Vers une suppression des départements de Paris et de sa petite couronne…
L’Assemblée Nationale a ouvert le chemin vers une métropole du Grand Paris avec pour conséquence une éventuelle suppression des départements de Paris et la petite couronne.
Cette mesure issue du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, a été votée ce 12 décembre, au terme de vifs débats.
La création au 1er janvier 2016, de la métropole du Grand Paris, nouvel établissement public de coopération intercommunale (EPCI) regroupera Paris et sa petite couronne (Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne et Hauts-de-Seine), ainsi que les communes de grande couronne membres d'un EPCI dont le siège se situe en petite couronne, soit 6,5 millions d'habitants. Elle entraînera la disparition des 19 EPCI à fiscalité propre qui existent à ce jour en petite couronne.
"La MGP constitue une illustration du « choc de simplification » souhaité par le président de la République, au moment où un rapport de l’OCDE vient de pointer que l’on trouve plus de 1300 autorités locales dans la zone métropolitaine de Paris, contre 540 dans l’aire métropolitaine de Chicago, qui compte 10 millions d’habitants" a rappelé la ministre de la décentralisation Marylise Lebranchu.
La métropole du Grand Paris qui aura des compétences élargies en matière de logement (pour rééquilibrer l’offre la MGP sera dotée de la totalité des compétences de la chaîne du logement, depuis la programmation jusqu’à la production), d'urbanisme et d'aménagement économique, conduira à redessiner les intercommunalités de la grande couronne "avec un seuil de 200.000 habitants, pour arrêter la stérile cohabitation entre collectivités pauvres et collectivités riches, frein au développement économique donc à la création d'emplois", a souhaité Marylise Lebranchu.
Enfin la MGP sera un établissement public de coopération intercommunale (EPIC) à fiscalité propre pour assurer la péréquation financière et la solidarité entre les communes qui la composent. "Ce sera un grand bol d’air pour les communes et EPCI de la capitale, car nulle métropole mondiale ne peut se développer de façon optimale si l’on accepte que la plus grande richesse y côtoie la plus grande pauvreté", a déclaré Marylise Lebranchu à l’issue de ce vote.
Un vote qui a suscité des débats enflammés.
Alors que le gouvernement défend ce projet qui vise à renforcer l'efficacité des politiques publiques (notamment celle du logement), le partage des richesses entre les communes et, donc, la compétitivité de la région-capitale, les députés de droite et du Front de Gauche ont dénoncé tour à tour "un monstre technocratique", un "gros machin", ou encore une "usine à gaz", qui ne fera qu'ajouter une couche au "millefeuille territorial" et privera les maires de leurs attributions. Candidate UMP à la mairie de Paris, Nathalie Kosciusko-Morizet a prédit une hausse de la fiscalité des Parisiens, citant une récente note du syndicat d'études Paris Métropole.
Tous ces arguments faisaient écho à des critiques émises par de nombreux élus franciliens, notamment dans une "pétition" et un "appel" portés par Patrick Devedjian, président UMP du conseil général des Hauts-de-Seine, et Patrick Braouezec, président FG de la communauté d'agglomération Plaine Commune. De son côté, Philippe Laurent, maire de Sceaux et président (jusqu'au 13 décembre) de Paris Métropole, avait appelé les députés, dans un communiqué, à "ne pas tuer Paris" et à dire "non au gâchis". Il avait rappelé la proposition soutenue par de nombreux élus locaux de s'appuyer sur les intercommunalités existantes pour construire une "métropole polycentrique".
Dans l'hémicycle, la majorité socialiste a balayé les amendements qui proposaient purement et simplement de revenir sur la création de la métropole. Elle a réservé le même sort à des amendements qui tendaient à permettre aux communes et aux EPCI existants de conserver leurs prérogatives, ou qui prévoyaient une consultation soit des populations, soit des conseils municipaux concernés, avant la création de la métropole.
Au final, les députés ont donc modifié à la marge le texte élaboré par la commission des lois le 27 novembre (lire notre article du 28 novembre 2013). La commission avait alors adopté un amendement présenté par la ministre en charge du dossier, Marylise Lebranchu, qui confie à la métropole des compétences en matière d’aménagement, de logement, d’urbanisme, de développement durable et d’action économique.
Les députés ont, toutefois, prévu que la métropole versera à chacune de ses communes membres une dotation territoriale métropolitaine, dispositif, qui permettra le financement des compétences rétrocédées aux communes, "lorsque celles-ci décident de confier leur mise en œuvre à d’autres personnes publiques". Ils ont aussi chargé la mission de préfiguration du Grand Paris, dans laquelle siégeront des élus locaux, d'élaborer la carte des territoires, des ensembles d'au moins 300.000 habitants qui composeront la métropole. Ils ont encore donné leur accord pour que le gouvernement prenne par ordonnance les mesures de nature législative, en vue de préciser les règles budgétaires, financières, fiscales et comptables de la métropole, de même que s'agissant du fonctionnement des conseils de territoire.
Une métropole sans départements ?
Les débats ont pris un tour passionnel lors de l'examen de la proposition du député PS Alexis Bachelay d'un rapport, d'ici fin 2015, pour étudier la fusion des départements de Paris et de la petite couronne au sein du Grand Paris. "Les départements vont rapidement apparaître inutiles car leurs compétences pourront être transférées à un autre échelon", a plaidé le député. Il a finalement retiré ses amendements après l'engagement de la ministre de la Décentralisation que le gouvernement remettrait "un rapport, par exemple pour janvier 2015, au Parlement sur les modalités de suppression du département sur le périmètre de la métropole du Grand Paris et toutes les conséquences".
Dans un communiqué, les deux ministres en charge de la décentralisation ont salué le vote de l'Assemblée, qui ouvre la voie à un effort "sans précédent" de "rationalisation de l'organisation administrative de Paris et de la petite couronne".
Les députés ont achevé jeudi après-midi l'examen du projet de loi, sur lequel ils devaient se prononcer dans la foulée. Le 17 décembre, ils tenteront de trouver un compromis avec le Sénat. Les deux assemblées devraient donc, ensuite, examiner le texte en nouvelle lecture. L'Assemblée nationale aura le dernier mot.