Cet été un nouveau parcours pédestre pour atteindre le Mont-Saint-Michel…, le Pont-passerelle.
Depuis le mardi 22 Juillet, le pont-passerelle ouvre aux piétons son cheminement en bois aux visiteurs du Mont-Saint-Michel. Grâce à sa structure légère et transparente aux courants de marée, le public peut prendre la dimension d’un site qui redevient peu à peu maritime. Les grands coefficients de l’été seront l’occasion de mettre l’ouvrage d’art et le Mont en valeur, même si l’ensemble du chantier d’accès n’est pas tout à fait terminé.
Une partie en digue (1085 mètres), légèrement décalée vers l’Est, est prolongée par un pont-passerelle sur la partie finale du parcours (760 m). Dans une ambiance à nouveau maritime, un gué (120 m) permet d’accéder au village toute l’année, en dehors de quelques heures par an, lors de coefficients exceptionnels supérieurs à 110. Le Mont redevient alors une île, au milieu de son écrin d’origine.
Ces ouvrages de liaison ont été conçus pour être les plus discrets possibles dans le paysage. Digue et pont-passerelle réservent de larges espaces pour les piétons. Ils sont recouverts d’un platelage bois de part et d’autre d’une chaussée centrale dédiée aux navettes. Les parkings, déplacés sur le continent, ont libéré 15 hectares de grèves. Il est désormais possible de prendre le temps d’apprécier le spectacle de la nature sur ces espaces reconquis.
Trois années de travaux (2011-2014) ont été nécessaires. En 2015, le temps sera alors venu de détruire la digue-route du XIXe siècle, un acte symbolique qui marquera la fin des grands travaux et le rétablissement du Mont-Saint-Michel dans son environnement maritime.
La destruction des anciens ouvrages (digue-route, parking), n’est effectuée qu’une fois les nouveaux ouvrages en service, afin de maintenir une desserte permanente du Mont. En toutes circonstances de marée, les services d’urgence peuvent accéder au site pour garantir la sécurité au Mont.
L’ensemble du nouvel accès a été dessiné et réalisé par une équipe pilotée par l’architecte Dietmar Feichtinger. Le pont-passerelle offre une chaussée centrale circulable (6,5 m) et une allée recouverte de chêne pour les piétons (4,5 m) sur une longueur totale de 760 mètres. Il s’articule avec une route d’accès sur 1 km depuis le continent. L’extrémité du pont vient se poser sur la partie supérieure de l’esplanade d’entrée au Mont (2,5 ha). Cet espace modelé en épaisseur sert à la fois à la protection des assises des remparts contre les mouvements d’eau et à l’accueil du public. L’esplanade permet un recul visuel de 300 mètres par rapport au monument, délibérément voulu par les commissions compétentes (Sites et Monuments Historiques) et assure aussi les fonctions nécessaires à la vie du Mont (livraisons, dépose des navettes dédiées, sécurité).
Un mouvement continu et fluide
« Le Mont Saint Michel prend toute sa force du paysage dans lequel il se dresse. Il est le seul point d’intensité dans la planéité infinie des grèves. Pour cette raison le projet s’est donné comme impératif de ne pas perturber le génie du lieu lié à ce statut ambigu et à l’absence de repères et d’échelle. Le regard du visiteur doit continuer à se perdre ; sa promenade est le lieu de sensations d’immersion dans une immensité.
Cette lecture du site nous a conduits à retenir un parti d’horizontalité totale au plus près du plan des grèves et à concevoir un ouvrage aussi fin que possible. Le tracé de l’ouvrage dans le site est l’aboutissement de ces choix préalables croisés avec les contraintes hydrologiques.
Du continent jusqu’au Mont, la géométrie générale de l’ouvrage forme un mouvement continu et fluide. L’ouvrage se dégage lentement vers l’Est pour amorcer un ample mouvement inverse à partir du départ de la jetée, ouvrant des vues plus larges la baie et le rocher de Tombelaine. Le Mont se découvre progressivement, dans un plan/séquence embrassant toute la baie. Ce tracé général est tenu par la courbe extérieure, les variations de largeur n’engendrent pas de ruptures. Des ajustements très progressifs donnent de la fluidité à la ligne de l’ouvrage sur la grève.
C’est un ouvrage minimal dans son expression, mais ambitieux dans sa conception et ses performances. Il met en œuvre des techniques très performantes pour résoudre sans ostentation les efforts auxquels il est soumis ».
Deux séquences en continuité : la digue et la jetée terminée par la cale.
« La digue est une levée de terre empierrée sur un profil trapézoïdal très ouvert.
La jetée, que prolonge naturellement la digue, est une lame au profil très comprimé en porte-à-faux sur une double rangée de piliers fins. Le rythme introduit par les pilotis à partir du lit du Couesnon participe activement à l’idée d’insularité : ces derniers expriment la présence intermittente de la mer à leurs pieds. À marée haute, la ligne de l’ouvrage se reflète dans les flots. La répétitivité des piles, associée à leur élancement, accentue l’horizontalité de l’ouvrage.
La chaussée se scinde en trois bandes distinctes : deux passages piétons recouverts d’un platelage de chêne, de part et d’autre de la chaussée centrale. Cette dernière, réservée à la circulation des navettes, est traitée en béton. Cette bande centrale est recouverte de fines dalles de béton armé. À partir de la jetée et jusqu’à la cale, les deux bandes des cheminements piétons se dégagent sur des consoles métalliques en porte-à-faux de la chaussée centrale elle-même portée par les pilotis. La bande centrale devient alors la colonne verté- brale de l’ouvrage.»
Dietmar Feichtinger, architecte de l’ouvrage d’accès
REPERES TECHNIQUES
Pont-passerelle :
La structure du tablier allie les propriétés de l’acier et celles du béton. La trame en acier du tablier supporte une dalle en béton armé (épaisseur 25 cm), elle-même supportée par des poutres en acier longitudinales (hauteur de 45 cm à 55 cm) ainsi que des traverses transversales. La dalle et les poutres en acier créent ainsi une structure mixte très efficace pour le transfert de charges.
Afin d’assurer un montage à la fois simple et économique, la structure métallique et les dalles ont été préfabriquées en usine et assemblées sur site.
• Longueur totale : 760 m • Hauteur : 9,50 m (NGF), soit la hauteur actuelle de la digue-route
• Hauteur sous tablier : 2 mètres par rapport au niveau des parkings actuels
• Tronçons métalliques du tablier : 1 tronçon de 72 m en fin de digue,
5 tronçons de 120 m, 1 tronçon de 72 m au niveau du terre-plein, délimités par des joints de dilatation, encastrés aux extrémités dans les culées
• Largeur courante du tablier : chaussée de 6,50 m et 2 trottoirs en porte-à-faux sur les consoles de 4,50 m Ouest et 1,50 m Est
• Profil en long : plan à l’exception de la cale (pente d’environ 1%).
Poteaux acier :
Tous les 11,70 m, le tablier est supporté par des poteaux encastrés en tête dans le tablier et en pieds dans les pieux. Les poteaux sont doublés à proximité des joints de dilatation, aux extrémités des travées.
Pour minimiser l’incidence hydraulique, le choix de poteaux de très faible diamètre s’est naturellement imposé. La stabilité horizontale du pont est obtenue par l’intermédiaire des connexions des poteaux au niveau de la fondation et au niveau du tablier. L’encastrement haut et bas a été retenu dans la mesure où il correspond à une connexion simple, efficace et permettant de minimiser les déformations horizontales.
• Diamètre des tubes : 24 cm
• Epaisseur : de 4 à 6 cm
• Hauteurs : de 8,6 m à 6,40 m + longueur dans les pieux : 2 m
Fondation des poteaux :
Les 134 poteaux ont été encastrés dans des pieux en béton d’1m20 de diamètre, eux-mêmes forés à une trentaine de mètres dans le terrain naturel, sous le niveau de la mer. La stabilité de l’ouvrage est assurée par le frottement du béton sur la tangue.
Un prototype échelle 1 avait été réalisé sur le chantier et calé sur le niveau de l’ouvrage final. Il se composait d’une trame de structure métallique sur poteaux, avec la voirie, le platelage bois sur les deux trottoirs, le garde-corps complet et un banc courant avec éclairages incorporés.
Digue-route :
• Longueur totale : 1 085 m
• Hauteur : 9,50 m (NGF)
Sa réalisation prévoit, pour partie, la réutilisation de matériaux extraits sur le site dans le cadre des aménagements hydrauliques. Elle repose sur un géotextile anti-affouillement et une géogrille, pour répartir les efforts, ancrée 2 m sous le remblai et 1,5 m sous la chaussée. En pied de digue, un enrochement évite les affouillements dûs aux courants. Sur les côtés, est posée une couche drainante pour préparer la végétalisation (géotextile coco et une couche de 5 cm de terre végétale).
La digue est surmontée d’une chaussée en béton avec deux trottoirs latéraux recouverts de platelages bois, en continuité avec le pont-passerelle.
Terre-plein et gué :
Le terre-plein comprend une esplanade accessible aux piétons et véhicules de service et sécurité, régulièrement submergée par les marées, et un gué surélevé, avec différents types de revêtement en béton. Des enrochements assurent la protection hydraulique.
• Superficie : 25 000 m2
• Matériaux : tangue compactée, graves et revêtement de surface en béton
• Hauteur du terre-plein : de 4,50 m à 7,30 m NGF (côte du gué)
Submersion du terre-plein et du gué : en moyenne annuelle, le terre-plein est accessible sans difficulté ou avec un temps de submersion court 335 jours par an (670 marées sur 705). Lors des coefficients supérieurs à 110, exceptionnels, le Mont est entièrement inaccessible pendant deux heures, temps de nettoyage compris. Cela se produit environ 15 à 20 jours par an, tôt le matin ou tard le soir, majoritairement au printemps et à l’automne (35 marées sur 705 en moyenne).
Rappelons que le calendrier et le budget ont été respectés, ce qui reste exceptionnel pour un projet de cette complexité en milieu maritime et avec la contrainte de laisser le Mont accessible au public à tout moment des travaux. Les ouvrages d’accès (route d’accès, pont-passerelle, esplanade) représentent un investissement de 43M€ sur un budget total de 184 M€.
Les travaux se poursuivent en effet sur l’esplanade au pied des remparts jusqu’en octobre 2014. A l’automne, le nouvel accès sera officiellement inauguré du continent au Mont et accessible à tous les modes de circulation.
« Nous invitons le public à venir faire ses premiers pas sur le nouveau pont-passerelle en particulier pendant les grandes marées. Les travaux se poursuivent encore, mais la promesse d’un Mont-Saint-Michel totalement renouvelé se rapproche. Chacun peut en apprécier les dernières étapes.»
Laurent BEAUVAIS, Président du Syndicat Mixte Baie du Mont-Saint-Michel
A l’automne, la destruction de la digue-route du XIXe siècle et le creusement du second chenal du Couesnon vers l’Est du Mont vont commencer. La fin complète de l’opération se confirme ainsi pour 2015. Le site sera alors profondément restauré après décapage des anciens parkings maritimes sur 15 hectares. Le Couesnon pourra reformer son estuaire, chasse après chasse, et revenir comme par le passé entourer le Mont Saint Michel de ses deux bras.
Les rendez-vous d’été des grandes marées avec des coefficients supérieurs à 110 réserveront des moments d’insularité complète au Mont. Pour profiter pleinement du spectacle, être sur place au moins 1 heure avant la pleine mer. L’accès au parc de stationnement et aux navettes de transport est gratuit de 19h à minuit.
Août Lundi 11 août 2014 Coefficient 110 à 20h37 Mardi 12 août 2014 Coefficient 112 à 9h04 et Coefficient 113 à 21h23 Mercredi 13 août 2014 Coefficient 112 à 9h48 et 110 à 22h07
Septembre Mardi 9 septembre 2014 Coefficient 113 à 20h20 Mercredi 10 septembre 2014 Coefficient 115 à 8h44 et Coefficient 115 à 21h04
CONCEPTION-RÉALISATION DES OUVRAGES D’ACCÈS – LES INTERVENANTS
• Maitre d’ouvrage
Syndicat Mixte Baie du Mont-Saint-Michel
• Groupement de Maîtrise d’œuvre
Dietmar Feichtinger Architectes BET Schlaich, Bergermann & Partner
• Entreprises
- Marché n°1 (Installations de chantier, mouve- ments de terre, VRD, protections hydrauliques) : Rol Normandie / Vinci CT – Agence Terrasse- ment Ouest
- Marché n°2 (Fondations spéciales, génie civil, tablier mixte, structure métallique, montage et levage) : Eiffage Construction Métallique / Eiffage Travaux Maritimes et Fluviaux / Spie Fondations
- Marché n°3 (Platelage et main courante en bois) : Les Ateliers Aubert-Labansat
- Marché n°4 (Serrurerie et métallerie) : BP Métal - Marché n°5 (Électricité et éclairage) : Cegelec Ouest