Jouer avec l’espace public, quand le design se fait jeu d’enfant – Agora 2014
Les prix Agora Design 2014 animent l’espace public bordelais :
L’espace public, champ de la transformation du quotidien. Si l’espace public est à la mode, sa définition est complexe. Agora 2014 va s’attacher à lui donner visibilité et lisibilité, explorant toutes les dimensions de cet espace, lieu politique par excellence, lieu des manifestations (libération de Paris, de la chute du mur de Berlin, des révoltes du printemps arabe...) mais également Agora grecque, le forum, le lieu de rencontre, d’ouverture, de partage, où la question des limites reste une question majeure ; les limites de l’espace public peuvent être physiques, fonctionnelles ou symboliques, et mouvantes selon les usages, selon les pays et les civilisations... six films portant sur six villes (Bordeaux, Skopje, Tokyo, Beyrouth, Mexico et Ouagadougou) dresseront un état des lieux dont on pourra mesurer la variabilité selon la nature des cadres posés, selon la prédominance des paramètres économiques, symboliques ou pratiques qui y sont en jeu.
A l’heure où toutes les villes occidentales s’attachent à créer des espaces publics inclusifs, sympathiques, débarrassés de leurs voitures, le risque est grand de voir se développer partout les mêmes aménagements propres, lisses, sans surprise, aseptisés voir stérilisés.
Légiférer ou réglementer. L’obligation ou l’interdiction ?
« Dans une société inquiète, voire angoissée, à la recherche de « zéro risque absolu », la norme a vite colonisé tous les secteurs de la sphère publique. Pour chaque question, pour chaque éventualité, pour chaque doute, la réponse est la même : légiférer ou réglementer. L’obligation ou l’interdiction, selon les cas, surgit, tel un réflexe conditionné ; elle s’impose dans son uniformité, sa rigidité, et parfois son absurdité au responsable local, où qu’il soit et quelles que soient les circonstances locales. La norme s’impose aussi dans ses excès à un citoyen qu’elle est pourtant censée servir et protéger...
Ce sont les organes vitaux de la démocratie que frappent les quelques 400 000 prescriptions techniques aujourd’hui applicables aux collectivités territoriales : le droit, ravagé dans sa crédibilité et son autorité ; la sécurité juridique, victime directe d’une frénésie textuelle devenue chronique ; et surtout l’élu local, fonctionnarisé, parfois infantilisé...
Le centralisme normatif transforme l’élu en administrateur, substitue l’expertise technique à la légitimité des urnes, et change la gestion par l’action en gestion par l’intendance. »
Extrait de la maladie de la norme. Rapport d’information de Claude Belot, Sénat 16 février 2011.
Être acteurs dans l’espace public:
Dans le champ de l’espace public, le risque est grand de voir se développer partout les mêmes aménagements propres, lisses, sans surprise, aseptisés voire stérilisés. Les enfants n’ont plus le droit de jouer que dans les lieux aménagés à cet effet... En général identiques et peu créatifs... Mais réglementaires.
Finis les tracteurs hors d’usage qui restent quand même le meilleur jeu d’enfant jamais imaginé (et sans doute le moins cher). Fini le linge qui sèche aux fenêtres, les pots de fleurs devant la porte, le fauteuil que l’on sort sur le trottoir pour prendre le frais, les jambes qui pendent dans le vide quand on s’assied au bord de l’eau, les fenêtres que l’on ouvre dans le train ou dans le bus... Et pourtant chacun en a la nostalgie et l’incroyable succès de la highline à New York est une preuve éclatante de cette envie nouvelle des habitants d’être acteurs dans l’espace public.
Nicolas Soulier, dans son ouvrage « Reconquérir les rues » (Ulmer 2012), faisant référence à l’ouvrage de Christophe Dejours, « le facteur humain » (Puf 2010) résume parfaitement les deux attitudes possibles adaptables à l’urbanisme et à l’espace public.
« La démarche 1 (défaillance) voit dans les conduites humaines l’exécution plus ou moins dégradée de conduites idéales dans des situations artificielles, les analyses en terme de défaillances, d’erreurs, de fautes, et les considère comme des sources de problèmes, cherchant les moyens de les contrôler, et d’empêcher les accidents qui leur sont imputables. L’objectif est alors la sécurité ; la qualité devenant secondaire et non liée à la question de la sécurité. Comme on peut prévoir qu’il y aura des inconduites et des défaillances, on doit prescrire et discipliner les conduites avec des normes fonctionnelles sans référence aux valeurs qui les motivent. On doit donc autant que possible substituer des automatismes à l’homme. La part de responsabilité revenant aux hommes n’est pas prise en considération.
La démarche 2 (ressource) s’attache à savoir comment mobiliser, développer et gérer les hommes en tant que ressources, considère les échecs comme normaux, et à ne pas assimiler à des défaillances ou des fautes. L’objectif principal est alors la qualité ; la sécurité est un sous produit de la qualité. On doit faire une place à l’accidentel, à l’imprévu, à l’inconnu, car on œuvre dans le mouvant, le changeant, l’inédit. On doit faire une place à l’interprétation, à la délibération, à ce qui doit être ajusté, réaménagé, imaginé, inventé, ajouté à l’ingéniosité, à l’innovation.
C’est une démarche plutôt ordonnée par référence à la notion de culture, c’est-à-dire essentiellement à des valeurs relatives au juste et à l’injuste au désirable et à l’indésirable etc. Ses leitmotivs sont confiance/surveillance et assistance mutuelle, intervention régulatrice/arbitrages, interdictions ; frontières symboliques/respect. A long terme, c’est vraiment une démarche de sécurité même si elle est délicate car toujours susceptible d’être déséquilibrée, comme tout processus vivant complexe. »
L’espace public doit rester complexe. Rien ne doit pouvoir le confisquer aux hommes. Surtout pas les normes. Et si nous décidions de prendre le pouvoir sur elles ?
Pendant la biennale Agora, 4 jeux pour enfants et pour adultes ayant gardé leur âme d'enfant seront installés dans l'espace publique en première présentation, puisque tous sont nés de l'imagination des lauréats du Prix Agora Design 2014.
« Mind the cat »
est un parcours réalisé par Agora d’après une idée originale d’Anabel Albrech et Sandrine Mercurio, les gagnantes du prix du Design Agora 2014 dont le thème était « Un jeu d’enfant ». Cette balade dans la ville part à la recherche de 7 anamorphoses d’animaux origami. À chaque étape, des indices permettent de se rendre à la suivante... un itinéraire ludique et décalé pour permettre aux enfants de découvrir des lieux emblématiques de Bordeaux.
Du 8 septembre /14h au 14 septembre - Départ : éléphant des Quinquonces
« Statbond »
Charlotte Dutil et Sarah Grison ont obtenue la deuxième mention du prix design Agora 2014 pour la simplicité et les différentes formes qu’elles proposent aux enfants sans dénaturer l’espace urbain.
C’est un parcours que les enfants peuvent s’approprier simplement, grâce à la présence d'éléments urbains qu’ils ont l’habitude d’intégrer à leurs jeux. Plus visibles, ces traces favorisent le recours à leur imagination, celle qui fait d’une ligne de dalle un pont de lave !
Du 11 au 15 septembre - Mairie du quartier Saint Augustin © Duthil Charlotte & Grison Sarah
Mais aussi ...
Un labyrinthe aux Chartrons, où les enfants pourront venir se perdre dans un labyrinthe éphémère conçu spécialement pour eux. Du 11 au 15 septembre / Quais des Chartrons face au cours Xavier Arnozan)
« Oh ! Mais quel chantier ! » Du 8 septembre / 14h au 14 septembre Place de l’Eglise de Caudéran