Les circuits optiques plus rapides et économes en énergie que les circuits électriques
Fonctionnant à la lumière, les circuits optiques sont plus rapides et économes en énergie que les systèmes électriques. Des chercheurs de l’EPFL viennent de faire un grand pas en avant dans le domaine en posant les bases d’un «transistor» photonique particulièrement efficient.
Les circuits optiques, également dits «photoniques», fonctionnent à la lumière. Ils sont 10 à 100 fois plus rapides que les circuits électroniques, qui utilisent l’électricité. Ne subissant que peu de pertes de chaleur, présentant de meilleurs rapports signal/bruit et dotés d’une plus grande résistance aux interférences, ils sont aussi moins gourmands en énergie. Essentiellement utilisés dans le domaine des communications (à l’exemple des fibres optiques), ces circuits utilisent de minuscules cavités optiques en guise d’interrupteurs. Celles-ci permettent de laisser circuler ou au contraire de bloquer le flot de lumière, à la manière des transistors en électronique. Or, des chercheurs de l’EPFL ont fabriqué et testé expérimentalement un nouveau type de «nanocavité à cristal photonique» (PCN). Conçue sur une base de silicium, cette nanocavité agit comme interrupteur en n’utilisant qu’une infime quantité d’énergie. Cette découverte, qui ouvre la voie à de nombreux développements dans le domaine optique, fait l’objet d’un article et de la couverture du journal Applied Physics Letters.
Circuits et cavités optiques :
Les circuits optiques contrôlent la lumière, tout comme les circuits électriques contrôlent le flux électrique. Mais ils le font avec davantage de rapidité, d’efficacité énergétique et de stabilité. Le domaine de la photonique appliquée est régulièrement marqué par des avancées dans le développement de ces circuits et l’utilisation des cavités optiques à l’échelle nanométrique en guise d’interrupteurs ou de transistors.
Les cavités optiques confinent la lumière dans de minuscules espaces de quelques nanomètres. Des espaces si petits, qu’une infime quantité de lumière supplémentaire suffit pour y provoquer un changement de longueur d’onde. Cette modification est due aux propriétés optiques particulières du matériau. Dites «non-linéaires», ces propriétés font que si une petite dose de lumière parvient déjà à faire résonner la cavité, une lumière plus intense la fera carrément passer d’un état à un autre. C’est cet effet, appelé «bi-stabilité optique», qui permet à la cavité d’agir comme interrupteur.
Concevoir des circuits optiques qui soient efficaces à la fois en terme de rapidité et de basse consommation d’énergie est un véritable défi. Ces deux aspects sont pourtant intimement liés, la puissance totale emmagasinée par un circuit dépendant de l’énergie nécessaire pour opérer une seule commutation multipliée par le nombre d’opérations par seconde. En conséquence, pour être implantées dans un circuit optique, les cavités doivent être conçues de manière à pouvoir être «allumées» en utilisant le moins d’énergie possible.
Un nouveau transistor à basse consommation :
A l’EPFL, le groupe de Romuald Houdré et Vincenzo Savona a conçu, fabriqué et testé une cavité optique basée sur une nanostructure cristalline photonique (PCN), qui n’a besoin que d’un apport d’énergie particulièrement bas pour être enclenché ou éteint. Composée d’une plaque de silicium, elle associe une très petite taille avec une très haute qualité. Celle-ci peut se mesurer en terme de facteur «Q», à savoir le temps durant lequel le PCN peut retenir la lumière. Pour cette nouvelle structure, le facteur «Q» est de 500,000, ce qui signifie qu’un photon entrant dans la cavité optique va y rebondir cinq cent mille fois avant d’en ressortir.
Un facteur «Q» élevé signifie que les photons passent plus de temps à l’intérieur de la cavité. Et une très petite taille permet d’obtenir, pour une même quantité d’énergie, une plus grande intensité lumineuse. «Non seulement la non-linéarité est proportionnelle à l’intensité lumineuse, mais son effet se renforce également avec le temps passé dans la cavité», explique Vincenzo Savona. Cette alliance entre facteur Q élevé et petite taille explique pourquoi ce nouveau PCN demande une très faible énergie pour servir d’interrupteur.
«Ce travail nous a permis de réaliser des effets non-linéaires à des degrés d’intensité de lumière les plus bas jamais obtenus, affirme Romuald Houdré. Notre structure est également l’une des plus petites jamais conçues dans le but de démontrer de telles propriétés non-linéaires, ceci en utilisant une technologie de nanofabrication traditionnelle. La petite taille, la rapidité et la basse consommation étant des conditions-clés pour la réalisation d’un appareil nanométrique efficace, il s’agit là d’une avancée très importante vers la réalisation de circuits optiques.»