Le Canal de la Crau, le canal de la honte….
Dans le sud de la France, à l'est de la Camargue, la plaine de la Crau constitue un écosystème unique en termes de biodiversité. Elle est en proie à une pollution que dénoncent les associations écologistes locales.
Ancien delta de la Durance, aujourd'hui plaine aride et caillouteuse, la Crau représente le dernier écosystème steppique encore présent en France, et abrite une diversité faunistique et floristique uniques. Elle est en partie classée comme Réserve naturelle nationale. Ce statut permet de protéger ce qu'il en reste des bétonneurs et aménageurs.
Mais d’autres menaces subsistent dont l’une ancienne a refait surface l'hiver dernier sous la forme de dizaines de tonnes de plastiques divers, dont une majorité de sacs, lors d'une banale opération de curage du canal de Centre-Crau. Il se pourrait bien qu'il s'agisse de déchets issus de la décharge d'Entressen. Située à quelques kilomètres à l'est de la Crau, elle a accueilli pendant presque un siècle les ordures de l'agglomération marseillaise et a été fermée en 2010, après avoir pendant longtemps pollué les écosystèmes et les paysages de toute la zone.
Durant presque 100 ans, la décharge de la Crau a servi de principal site de stockage de déchets de la Métropole Marseillaise. Plus grande décharge à ciel ouvert d'Europe, elle a fait l'objet de nombreuses polémiques. Durant son exploitation en effet les plastiques volaient à plusieurs kilomètres et les arbres des environs en étaient constamment couverts. De nombreuses associations évoquent aussi une pollution des nappes phréatiques et cours d'eau attenants. L’incinérateur de Fos- sur-Mer qui l'a remplacé a également posé de nombreux problèmes, ce qui prouve bien la difficulté de nos sociétés « hyper-consommatrices » à gérer le problème des déchets.
Une opération du curage du canal centre-Crau a mis récemment à jour une pollution par des plastiques d'une ampleur gigantesque. Ni la mairie de Port-Saint-Louis, responsable du curage et propriétaire du site, ni celle d'Arles, territorialement compétente et garante de la salubrité publique n'ont jusqu’à présent, assuré le nettoyage. Ces plastiques, issus de l'ancienne décharge de Marseille en Crau, à l’air libre, recommencent à s'envoler ou à s'affaisser dans le canal.
Ces déchets ne sont sans doute qu'une infime partie de ce qui est enfoui au fond du canal qui rappelons-le, traverse deux réserve naturelles et termine sa course dans le périmètre du Parc naturel régional de Camargue Depuis l'intervention des associations, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole s'est mollement engagé à évacuer ce qui a été sorti. Mais il faudra, en sus, procéder également au curage de l'ensemble des canaux pollués (plus d'une quinzaine de kilomètres) et de l'étang du Landre. Or, ça, personne ne veut en entendre parler.
Ces déchets, dans les canaux d'eau douce, peuvent impacter les nappes phréatiques lorsqu'ils sont souillés. Ils peuvent également être ingérés par erreur par de nombreuses espèces animales et provoquer leur mort par occlusion intestinale (Tortue cistude, poissons, oiseaux...). Abandonnés dans les fleuves et canaux, les plastiques finissent en mer. Ils sont une des sources de pollution les plus problématiques, formant de véritables « continents flottants » à certains endroits. Ils sont ingérés alors par les tortues marines, les poissons, les baleines, dauphins et cachalots. La mer Méditerranée, avec le sanctuaire Pelagos, est riche de toutes ces espèces animales.
Ce sont donc ces déchets qui, exhumés par les tractopelles, sont aujourd'hui entassés sur le bord du canal et prêts à s'envoler de nouveau après avoir passé plusieurs décennies sous l'eau, non sans contaminer les écosystèmes aquatiques de deux réserves naturelles et du Parc naturel régional de Camargue. Il ne s'agit pourtant que de la partie visible de la pollution puisque seule une portion du canal longue d'un kilomètre a été curée, alors que plusieurs autres kilomètres sont concernés ainsi que l’étang du Landre, réceptacle naturel de ce canal. Face à ce scandale, et alors que les acteurs locaux publiquement interpellés (dont la Communauté urbaine de Marseille Provence Métropole, ex-gestionnaire de la décharge d'Entressen, ainsi que les communes d'Arles et de Port-Saint-Louis) se renvoient courageusement la patate chaude, les associations écologistes locales Nacicca, Agir pour la Crau et FNE PACA, viennent donc de déposer une plainte contre X. Elles attendent de l'enquête qui suivra qu'elle établisse les responsabilités pénales des divers acteurs et, surtout, que la dépollution du canal dans son intégralité soit prise en charge et effectuée dans les plus brefs délais. Mais il y a également une question de principe à ce que les responsables de dégâts environnementaux et sanitaires d'une ampleur aussi considérable pendant plusieurs décennies, et ce en parfaite connaissance de cause, soient enfin mis en face des conséquences de leur cynisme.
Rappelons que les déchets plastiques sont une des sources de pollution les plus problématiques dans les mers et océans. On parle de véritables « continents flottants » à certains endroits où les plastiques en suspension sont plus importants en densité que les planctons. Les plastiques sont ingérés par les tortues marines, les poissons, les baleines, dauphins et cachalots qui meurent ensuite d'occlusion intestinale comme ce fut le cas récemment pour un cachalot échoué en Espagne. La mer Méditerranée, avec le sanctuaire Pelagos, est riche de toutes ces espèces animales. Pour toutes ces raisons, les associations vont entamer un recours juridique pour obliger les responsables à assumer le chantier de nettoyage et la dépollution complète du canal centre Crau.