Canal Seine-Nord, « En faisant une promesse on contracte une dette. »
Le premier Ministre, suite à sa visite à Arras, le 26 septembre 2014 a annoncé son engagement ferme en faveur du canal Seine-Nord, un projet si souvent reporté, devenu un modèle d'investissement pour le gouvernement, en vue de relancer une économie en panne, avec, en prime, un rare consensus. Année 2014, celle d'une nouvelle relance du futur canal ?
Mais voilà, depuis plus de quinze ans, le projet du canal Seine-Nord a été annoncé, reporté, relancé, remis en cause, renégocié….
Le 1er ministre, y voyant aussi bien un "beau projet fédérateur pour la nouvelle grande région Nord-Pas-de-Calais Picardie" prévue par sa réforme territoriale, qu'un exemple de la "relance des investissements" qu'il préconise aussi bien pour la France que pour l'UE, a confirmé "la détermination de (son) gouvernement à remettre un dossier de demande de subvention" à la Commission européenne.
Bruxelles a promis de financer à hauteur de 40% ce projet, évalué par le gouvernement à quelque 4,5 à 4,8 milliards d'euros, et réclamé depuis des décennies par les régions concernées au premier chef, le Nord/Pas-de-Calais et la Picardie. Il s'agit de relier la Seine à l'Escaut par un canal à grand gabarit, d'où la dimension transfrontalière du projet, même si le coeur du chantier concerne 106 km entre l'Oise et le Nord.
Politiques, chefs d'entreprise et dirigeants de chambres de commerce appelaient depuis des années de leurs vœux l'ouverture du chantier du canal qui permettrait la navigation de barges de 4.400 tonnes et 185 mètres de long, avec à la clef la création potentielle de milliers d'emplois.
"Ce canal est un enjeu économique décisif", a martelé le Premier ministre devant les élus du Pas-de-Calais. Il a cité "12.000 à 14.000 emplois directs et indirects pour la construction de cet ouvrage"
L'objectif est que le chantier commence en 2017 et s'achève en 2023, a indiqué le 1er ministre.
"C'est une opportunité exceptionnelle que nous devons saisir. C'est pour cela que la France sera au rendez- vous", a-t-il lancé.
"Il faut évidemment des grands projets qui permettent de regarder l'avenir avec plus d'optimisme", a-t-il plaidé.
Outre l'enjeu économique, fondamental, "un tel canal c'est (...) la réponse essentielle pour le développement, durable, car l'aspect écologique du projet sera également très important" pour le nord de la France, a-t-il
également observé.
Selon lui, "il constitue une réponse pertinente pour désaturer l'autoroute A1 qui accueille un trafic de poids lourds croissant", et réduire la pollution. Le projet d'origine conçu comme un partenariat public privé d'un montant évalué à 7 milliards d'euros a été abondonné et "reconfiguré" de manière à être finançable, comme préconisé dans un rapport remis au gouvernement le 11 décembre par le député du Nord, Rémi Pauvros (PS).
- Montage financier à mettre au point -
Outre la part couverte par l'UE, de quelque 2 milliards d'euros, le montage définitif reste à mettre au point. L'Etat s'engagerait à hauteur d'1 milliard de même que les collectivités locales de Picardie, Ile-de-France et Nord-Pas de Calais. Le solde d'environ 500 millions d'euros serait apporté par des prêts longue durée (40 ans) et à très bas taux d'intérêt.
Les intérêts privés -céréaliers notamment- contribueraient aussi en finançant certains travaux sur les plateformes multimodales. D'autres industries étaient fortement demandeuses -automobile, distribution, logistique et recyclage.
M. Pauvros a été chargé vendredi par le gouvernement d'une nouvelle mission pour assurer "le lien avec les collectivités locales" durant la prochaine phase.
Paris a jusqu'à février pour déposer son dossier à Bruxelles, l'étude d'intérêt public modificative devant ensuite
être lancée à l'été 2015.
L'annonce a été accueillie avec enthousiasme par les élus, toutes tendances politiques confondues, à l'exception d'EELV. En effet, pour les écologistes le projet pose un réel débat sur le plan économique dans la mesure où la contrepartie financière annoncée représente une facture d’un milliard pour les collectivités régionales et départementales sur un total de 4,5 milliards. Impliquant in fine que le coût de ce projet pharaonique soit tenu et que le financement européen soit porté à un taux de 40% au lieu de 6,22%. Un constat assez particulier en raison de la situation économique des collectivités régionales et des départements qui peinent à boucler leurs budgets et qu’ils sont en compétence sur des missions touchant à l’action sociale, aux personnes âgées, aux transports scolaires pour les enfants…lesquels redeviennent payants dans certains départements !