les agences de l’eau et l’ANAH peuvent avoir ici un rôle important à jouer.


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